ClaudepréfÚre la littérature et l'art. Mariée à Georges Pompidou en 1935, elle est à la Libération . la jeune épouse discrÚte de l'un des chargés de mission au cabinet du général de
Blu-Ray - 1 disqueStudio StudioCanal Langues Allemand, françaisSous-titres AllemandsBonus ? Sortie le 08 avril 2021Prix ~ 14 euros Disponible Ă  la commande sur 25 films sont en compĂ©tition lors de cette 23Ăšme Ă©dition du Festival de cinĂ©ma Ă  Cannes. Parmi eux, Les Choses de la vie, le dernier film du cinĂ©aste français Claude Sautet, sur un scĂ©nario de Jean-Loup Dabadie, adaptĂ© d'un roman de Paul Guimard. Comme le veut la tradition, c'est entourĂ© de ses principaux comĂ©diens, Ă  savoir Romy Schneider, LĂ©a Massari et Michel Piccoli que le rĂ©alisateur prĂ©sente son long mĂ©trage en confĂ©rence de presse Ă  des journalistes peu inspirĂ©s. Blu-Ray - 1 disqueStudios StudioCanal Langue FrançaisSous-titres FrançaisBonus ? Date de sortie 1er aoĂ»t 2020Prix = ~ 15 euros Disponible Ă  la commande sur Source - 21 mars 2020 Le film avec Romy Schneider et Michel Piccoli fĂȘte ses 50 ans cette semaine A l'occasion du 50e anniversaire des "Choses de la vie", nous mettons en ligne notre dossier spĂ©cial consacrĂ© au chef-d'oeuvre de Claude Sautet publiĂ© dans le PremiĂšre Classics n°4 avec "Les Dents de la mer" en couverture. Le sujet principal est Ă  lire ici, et voici notre entretien avec Philippe Sarde, le compositeur du film, qui a travaillĂ© Ă©troitement avec le cinĂ©aste. A quel stade de la production des Choses de la vie rencontrez-vous, pour la premiĂšre fois, Claude Sautet ? En 1969, alors que le film est dĂ©jĂ  tournĂ© et prĂ©-montĂ©. J’ai 16 ans et c’est l’un des producteurs, Jean Bolvary, qui connaĂźt mon pĂšre et m’appelle. Il n’ignore pas que je veux devenir metteur en scĂšne, mais il sait Ă©galement que, bien que trĂšs jeune, je compose, ayant fait le Conservatoire, avec une mĂšre chanteuse d’opĂ©ra et Georges Auric pour parrain. Il me dit "Cela t’intĂ©resserait de faire la musique des Choses de la vie, que je co-produis ?" Je ne le lui avoue pas, mais j’avais lu le roman de Guimard, que je trouvais inadaptable. Je demande alors Ă  Bolvary le nom du metteur en scĂšne. Sautet, qui n’a plus rĂ©alisĂ© de films depuis longtemps, ne fait pas partie de mon paysage. Les interprĂštes ? Romy Schneider n’est encore, pour moi, que "Sissi". Reste Michel Piccoli, que je connais pour des seconds rĂŽles, et que j’estime. Bolvary propose que Sautet vienne chez moi, le lendemain Ă  19h. Entre-temps, je cherche Ă  savoir comment le rĂ©cit des Choses de la vie a pu ĂȘtre transposĂ© Ă  l’écran. Je trouve, dans la revue Le technicien du film, un rĂ©sumĂ© du scĂ©nario de Dabadie qui, Ă  travers l’évocation de l’accident, m’éclaire sur son adaptation et m’inspire. Revenu Ă  la maison, j’écris une quinzaine de mesures. J’ai, dĂ©jĂ , le thĂšme du film
 Sur quelle tonalitĂ© ? Qu’est-ce qui vous inspire ?Le climat. J’écris en La mineur. C’est une tonalitĂ© qui amĂšne bien le drame. La mĂ©lodie, dessus, pouvant ĂȘtre celle d’HĂ©lĂšne-Romy Schneider. Comment se passe votre entrevue avec Sautet ?Je le reçois en pyjama. Il est en complet veston. TrĂšs vite, je suis touchĂ© par ses yeux bleu, remplis d’émotion. Il m’affirme qu’aucun compositeur ne lui convient et me dit "Tant qu’on n’a pas trouvĂ©, on cherche toujours." Je lui raconte que j’ai Ă©crit deux chansons pour RĂ©gine, mais ne lui parle pas des deux courts-mĂ©trages que j’ai rĂ©alisĂ©. Finalement, je me mets au piano pour lui jouer les quelques mesures du thĂšme que j’ai trouvĂ©. Il est assis Ă  ma droite, en retrait. Et je n’entends aucune rĂ©action. Je me retourne et vois, alors, Claude en larmes, qui me dit "C’est exactement cela que je recherche ! Vous ĂȘtes libre demain ? Je vous organise une projection du film, Ă  Epinay." Votre collaboration dĂ©marre, pour ne plus s’arrĂȘter. Plus tard, Sautet dira de vous "C’est un vrai cinĂ©phile. Paradoxalement, je suis plus musicologue. Cela créé un Ă©quilibre entre nous. La cinĂ©philie de Philippe m’a Ă©tĂ© aussi prĂ©cieuse que ses qualitĂ©s musicales." De quelle maniĂšre ?Par une collaboration Ă  tous les niveaux, en amont, "Les Choses de la vie" Ă©tant le seul de ses films oĂč je suis arrivĂ© aprĂšs. Ainsi, Ă  l’issue de cette premiĂšre projection Ă  Epinay, je dis Ă  Claude "Qu’est ce que Romy Schneider est belle !", mais j’ajoute aussitĂŽt que l’accident n’est pas "emmenĂ©" comme il devrait l’ĂȘtre ; ni au gĂ©nĂ©rique qui n’est pas encore montĂ©, ni via les plans au ralenti de l’accident sous forme de flash-backs qui, bien qu’écrits par Dabadie et tournĂ©s, avaient Ă©tĂ© enlevĂ©s par Claude au montage. D’oĂč une absence d’empathie avec le personnage de Piccoli. En mettant le doigt sur ce qui ne va pas et sur la clef de la narration, j’interpelle Sautet. Lequel, convaincu, demande immĂ©diatement Ă  sa monteuse Jacqueline ThiĂ©dot de rĂ©intĂ©grer les flash-backs. Puis, il me dit que j’ai un mois pour Ă©crire la totalitĂ© de la musique
 Qui sont vos modĂšles parmi les compositeurs de films ?Il y a les Français Auric, Misraki, Van Parys, CloĂ«rec. Puis les AmĂ©ricains, Herrmann et Mancini. Enfin, mon ami François de Roubaix. Je veux, comme eux, faire avec ma musique un "film parallĂšle". Je dĂ©sire aussi changer de registre d’un film Ă  l’autre. Mais je me demande, Ă  l’époque, si l’on va m’y autoriser
 Que vous autorisez-vous pour Les Choses de la vie ?Un orchestre symphonique de 70 musiciens, et une utilisation des cordes extrĂȘmement divisĂ©es. J’applique un mĂ©lange cordes, cors et piano qui fonctionne trĂšs bien. Pour la brĂšve scĂšne oĂč l’on voit Piccoli et Romy Ă  vĂ©lo, j’use d’une petite formation, Ă  base de cordes et de flĂ»tes, en m’inspirant de Vivaldi. Comment vient l’idĂ©e de La chanson d’HĂ©lĂšne, qui n’est pas intĂ©grĂ©e dans le film ?Avec Dabadie, nous nous entendons pour tirer une chanson du thĂšme, Jean-Loup Ă©crivant le texte. Puis, l’on va voir Romy qui, enthousiaste, demande "Quand est-ce qu’on enregistre ?" Et l’on se retrouve, trĂšs vite, aux studios Barclay. Je supprime les cordes, fait mettre des bois, un piano, une harpe. Romy et Michel Piccoli enregistrent en une prise. Claude, prĂ©sent lors de la sĂ©ance avec Dabadie et moi, ne pipe mot. Il faut savoir qu’il refusait de mettre des chansons dans ses Ɠuvres par refus du sentimentalisme et par crainte qu’on rapproche ses films de ceux de Lelouch ! Or, il n’y a nulle trahison dans mon esprit. Mais peut-ĂȘtre que, s’il n’y avait pas eu ce respect entre nous, cela aurait emmerdĂ© Claude que le public associe davantage Les choses de la vie Ă  la chanson de Romy qu’au film lui-mĂȘme
 Avez-vous Ă©tĂ© pour Sautet ce que Delerue fut pour De Broca ; celui qui, par le lyrisme ou la truculence de sa musique, rĂ©vĂ©lait les sentiments d’un cinĂ©aste trop pudique ?Certainement. Il me laissait aller, sachant que mon Ă©motion n’était jamais gratuite. Et, pour prendre un exemple, je pense que si je n’avais pas Ă©tĂ© aussi radical sur "Max et les ferrailleurs", en virant les cordes et les pianos pour les remplacer par des cuivres et des bois Ă  la Stravinsky, Claude n’aurait pas osĂ© ĂȘtre aussi noir, davantage mĂȘme que dans le roman de Claude NĂ©ron. Avez-vous conscience que la musique des Choses de la vie symbolise, aujourd’hui, la France des annĂ©es Pompidou dont la nostalgie fait Ă©cho Ă  la mĂ©lancolie solaire de votre thĂšme ?Peut-ĂȘtre. Mais s’il y a une chose Ă  laquelle je n’ai jamais pensĂ©, c’est Ă  ça ! Je laisse les autres s’interroger ; ce constat, c’est du chinois pour moi. MĂȘme si l’émotion, liĂ©e au film et Ă  la voix de Romy, est toujours là
 Propos recueillis par Olivier Rajchman o0o o0o o0o Les Choses de la vie a 50 ans DĂ©couvrez la crĂ©ation de ce chef-d'Ɠuvre de Claude Sautet5 raisons de redĂ©couvrir Les choses de la vie de Claude Sautet avec Romy Schneider. "Les choses de la vie" c’est d’abord une voiture qui file Ă  toute allure sur les routes de France, percute une camionnette et vient se fracasser contre un arbre Ă©jectant du mĂȘme coup le corps de son passager sur l’herbe fraĂźche. Mais comme le cinĂ©ma permet des miracles, un retour en arriĂšre corrige les choses, les remet Ă  leur place avant que le drame ne survienne. Le cinĂ©ma comme un Dieu tout puissant peut retarder l’inĂ©vitable, voire le rĂ©inventer. Les choses de la vie, c’est l’histoire de cette rĂ©appropriation. L’essence de l’art en somme. Pour la photogĂ©nie de Romy SchneiderIl y avait dans le Sautet des seventies sa dĂ©cade glorieuse ! quelque chose de profondĂ©ment français dans sa façon d’envisager le romanesque Ă  l’écran et d’hollywoodien dans sa maniĂšre de regarder Romy Schneider. En revoyant le film aujourd’hui, on est frappĂ© par la maniĂšre dont le cinĂ©aste soigne chaque plan de sa muse. Sautet se souvient de l’ñge d’or des studios amĂ©ricains, avec ces rĂ©alisateurs qui, par contrat, se devaient de sublimer leurs stars. Schneider devant sa machine Ă  Ă©crire au dĂ©but du film, c’est Hayworth, Garbo, Bacall... A ce degrĂ© de sublime, le mot photogĂ©nie ne suffit plus. Pour la chanson d'HĂ©lĂšneLes choses de la vie marque les dĂ©buts de la collaboration de Claude Sautet avec le compositeur Philippe Sarde. Le musicien Ă©crit pour l’occasion le thĂšme entĂȘtant baptisĂ© La chanson d’HĂ©lĂšne, du nom du personnage de Romy Schneider. Avec la complicitĂ© de Jean-Loup Dabadie et sans prĂ©venir Sautet, Sarde fait venir l’actrice et Michel Piccoli en studio pour qu’ils posent leur voix sur la mĂ©lodie. Cette version chantĂ©e et dĂ©chirante ne sera finalement pas utilisĂ©e dans le film. Pour la fragilitĂ© de Michel PiccoliAvec Les choses de la vie, Claude Sautet a trouvĂ© son mĂąle, celui qui peut afficher Ă  la fois grĂące, sensualitĂ©, fragilitĂ© et virilitĂ©. Ici, Michel Piccoli c’est d’abord un corps accidentĂ©, inerte allongĂ© dans une herbe fraĂźche. C’est aussi et surtout une voix grave, mĂ©lodieuse et enjĂŽleuse qui peut raconter toutes les histoires du monde, on l’écoutera. AprĂšs ces Choses, il n’y aura, entre Sautet et lui, que des films Ă  prĂ©noms "Max et les ferrailleurs", "Mado", "Vincent, François, Paul et les autres". Pour avoir sauvĂ© Sautet"Les choses de la vie" est l’adaptation d’un roman de Paul Guimard. En 1970, Claude Sautet a dĂ©jĂ  46 ans et 3 longs-mĂ©trages Ă  son actif. L’échec du dernier "L’arme Ă  gauche", incite le cinĂ©aste Ă  se remettre en question. Il change donc de braquet, appelle le parolier Ă  succĂšs Jean-Loup Dabadie Polnareff, Clerc, Reggiani, Montand
 pour faire vivre cette histoire d’accident de la route. Annie Girardot et Yves Montand puis Lino Ventura dĂ©clinent Les choses de la vie. Ça n’empĂȘche pas le film d’ĂȘtre un succĂšs public et d’obtenir le Prix Louis Delluc. En 1994, Mark Rydell signe un inutile remake avec Richard Gere et Sharon Stone, baptisĂ© Intersection. Nul comme titre ! Thomas Baurez Source - 18 mars 2020 Retour sur ce film-clĂ© dans la carriĂšre de Claude Sautet, sorti dans les salles françaises en 1970. L’adaptation d’un roman de Paul GuimardOn connaĂźt l’histoire
 Au volant de sa voiture, un architecte, Pierre, est victime d'un accident de la route. EjectĂ© du vĂ©hicule, il gĂźt inconscient au bord de la route et se remĂ©more son passĂ©. Sa vie avec HĂ©lĂšne, une jeune femme qu'il voulait quitter, les souvenirs de sa femme Catherine et de son fils, tout se tĂ©lescope. Avant de devenir un film, "Les Choses de la vie" a Ă©tĂ© un roman, Ă©crit par Paul Guimard en 1967. Une Ɠuvre que son auteur – qui vient alors de cosigner avec Antoine Blondin les dialogues d’ "A nous deux Paris !" de Jean-Jacques Vierne – rĂȘve de voir adaptĂ© sur grand Ă©cran. Il contacte donc le scĂ©nariste Jean-Loup Dabadie et le duo se met au travail jusqu'Ă  obtenir une premiĂšre version du script. Dabadie commence Ă  faire le tour des producteurs avec ce scĂ©nario et
 tous dĂ©clinent. Il se tourne alors vers le seul rĂ©alisateur qu’il connaĂźt dans le mĂ©tier, un certain Claude Sautet. Il lui envoie le scĂ©nario avec ce petit mot comme une bouteille Ă  la mer "Je cherche un metteur en scĂšne, et il n’y a que toi qui puisse me conseiller." Le retour de Claude Sautet au cinĂ©ma aprĂšs 5 ans d’absenceClaude Sautet connaissait Ă  ce moment-lĂ  un creux dans sa carriĂšre. L’échec en 1965 de son polar "L’arme Ă  gauche" l’a Ă©loignĂ© des plateaux de tournage. Il se consacre uniquement Ă  jouer les "script doctors" auprĂšs d’amis cinĂ©astes Alain Cavalier pour "La chamade", Philippe de Broca pour "Le diable par la queue". Il reçoit des dizaines de propositions de scĂ©narios Ă  rĂ©aliser, mais il dit non Ă  tout. Jusqu'Ă  ce que sa femme Graziella lui fasse passer cette adaptation des "Choses de la vie" que Dabadie avait glissĂ©e sous la porte de leur appartement parisien. 70 pages lues d’abord par son Ă©pouse qui lui assure qu’il y a un film pour lui. Une seule lecture suffit Ă  Sautet pour en ĂȘtre convaincu, attirĂ© tout particuliĂšrement par la scĂšne d’accident et la maniĂšre dont il allait pouvoir la mettre en scĂšne. Yves Montand et Annie Girardot le premier couple envisagĂ©Quand Claude Sautet signe son contrat pour rĂ©aliser "Les choses de la vie", le casting des deux rĂŽles principaux semble dĂ©jĂ  actĂ©. Ce seront Yves Montand et Annie Girardot. Mais Sautet hĂ©site. Il ne veut pas trop clairement Ă©voquer Vivre pour vivre de Lelouch, dont ce duo constituait dĂ©jĂ  les tĂȘtes d’affiche. Alors il va se battre pour imposer deux nouveaux acteurs. Pour le rĂŽle de Pierre, il rĂ©ussit Ă  imposer un comĂ©dien dont il a admirĂ© la composition dans "Le doulos" de Jean-Pierre Melville, huit ans plus tĂŽt Michel Piccoli. Sautet envisage d’ailleurs Piccoli comme une sorte de prolongement de lui-mĂȘme Ă  l’écran et il le dirigera par la suite dans "Max et les ferrailleurs", "Vincent, François, Paul... et les autres", et "Mado" tout en lui confiant la voix du narrateur de "CĂ©sar et Rosalie". Pour le rĂŽle de l’épouse, Catherine, il fait appel Ă  une comĂ©dienne Ă  laquelle il avait dĂ©jĂ  pensĂ© pour Classe tous risques et "L’arme Ă  gauche" LĂ©a Massari, qui sera dans la foulĂ©e l’hĂ©roĂŻne du film-scandale de Louis Malle, "Le souffle au cƓur". La rencontre Claude Sautet-Romy SchneiderPour le rĂŽle d’HĂ©lĂšne, Claude Sautet sĂšche. Il pense Ă  toutes les actrices françaises sans jamais ĂȘtre convaincu. C’est son ami Jacques Deray qui lui glisse le nom de Romy Schneider qu’il vient de diriger dans "La piscine". Comme Sautet, la comĂ©dienne est alors dans un creux de sa carriĂšre, aprĂšs avoir dĂ©cidĂ© de s’éloigner des plateaux suite Ă  la naissance de son fils David. Sautet qui ne la voit toujours que comme l’hĂ©roĂŻne de "Sissi" ne l’imagine pas une seconde dans le rĂŽle d’HĂ©lĂšne. A l’invitation de Deray, il va la rencontrer aux studios de Boulogne oĂč se dĂ©roule la post-synchronisation des versions anglaise et allemande de "La piscine". C’est lĂ , dans l’ombre d’un couloir, que la simple vision de sa nuque et de son chignon le bouleverse. Au point de ne mĂȘme pas pouvoir lui adresser la parole. Il l’appellera le lendemain pour qu’ils se rencontrent pour un dĂ©jeuner, Ă  l’issue duquel il a non seulement trouvĂ© son HĂ©lĂšne mais une muse. Celle qui le poussera Ă  crĂ©er de vĂ©ritables personnages fĂ©minins dans ses films et qu’il dirigera Ă  quatre autres reprises "Max et les ferrailleurs", "CĂ©sar et Rosalie", "Mado" et "Une histoire simple". La premiĂšre de Philippe SardeEn cette fin des annĂ©es 60, Philippe Sarde vient de fĂȘter son vingtiĂšme anniversaire. Et il ne sait pas encore trĂšs prĂ©cisĂ©ment de quoi sera faite sa vie, tiraillĂ© entre deux passions le cinĂ©ma et la musique. Il vient d’ailleurs de terminer un court mĂ©trage en noir et blanc et a demandĂ© Ă  Vladimir Cosma de l’aider Ă  l’orchestrer. Pour la musique des "Choses de la vie", Claude Sautet a prĂ©vu de faire appel Ă  Georges Delerue qui avait dĂ©jĂ  signĂ© la BO de son "Classe tous risques". Mais en cette annĂ©e 69 celui-ci est indisponible car accaparĂ© sur la production de 6 films "Le cerveau" de GĂ©rard Oury, "Le diable par la queue" de Philippe de Broca, "Hibernatus" d’Edouard Molinaro, "Promenade avec l’amour et la mort" de John Huston, "Anne des mille jours" de Charles Jarrott et "Love" de Ken Russell. GrĂące Ă  l’un des producteurs des "Choses de la vie" qui connaĂźt le pĂšre de Sarde, Sautet se tourne vers ce tout jeune compositeur qui va signer sa premiĂšre BO de film. "Les choses de la vie" est dĂ©jĂ  tournĂ© et prĂ©-montĂ©, mais Sarde connaĂźt l’histoire pour avoir lu le roman. Avant le premier rendez-vous avec Sautet, il Ă©crit donc plusieurs morceaux, dont ce qui deviendra le thĂšme des "Choses de la vie". Il les joue au cinĂ©aste qui fond immĂ©diatement en larmes. Sautet lui organise une projection du film le lendemain et l’aventure peut commencer. Philippe Sarde enregistrera cette bande originale avec un orchestre symphonique de 70 musiciens. Ainsi naĂźt la premiĂšre Ă©tape d’une collaboration de 25 ans Sarde signera les BO de tous les films de Claude Sautet jusqu'Ă  son ultime long mĂ©trage, "Nelly et Monsieur Arnaud". DVD - 1 disque Studios Divisa HV Langues ? français ?Sous-titres EspagnolsBonus ? Sortie le 04 octobre 2018Prix ~ 10 euros Disponible sur Blu-Ray- 1 disque Studios Divisa HV Langues ? français ?Sous-titres EspagnolsBonus ? Sortie le 04 octobre 2018Prix ~ 12 euros Disponible sur Les lobby cards - Hongrie Auteur ?Editions Encyclopaedia Universalis Format Kindle Langue FrançaisTaille 888 KB - 13 pages Prix ~ 4 eurosSortie le 02 aoĂ»t 2016 A tĂ©lĂ©charger sur PrĂ©sentation de l'Ă©diteur Une fiche de rĂ©fĂ©rence sur "Les Choses de la vie", un chef-d'oeuvre de Claude Sautet. Connu auparavant comme rĂ©alisateur de polars "Classe tous risques", 1960, Claude Sautet ne voulut pas se spĂ©cialiser dans les films d'action, et adapta en 1970 un roman de Paul Guimard, "Les Choses de la vie" 1967. Bien que le sujet principal puisse paraĂźtre d'une rare tristesse – il s'agit essentiellement de dĂ©crire la mort du hĂ©ros –, le film rencontra un vif succĂšs en France. Un ouvrage conçu par des spĂ©cialistes du cinĂ©ma pour tout savoir sur "Les Choses de la vie" de Claude Sautet. CD - 3 disquesCompilationSortie le 23 mars 2015 Jean-Loup Dabadie & ses interprĂštes est le deuxiĂšme volume de la collection Les Grandes Plumes de la chanson française, des triples albums consacrĂ©s aux auteurs/compositeurs et Ă  leurs interprĂštes en partenariat avec la de retrouver les plus grands textes Ă©crits par Jean-Loup Dabadie pour Isabelle Boulay, Robert Charlebois, Julien Clerc, Jacques Dutronc, Claude François, Jean Gabin, Johnny Hallyday, Michel Polnareff, Michel Sardou, Serge Reggiani, Sylvie Vartan
 Ce triple album propose Ă©galement de redĂ©couvrir une sĂ©lection de grands sketches pour Guy Bedos, Sophie Daumier et l'inoubliable Maman interprĂ©tĂ© par Michel et Jackie Sardou. Émotion et rire 46 titres rĂ©unis en 3CD thĂ©matiques La vie, Le rire, Les larmes. Disque 1 La vie01. On ira tous au paradis - Michel Polnareff02. L'italien - Serge Reggiani03. Ma prĂ©fĂ©rence - Julien Clerc04. Ta jalousie - Juliette GrĂ©co05. Femmes je vous aime - Julien Clerc06. Chanteur de jazz - Michel Sardou07. J'ai epousĂ© une ombre - Johnny Hallyday08. J'comprends pas - Jacques Dutronc09. Un homme - Nicoletta10. Je danse - Claude François11. RĂȘves immoraux - Patrick Juvet12. Aimer - Sylvie Vartan13. NĂ© dans un ice-cream - Michel Polnareff14. Valentin - Yves Montand 15. Maintenant je sais - Jean Gabin Disque 2 Le rire01. Bonne fete Paulette - Guy Bedos02. Les mauvais coups - Guy Bedos03. Saint-tropez c'est trop - Guy Bedos04. Visite au malade - Guy Bedos05. Le parolier - Guy Bedos06. Carton rose - Guy Bedos07. Le fils a papa - Guy Bedos08. Public mon chĂ©ri - Guy Bedos09. Les filles comme des mouches - Guy Bedos 10. Bibi - Guy Bedos 11. Chapon Gilbert - Guy Bedos 12. Patience aux Batignolles - Sophie Daumier 13. Esprit d'entreprise es-tu la - Guy Bedos 14. Maman - Michel SardouDisque 3 Les larmes01. Le voyage - Enrico Macias02. Le petit garçon - Serge Reggiani03. Reviens, reviens, reviens - Isabelle Boulay04. L'assassin assassinĂ© - Julien Clerc05. Meurs pas - Robert Charlebois06. Le clan des siciliens - Dalida07. Marie Chenevance - Barbara08. Lettre Ă  France - Michel Polnareff09. Il est mort le chanteur - Didier Barbelivien 10. Une maison en France - Sacha Distel 11. Pourquoi faut-il se dire adieu ? - Michel Polnareff 12. La photographie - Emily Loizeau 13. La chanson d'HĂ©lĂšne - Romy Schneider 14. Salut - Michel Sardou 15. Au revoir et merci - Nicole Croisille 16. Le temps qui reste - Serge Reggiani DVD - 1 disqueStudio StudioCanal Langues Allemand, FrançaisSous-titres ?Bonus ? Sortie le 04 dĂ©cembre 2014Prix ~ 13 euros Disponible Ă  la commande sur Source Shangols - 29 juillet 2008 Il est fou de voir la facilitĂ© qu'on a Ă  vouloir oublier complĂštement la fin de certains films; j'avais revu Les Choses de la Vie il y a lĂ©gĂšrement plus de deux ans - avant la crĂ©ation de ce blog - et j'avais beau m'ĂȘtre dit et rĂ©pĂ©tĂ© que la fin Ă©tait inoubliable, eh ben non, encore cette fois-ci, jusqu'au bout, j'ai voulu croire au miracle. Claude Sautet parvient, en Ă  peine une heure vingt, avec un accident de caisse et une poignĂ©e de flashs-back, Ă  nous rendre crĂ©dibles non seulement l'histoire d'amour entre Piccoli et Romy Schneider, leur univers, leur complicitĂ© et leurs petits diffĂ©rends, mais Ă©galement Ă  nous dĂ©voiler tout un pan du passĂ© de Piccoli, son ancienne femme, ses relations avec son fils, sa vie quoi. Une scĂšne d'ouverture inoubliable, un accident image par image et puis on remonte le fil jusqu'Ă  la journĂ©e de la veille. L'histoire tient sur une nappe Piccoli est amoureux comment ne pas l'ĂȘtre... de la Romy mais semble tergiverser, tiraillĂ© entre des images d'une ancienne vie qui lui manque et l'angoisse de s'engager leschosesdelavie9kbdĂ©finitivement dans une autre aventure, une autre histoire, un autre amour. La construction du film n'est en rien rĂ©volutionnaire, certes. Le don de Sautet, avec une grande Ă©conomie de dialogues, c'est non seulement de nous rendre palpables les sentiments entre les diffĂ©rents personnages, mais surtout de parvenir Ă  illustrer la vĂ©ritable tempĂȘte dans le crĂąne de Piccoli. Lorsqu'on le retrouve au volant de sa voiture, on plonge littĂ©ralement dans ses pensĂ©es et, en une multitude de petites sĂ©quences, quasi impressionnistes, on dĂ©couvre tout le tableau de sa vie son bonheur passĂ© avec une autre femme, son coup de foudre pour le regard de la Romy, ses doutes, ses envies, ses brusques dĂ©cisions... Ensuite la mĂ©canique du destin est la seule responsable de ce carambolage stupide, une des trois millions de choses incomprĂ©hensibles de la vie. Si l'accident de la route nous est contĂ© par le menu, Ă©voquĂ© au dĂ©part comme une sĂ©quence policiĂšre pour finalement s'attacher, dans les moindres petits dĂ©tails, aux acteurs, malgrĂ© eux, de ce drame, toutes les sĂ©quences mises en scĂšne auparavant par Sautet portent en elles un vĂ©ritable souffle de vie grĂące en soit rendue aux acteurs, definitely, mais aussi Ă  l'art de Sautet de dessiner, en un coup de pinceau, une situation d'un "rĂ©alisme" aigu sur le bateau, dans le cafĂ©, sur le chantier, dans l'appart... Les rares dialogues entre Romy et Piccoli sont, tout autant, d'une justesse remarquable, frappent juste au bon moment "Je ne veux pas d'une Ăźle qui a dĂ©jĂ  servi"; "Je ne vois rien sans mes lunettes / T'as qu'Ă  me demander, je te raconterai"; "Tu m'aimes parce que je suis lĂ  mais s'il faut traverser la rue parce que je suis de l'autre cĂŽtĂ©, tu es perdu"; il y a mĂȘme un unique flash-forward superbement onirique qui concentre tout un bonheur Ă©ventuel et le tragique du prĂ©sent, en faisant simplement le tour de la table d'un repas de mariage... Claude Sautet n'est peut-ĂȘtre pas celui qui a le plus rĂ©volutionnĂ© l'art cinĂ©matographique; n'empĂȘche que rares sont les films qui sont capables de traverser les dĂ©cennies sans que la moindre petite ride ne les affecte. Les Choses de la Vie garde en lui un pouvoir Ă©motionnel intact et je ne sais point si je suis ou non romantique mais ce film m'abat comme un chĂȘne sciĂ© Ă  la base, Ă  chaque fois. Source - 18 juillet 2013 Romy Schneider et Michel Piccoli irradient ce drame d’un accident de la route, premier grand succĂšs de Claude Sautet. Prix Louis Delluc 1970. L’argument Au volant de sa voiture, Pierre, architecte d’une quarantaine d’annĂ©es, est victime d’un accident. ÉjectĂ© du vĂ©hicule, il gĂźt inconscient sur l’herbe au bord de la route. Il se remĂ©more son passĂ©, sa vie avec HĂ©lĂšne, une jeune femme qu’il voulait quitter, sa femme Catherine et son fils... Notre avis AprĂšs deux films policiers dont l’un, Classe tous risques, Ă  contre-courant de la Nouvelle Vague, est un modĂšle du genre, Claude Sautet Ă©tonna avec Les choses de la vie. On peut considĂ©rer cette adaptation d’un roman de Paul Guimard, Ă©crite en collaboration avec Jean-Loup Dabadie, comme le premier vĂ©ritable jalon de son Ɠuvre d’auteur. On a longtemps dit que Sautet Ă©tait un cinĂ©aste sociologue de la France des annĂ©es 70, avec ses notables installĂ©s, ses familles nouvellement recomposĂ©es et, ajoutons-le, sa tabagie permanente dĂ©tail qui tue en revoyant le film !. C’est un peu rĂ©ducteur mais il y a une part de vĂ©ritĂ©. Sautet devient dĂšs ce film le peintre de la moyenne bourgeoisie de son Ă©poque. Pierre est le prototype du cadre supĂ©rieur coulant une existence professionnelle sereine, en cette fin des Trente Glorieuses. Son intĂ©gritĂ© d’architecte face Ă  des promoteurs vĂ©reux mais aussi sa relative insouciance, un projet important ne devant pas empiĂ©ter sur ses vacances d’étĂ©, donnent des pistes quant Ă  sa personnalitĂ© publique et au contexte de ce dĂ©but des annĂ©es 70. On est dans l’optimisme de l’ùre pompidolienne, bien avant le chĂŽmage et la prĂ©caritĂ© Ă©voquĂ©s en filigrane dans ses films des annĂ©es Giscard Une histoire simple ou Mitterrand Quelques jours avec moi. Cette sĂ©rĂ©nitĂ© est somme toute relative, la vie privĂ©e de Pierre Ă©tant rĂ©vĂ©latrice de la fragilitĂ© croissante des liens conjugaux et familiaux. Les relations avec son pĂšre Henri Nassiet semblent aussi faussement faciles qu’avec son fils GĂ©rard Lartigau. ÉcartelĂ© entre son Ă©pouse LĂ©a Massari, trĂšs classe et sa maĂźtresse, il ne semble trouver des instants de quiĂ©tude qu’à travers l’amitiĂ© Jean Bouise ou d’anciennes relations d’enfance Gabrielle Doulcet. Le petit monde de Claude Sautet, c’est celui des groupes, des communautĂ©s, assemblĂ©s dans des cafĂ©s oĂč l’on rĂšgle ses comptes affectifs, ou des repas de famille ou entre amis, rĂ©els, ou en trompe-l’Ɠil. ainsi, un plan fixe montre Pierre et HĂ©lĂšne entrer dans une soirĂ©e dont les convives se situent hors-champ, le spectateur Ă©tant clouĂ© sur le palier dĂšs la fermeture de la porte ; de mĂȘme, le repas de mariage fantasmĂ© par Pierre lors de son hospitalisation nous permet-il de voir rĂ©unis des individus ayant cĂŽtoyĂ© sa vie ces derniers jours avant le drame. On y trouve mĂȘme le couple pris en stop Dominique Zardi et Betty Beckers, auquel il s’est identifiĂ©, ainsi que l’infirmier Jacques Richard qui lui a tendu le masque Ă  oxygĂšne. C’est que la mĂ©lancolie et la mort hantent ce film oĂč l’humour et les agrĂ©ments sont absents, cette noirceur Ă©tant d’autant plus manifeste que le rĂ©cit est celui d’un homme qui se souvient des jalons de son existence au moment de son accident de la route... C’est d’ailleurs Ă  cet Ă©gard que le montage des Choses de la vie est fabuleux, le crash de Pierre donnant lieu Ă  une sĂ©rie de flash back judicieusement agencĂ©s, avec pour leitmotiv le vĂ©hicule conduit par un malheureux bĂ©tailleur Bobby Lapointe. Grand film romanesque portĂ© par la sublime partition de Philippe Sarde, Les choses de la vie obtint le Prix Louis Delluc, connut un grand succĂšs public et marqua un tournant dans la carriĂšre de ses deux interprĂštes Ă  qui Sautet fera de nouveau appel. Michel Piccoli, sobre et puissant, devint, avec Montand, l’acteur vedette le plus important de la pĂ©riode. AprĂšs La piscine, Romy Schneider, superbement belle et Ă©mouvante, s’inscrivait dĂ©finitivement dans le paysage du cinĂ©ma français dont elle sera la star jusqu’à sa mort. Source Il Ă©tait une fois le cinĂ©ma Entre la vie et la mort, Michel Piccoli se souvient. Quelle connerie la vie ! Article de Fabien Alloin "Les Choses de la vie" 1969 semble commencer pas la fin. Pierre Michel Piccoli est victime d'un accident de voiture qu’on verra se construire par flash durant tout le film Ă©jectĂ© du vĂ©hicule, dans le coma, il revoit certains moments de son passĂ©. Pendant que les badauds s'attroupent autour de lui, il repense aux deux femmes de sa vie son ex, Catherine LĂ©a Massari, et HĂ©lĂšne Romy Schneider, dont il se sent de moins en moins proche depuis quelques semaines. Pour autant, le fil du rĂ©cit ne restera pas celui du flashback et la derniĂšre demi-heure sera celle d’un retour au prĂ©sent, se concentrant sur ce qui se passe aprĂšs l’accident. Les deux parties sont bien identifiables et quand la premiĂšre a l'allure d'une classique histoire de couple, la seconde est celle du monologue en voix off d'un homme vivant les derniers instants de sa vie. Claude Sautet adapte le roman Ă©ponyme de Paul Guimard sorti deux ans plus tĂŽt et met en images un clichĂ© persistant avant de mourir, on voit toute notre vie dĂ©filer devant nous. AprĂšs les quatre-vingt dix minutes des "Choses de la vie", on peut pertinemment se questionner sur le sujet mĂȘme du film que l’on vient de voir. Quelle histoire Claude Sautet a-t-il voulu nous raconter ? Quel film a-t-il voulu mettre en scĂšne ? Les personnages jouĂ©s par Michel Piccoli, Romy Schneider et LĂ©a Massari laissent apparaĂźtre la forme d’un trio amoureux classique avec sa mĂ©lancolie et ses jalousies mais ce qui intĂ©resse le cinĂ©aste semble ailleurs. Illustration du prĂ©texte de dĂ©part - un homme se meurt et le film devant nous est le souvenir de sa vie -, la brillante scĂšne d’accident qui ouvre le film et le construit par flashback est plus encore qu’un gadget. Tout le rĂ©cit s’articule autour d’elle et si dix jours furent nĂ©cessaires pour rĂ©aliser cette seule sĂ©quence, c’est que le sort des Choses de la vie semblait en dĂ©pendre. Rapidement, on comprend que cette scĂšne que l’on nous fera vivre encore et encore est ce qui rend l’ensemble si bancal. Tout Ă  son honneur, ne voulant pas faire reposer Les Choses de la vie uniquement sur ses acteurs, Claude Sautet cherche le mouvement et les plus vivantes images possibles autour desquelles articuler son rĂ©cit. ProblĂšme, devant rentabiliser l’impressionnant accident qu’il a tournĂ©, le cinĂ©aste en Ă©graine des fragments durant tout son film, allant mĂȘme s’en servir comme plans de coupe de luxe entre les scĂšnes. Ce montage trĂšs lourd et systĂ©matique, le film ne s’en remettra jamais vraiment. Les scĂšnes les plus rĂ©ussies, intimistes - le rĂ©veil de Michel Piccoli et Romy Schneider dans la trĂšs belle ouverture -, ne peuvent jamais vivre plus longtemps que ne dure leur moment Ă  l'Ă©cran. Une fois terminĂ©es, il n’en reste aucune trace. L’épate visuelle de l’accident vers lequel on nous ramĂšne toujours fait qu’elles sont trĂšs rapidement oubliĂ©es, invitĂ©es Ă  prĂ©parer le dernier et laborieux tiers du film la voix off de Michel Piccoli mourant appelant Ă  lui Romy Schneider. Si tout ce qui se dĂ©roule aprĂšs l’accident de voiture semble alors Ă©trangement dĂ©tachĂ© du film, c’est que cette derniĂšre partie paye les consĂ©quences des choix qui ont Ă©tĂ© faits jusqu’ici. Quand Claude Sautet, dĂ©barrassĂ© de ses plans chocs, commence Ă  se rapprocher de ses personnages, il est dĂ©jĂ  trop tard. N’ayant jamais pu nous accrocher Ă  eux, n’ayant pas eu assez de temps, difficile de se sentir concernĂ© par leur fin tragique. On accepte alors cette derniĂšre sans sourciller comme on regarde passer de mains en mains dans la derniĂšre scĂšne une lettre que le personnage de Romy Schneider ne doit absolument pas lire. Aucun suspense Ă  l’écran car fataliste et dĂ©primĂ©, il y a longtemps que tout le monde s’est rĂ©signĂ© face Ă  ces choses de la vie». Comme les cons le disent Ă  la perte d’un ĂȘtre aimĂ© c’était le destin ; c’est la vie. DVD - 1 disqueStudio Minerva PicturesRĂ©gion 2Format PAL Langues ItalienSous-titres Italiens Date de sortie 03 avril 2013Prix 9,50 euros Disponible Ă  la commande sur Auteur Paul GuimardEditions DenoĂ«l - Livre de pocheAnnĂ©e 1967 149 pages - Aucune photo Paru le 01/01/1973Editeur Gallimard - Collection Folio ISBN 2-07-036315-5EAN 9782070363155 Nb. de pages 150 pagesDimensions 10,8cm x 17,8cm x 1cm Editions GallimardAnnĂ©e 1973 Editeur FolioParution 1973 RĂ©sumĂ© L'avocat Pierre Delhomeau est parti de Paris un matin au volant de sa MG pour aller plaider Ă  Rennes. Tout en conduisant, il pense Ă  son amie HĂ©lĂšne mais aussi Ă  vingt autres choses appelĂ©es par une association d'idĂ©es, un air de musique, un parfum d'herbe mouillĂ©e. Sa voiture roule Ă  140 quand elle aborde le grand virage du lieu-dit La Providence. Au mĂȘme moment, un poids lourd survient en sens inverse tandis qu'une bĂ©taillĂšre s'apprĂȘte Ă  traverser la nationale, entame la manƓuvre, hĂ©site, repart et cale au milieu de la chaussĂ©e. C'est l'accident. Dix secondes se sont Ă©coulĂ©es entre l'instant oĂč la MG aborde le virage et celui oĂč elle brĂ»le. Dans la nuit de ses paupiĂšres qu'il ne se sent pas le courage de rouvrir, Pierre Delhomeau prend conscience du moment prĂ©sent. Un prĂ©sent qui n'a plus de futur, voilĂ  le sens des paroles qu'il perçoit. Le temps de le nier, le temps d'y croire - c'est l'arrivĂ©e Ă  l'hĂŽpital dans un ultime dĂ©rapage de souvenirs, d'espoir et de regret de ces mille riens que sont les choses de la vie et qui la font si bonne Ă  vivre. Tel est le thĂšme de ce rĂ©cit empreint de gravitĂ© lĂ©gĂšre et de sobriĂ©tĂ©, d'une poignante actualitĂ©.
Quelquesnotes de biographie. Georges Rouault est nĂ© Ă  Paris en 1871. Fils d’ouvrier, il passe son enfance dans les vieux quartiers populaires de Belleville. TrĂšs jeune, il travaillera comme apprenti chez un maĂźtre verrier. Son grand-pĂšre maternel l’aide Ă 
Alain Pompidou nous fait revivre la passion de ses parents pour l'art. Georges et Claude Pompidou formaient un couple pĂ©tri de culture classique mais... Lire la suite 9,99 € E-book - ePub Poche ExpĂ©diĂ© sous 3 Ă  6 jours 9,00 € Ebook TĂ©lĂ©chargement immĂ©diat 9,99 € Grand format ExpĂ©diĂ© sous 3 Ă  6 jours 19,90 € Vous pouvez lire cet ebook sur les supports de lecture suivants TĂ©lĂ©chargement immĂ©diat DĂšs validation de votre commande Offrir maintenant Ou planifier dans votre panier Alain Pompidou nous fait revivre la passion de ses parents pour l'art. Georges et Claude Pompidou formaient un couple pĂ©tri de culture classique mais en avance sur son temps. Leur insatiable curiositĂ© partagĂ©e, au-delĂ  de la disparition du PrĂ©sident, apparaĂźt donc doublement animĂ©e par l'amour de l'art. Un nouveau regard sur les Pompidou nourri par les tĂ©moignages inĂ©dits de Madeleine Malraux, MaĂŻa Paulin, Pierre Soulages... Au dĂ©but des annĂ©es trente, au Quartier latin, une rencontre inattendue rĂ©unit Georges Pompidou et Claude Cahour. Ils se marient quelques annĂ©es plus tard et forment un couple uni partageant le goĂ»t de la littĂ©rature, de la musique, du cinĂ©ma. TrĂšs vite, ils frĂ©quentent les galeries d'art et les artistes contemporains. DĂšs 1948, les Pompidou - comme on les appelle avec affection - font l'acquisition de leur premiĂšre toile abstraite signĂ©e d'un peintre alors peu connu Youla Chapoval. Par la suite, au fil des rencontres, leur collection se construit en relation Ă©troite avec les crĂ©ateurs. En 1958, Claude offre Ă  son mari un Nicolas de StaĂ«l. En 1962, l'accrochage d'un Soulages dans le bureau du Premier ministre surprend. Quand, en 1969, Ă  l'ÉlysĂ©e, le PrĂ©sident et son Ă©pouse font appel Ă  Pierre Paulin et Ă  Yaacov Agam pour la rĂ©novation et la dĂ©coration de leurs appartements privĂ©s, force est de constater que l'art reprĂ©sente pour eux une raison de vivre. Que la crĂ©ation du Centre Pompidou viendra couronner. C'est cette fusion artistique, ce sens innĂ© des ouvres capables d'entrer dans l'Histoire, leurs rapports avec les artistes qu'Alain Pompidou et CĂ©sar Armand dĂ©voilent dans cet ouvrage biographique et intime, riche de souvenirs, de tĂ©moignages et d'illustrations. À travers le rĂ©cit de leur fils, les souvenirs de l'Ă©pouse de Jean Coural, directeur du Mobilier national, de MaĂŻa Paulin, Pierre Soulages, Jack Lang et bien d'autres, ce livre rĂ©vĂšle le parcours initiatique autant qu'affectif d'un couple pas comme les autres, mu par une insatiable curiositĂ©. Date de parution 09/11/2017 Editeur ISBN 978-2-259-26417-4 EAN 9782259264174 Format ePub Nb. de pages 260 pages CaractĂ©ristiques du format ePub Pages 260 Taille 22 882 Ko Protection num. Digital Watermarking Biographie d'Alain Pompidou CĂ©sar Armand est un jeune journaliste Ă©conomique et politique, Ă©galement amateur d'art. Alain Pompidou, fils de Claude et Georges Pompidou, passionnĂ© et collectionneur d'art, est professeur Ă©mĂ©rite de biologie mĂ©dicale - il rĂ©alise ses propres brevets dans le champ du diagnostic. AprĂšs la publication de la correspondance de son pĂšre et d'un livre sur sa mĂšre, il consacre son temps aux archives familiales.
14juillet 1998, la plus belle garden party. Un vent de folie souffle sur les jardins, emportant la foule, la France « Black Blanc Beur ». Et un et deux et trois-zéro, les bleus sont là. 4000 jeunes en t-shirts et jeans troués, sur les 5000 invités. T out le monde est là pour les champions du monde qui brandissent la coupe sous les yeux
Par Laurent P., Elodie D. Photos par Elodie D. PubliĂ© le 15 novembre 2019 Ă  18h36 Le Centre Pompidou accueille Christian Boltanski du 13 novembre 2019 au 16 mars 2020 pour une grande exposition, "Faire son temps". Une exposition Ă  la symbolique puissante, qui questionne la vie, la mort et ce long chemin qu'est la vie ! L'art n'a aucune frontiĂšre... Le Centre Pompidou consacre une exposition au plasticien français Christian Boltanski du 13 novembre 2019 au 16 mars 2020. L'artiste ne veut pas parler de rĂ©trospective mais d'une Ɠuvre Ă  part, un cheminement dans ses Ɠuvres avec une trame particuliĂšre la vie, ou plutĂŽt la mort. À lire aussiLes expositions d'aoĂ»t 2022 Ă  Paris et en Ile-de-France Ă  ne manquer sous aucun prĂ©texteQue faire ce week-end Ă  Paris avec les enfants, ces 20 et 21 aoĂ»t 2022Les musĂ©es et monuments gratuits ce dimanche 4 septembre 2022 Ă  Paris"Faire son temps" rĂ©unit 40 Ɠuvres "sensible et corrosive", l'exposition questionne ce qui reste de nous aprĂšs la mort. Une photo, une vidĂ©o, des vĂȘtements, et nos restes, enfermĂ©s dans un cercueil ou une boĂźte... Et Ă  cĂŽtĂ© de cela, l'environnement, immuable, avec ces champs de blĂ© et ses vagues qui viennent et reviennent Ă  l'infini. Si Christian Boltanski semble macabre, il parle toujours avec humour et considĂšre que l'art est une façon d'explorer la question de la mĂ©moire nĂ©cessaire. Impossible de ne pas penser Ă  la Shoah dans cette exposition, une obsession pour Boltanski. L'artiste est nĂ© en 1944 de parents juifs, et pose souvent la question de la survie. On est vite mal Ă  l'aise et il est difficile de trouver une Ɠuvre qui fasse sourire dans ce dĂ©dale. On se perd vite entre le Terril Grand-Hornu 2015, amas de vĂȘtements noirs, les FantĂŽmes de Varsovie 2001 et les Tombeaux 1996, et on pense qu'ils nous hanteront pendant des annĂ©es... Preuve que Christian Boltanski a rĂ©ussi son pari de la mĂ©moire !
DĂ©couvrezPour l'amour de l'art : une autre histoire des Pompidou, le livre de Alain Pompidou et CĂ©sar Armand chez Plon sur Librest.com, Groupement de librairies indĂ©pendantes du Grand Paris . Librest, Groupement de librairies indĂ©pendantes du Grand Paris. En continuant d’utiliser notre site, vous acceptez que nous utilisions les cookies conformĂ©ment Ă  notre Politique sur les RĂ©sumĂ©s La monarchie byzantine, monarchie absolue, de caractĂšre thĂ©ocratique, passait pour Ă©maner de Dieu mĂȘme, d’oĂč l’importance prise Ă  Byzance par les cĂ©rĂ©monies destinĂ©es Ă  souligner la sacralitĂ© de l’empereur. Il existait nĂ©anmoins diverses parades rituelles visant Ă  protĂ©ger le basileus contre la tentation de l’hybris, en lui rappelant la prĂ©caritĂ© du pouvoir et sa nĂ©cessaire soumission au Tout-Puissant rite du dĂ©couronnement, memento mori, conduites de dĂ©rision, mimesis Christou. Les miroirs des princes formulent d’identiques mises en garde, en insistant sur l’humaine fragilitĂ© de l’empereur, sur sa solidaritĂ© avec les autres hommes, et en valorisant par-dessus tout la vertu chrĂ©tienne d’humilitĂ©. On peut y observer l’influence profonde exercĂ©e sur la pensĂ©e politique des Byzantins par le texte de la Bible, considĂ©rĂ©e au Moyen Âge comme un rĂ©pertoire de modĂšles et d’antimodĂšles, permettant d’évaluer l’histoire du prĂ©sent, soumis Ă  une interprĂ©tation typologique, qui fait bien souvent de la dĂ©mesure la ligne de partage entre bons et mĂ©chants. Byzantine monarchy may be defined as an autocracy of theocratic origin the basileus was considered as God’s representative – hence the part ceremonial played in underlining the emperor’s sacred character. Nevertheless, several rituals existed in Byzantium to protect the basileus from hubris – rituals that reminded him of the transitory character of power and of his necessary subservience to the Almighty uncrowning rite, memento mori, derision practices, mimesis Christou. The mirrors of princes express similar admonishing they insist upon the emperor’s human frailty and solidarity with other men, and put emphasis on the Christian virtue of humility. These texts show how much Byzantine political theory was influenced by Holy Scripture the Bible was read as a repertory of models and counter-examples, with which contemporary events were to be compared, according to a typological interpretation of history, prone to see hubris as the main dividing criterion between good and bad de page Texte intĂ©gral 1 Shakespeare, Richard II, III, 2, v. 156-166 Teyssandier 1997. Car dans le cercle creux de la couronneQui ceint les tempes mortelles d’un roi,La Mort tient sa cour ; c’est lĂ  qu’elle trĂŽne en bouffon,Raille sa majestĂ©, ricane de sa pompe,Lui alloue, un instant, une petite scĂšnePour jouer au monarque, se faire redouterEt tuer du regard ; l’emplit de vaine suffisance,Comme si cette chair, rempart de notre vie,FĂ»t d’imprenable airain ; puis, ayant satisfait ses caprices,Elle vient pour finir, d’une petite Ă©pingle,Transpercer le rempart de son chĂąteau ; et adieu, roi1 ! 1Dans son Ă©tude sur le suicide, le sociologue Émile Durkheim, constatant la singuliĂšre immunitĂ© » dont les pays pauvres jouissent en ce domaine, explique cette particularitĂ© par le frein que la pauvretĂ© impose aux dĂ©sirs, tandis que 2 Durkheim 1990, 282 texte commentĂ© par Demont 2006, 354-355. la richesse, par les pouvoirs qu’elle nous confĂšre, nous donne l’illusion que nous ne relevons que de nous-mĂȘmes. En diminuant la rĂ©sistance que nous opposent les choses, elle nous induit Ă  croire qu’elles peuvent ĂȘtre indĂ©finiment vaincues. Or, moins on se sent limitĂ©, plus toute limitation paraĂźt insupportable2. On pourrait certes appliquer la mĂȘme analyse au pouvoir, car celui-ci inspire aisĂ©ment Ă  celui qui l’exerce un sentiment de toute-puissance propice Ă  la dĂ©mesure. Les Anciens Ă©taient bien conscients de ce danger, inhĂ©rent Ă  l’exercice de la domination sur autrui. Dans son fameux dĂ©bat sur les constitutions, HĂ©rodote fait dire Ă  OtanĂšs, adversaire du rĂ©gime monarchique Comment la monarchie serait-elle chose bien ordonnĂ©e, quand il lui est permis, sans avoir de comptes Ă  rendre, de faire ce qu’elle veut ? Le meilleur de tous les hommes, investi de cette autoritĂ©, serait en effet mis hors de ses pensers accoutumĂ©s. Les biens dont il jouit font naĂźtre en lui l’insolence ᜕ÎČρÎč, et dĂšs l’origine l’envie est innĂ©e chez l’homme. Ayant ces deux vices, le monarque a en lui toute mĂ©chancetĂ© gorgĂ© d’insolence ᜕ÎČρÎč, il commet beaucoup d’actes follement orgueilleux ; et gorgĂ© d’envie, pareillement 3, 80. 3 Platon, Lois, 4, 713 c-d. Julien cite et commente longuement ce passage de Platon dans l’Ép ... 4 Affirmation similaire dans l’opuscule À un chef mal Ă©duquĂ©, 6 Le vice, dont la course e ... 5 Dion Chrysostome, Or. 57 Nestor, 6-8 Agamemnon et Achille ont pĂ©chĂ© par insolence ÎŽÎč ̓ ... Dans les Lois, Platon reprend la mĂȘme idĂ©e au sein d’un dĂ©veloppement mythique consacrĂ© au rĂšgne de Kronos si celui-ci dĂ©cida de placer Ă  la tĂȘte des citĂ©s, Ă  titre de rois et de chefs », non pas des hommes, mais des dĂ©mons, ĂȘtres d’une espĂšce plus divine et meilleure », c’est parce qu’il savait qu’aucune nature d’homme n’est capable d’administrer souverainement toutes les affaires humaines sans s’emplir de dĂ©mesure et d’injustice ᜕ÎČρΔ Îșα᜶ ጀΎÎčÎș᜷α »3. On pourrait, sur ce sujet, multiplier les citations ; je me limiterai Ă  deux autres exemples, tirĂ©s d’auteurs de l’époque impĂ©riale qui furent personnellement tĂ©moins des dĂ©rives du pouvoir monarchique, puisqu’ils vĂ©curent les annĂ©es Domitien » Plutarque, qui, dans sa Vie de Sylla, voit dans l’exercice du pouvoir absolu une cause d’altĂ©ration des caractĂšres, qui deviennent inconstants, vaniteux et inhumains » 30, 64, et Dion Chrysostome, chez qui l’hybris nĂ©e d’un trop grand pouvoir s’incarne en la figure d’Agamemnon, prĂ©sentĂ© Ă  plusieurs reprises comme un homme Ă  qui la puissance a fait perdre sagesse et mesure5. Byzance, patrie de l’absolutisme 2On pourrait craindre que ces sages mises en garde, si souvent rĂ©pĂ©tĂ©es par les auteurs anciens, n’aient Ă©tĂ© oubliĂ©es Ă  Byzance, oĂč rĂ©gnĂšrent pendant plus de douze siĂšcles des monarques sans partage. C’est de toute Ă©vidence ce que pensait Voltaire, qui fit reprĂ©senter en 1778 une tragĂ©die byzantine intitulĂ©e IrĂšne, dont l’intrigue, situĂ©e au XIe siĂšcle, raconte l’insurrection dirigĂ©e par Alexis ComnĂšne contre l’empereur NicĂ©phore III BotaniatĂšs 1078-1081, dĂ©peint sous les traits d’un tyran tĂ©nĂ©breux », d’un despote d’esclaves entourĂ© », pur produit d’un systĂšme politique pervers, comme le laissent entendre les protestations de l’un des conjurĂ©s 6 Acte II, scĂšne 3, Ă©d. de Paris 1877, 350. Texte prĂ©sentĂ© par Delouis 2003, 104-105. Tant ce palais funeste a produit l’habitudeEt de la barbarie et de la servitude !Tant sur leur trĂŽne affreux nos cĂ©sars chancelantsPensent rĂ©gner sans lois, et parler en sultans6 ! 7 Cf. Barker 1957, 28-29. Dans la Novelle 105, 2, en affirmant que Dieu a subordonnĂ© ... 3Si la critique est sĂ©vĂšre, elle n’est pas dĂ©pourvue de fondement la monarchie byzantine Ă©tait en effet une monarchie absolue, ignorant tout Ă©quilibre des pouvoirs politiques. L’empereur cumulait pouvoir exĂ©cutif, lĂ©gislatif et judiciaire, tous concentrĂ©s en sa seule personne c’est lui qui faisait la loi, Ă©tait l’instance suprĂȘme en matiĂšre de justice, et contrĂŽlait l’administration ; il n’avait de comptes Ă  rendre Ă  aucune autre instance politique ; il n’y avait donc, en thĂ©orie, rien qu’il ne fĂ»t autorisĂ© Ă  faire7. 8 Voir Guilland 1959. 9 NicĂ©tas ChoniatĂšs, Historia rĂšgne d’Isaac Ier Ange, van Dieten 1975, 366 ጐΜ ... 10 EusĂšbe de CĂ©sarĂ©e, Louanges de Constantin, 1, 3 Celui qui est pour nous le grand roi ... 4Cette suprĂ©matie politique absolue accordĂ©e Ă  l’empereur tenait au caractĂšre thĂ©ocratique de la monarchie byzantine le basileus exerçait en effet un pouvoir de droit divin8 ; censĂ© tenir la royautĂ© de Dieu mĂȘme, il Ă©tait considĂ©rĂ© comme l’élu du Tout-Puissant, son homme de confiance il rĂ©gnait et gouvernait sous la protection du TrĂšs Haut, ses dĂ©cisions passaient pour exprimer la volontĂ© divine, et l’on disait ses lettres signĂ©es de la main de Dieu »9. EusĂšbe de CĂ©sarĂ©e, premier thĂ©oricien d’une doctrine thĂ©ocratique qui a dominĂ© toute l’histoire de Byzance, prĂ©sente le pouvoir de l’empereur terrestre comme une image de la royautĂ© du Logos le Christ, lui-mĂȘme vicaire du grand roi » Dieu, qui rĂšgne, mais ne gouverne pas ; les vertus de l’empereur sont, par consĂ©quent, une imitation des vertus du Logos, et l’empire terrestre est Ă  considĂ©rer comme une image du royaume des cieux10. 11 Cf. Guilland 1959, 218. L’iconographie du pouvoir reflĂšte elle aussi cette idĂ©o ... 5Dans ses acclamations, le peuple rappelle Ă  chaque instant l’origine divine du pouvoir impĂ©rial l’empereur est qualifiĂ© de basileus promu par Dieu » ÎžÎ”ÎżÏ€ÏáœčÎČληο, proche de Dieu » áŒ€ÎłÏ‡áœ·ÎžÎ”Îż, de choix de la TrinitĂ© », d’ homme divin et supĂ©rieur aux hommes » ΞΔῖο Îșα᜶ ᜑπáœČρ ጀΜΞρ᜜πΜ áŒ„ÎœÎžÏÏ€Îż11. Entre autres formules rituelles consignĂ©es, au Xe siĂšcle, dans le Livre des CĂ©rĂ©monies, on peut lire 12 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. I, 9 Vogt 1935, 55. Vous avez Ă©tĂ© couronnĂ©s par l’Esprit Saint, ĂŽ souverains des Romains, et en lui vous conduisez votre peuple12 ; 13 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. I, 74 Vogt 1939, 102. En vos mains aujourd’hui ayant remis le pouvoir, Dieu vous a confirmĂ© autokrator souverain, et le grand archistratĂšge Ă©tant descendu du ciel a ouvert devant votre face les portes de l’Empire13 ; 14 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. 1, 78 Vogt 1939, 130-131. Votre puissance, amis du Christ, bienfaiteurs promus par Dieu, brille d’un Ă©clat qui vient vraiment de Dieu, et non des hommes14. 15 Sur l’importance de la notion d’ ordre » dans l’idĂ©ologie byzantine, voir Ahrweiler 1975 ... 16 Denys l’ArĂ©opagyte, HiĂ©rarchie cĂ©leste, 3, 1-2 Roques, Heil & de Candillac 1958. 6La sacralitĂ© de l’institution impĂ©riale et de son titulaire faisait l’objet d’une mise en scĂšne de tous les instants, dont le cĂ©rĂ©monial nous a Ă©tĂ© mĂ©ticuleusement transmis par le Livre des CĂ©rĂ©monies. L’empereur Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, auteur de cette compilation, exprime dans sa prĂ©face le souhait que le pouvoir impĂ©rial, en s’exerçant avec rĂ©gularitĂ© et ordre áż„Ï…ÎžÎŒÍ‚Í… Îșα᜶ ᜱΟΔÎč, reproduise le mouvement harmonieux áŒÏÎŒÎżÎœáœ·Î±Îœ Îșα᜶ Îș᜷ΜηÎčΜ que le CrĂ©ateur imprime Ă  tout l’univers15. L’ordre impĂ©rial est donc censĂ© reflĂ©ter l’ordre cĂ©leste – thĂ©orie qui, dĂšs le VIe siĂšcle, avait Ă©tĂ© longuement dĂ©veloppĂ©e dans le traitĂ© sur la HiĂ©rarchie cĂ©leste du Pseudo-Denys l’ArĂ©opagite posant l’existence d’une continuitĂ© entre hiĂ©rarchie terrestre et hiĂ©rarchie cĂ©leste, l’auteur y qualifiait la hiĂ©rarchie d’ ordre sacrĂ© » ᜱΟÎč ጱΔρᜱ, s’élevant Ă  la mesure de ses forces vers l’imitation de Dieu » ᜞ ÎžÎ”ÎżÎŒáœ·ÎŒÎ·ÎżÎœ, de maniĂšre Ă  offrir l’image de la splendeur thĂ©archique »16. 17 Treitinger 1938, 49-123. TĂ©moin de cette formalisation des rituels, dont la mis ... 18 Dagron 2002, 30. Aux Xe-XIe siĂšcles encore, le mutisme de l’empereur est presque absolu l ... 7ConsĂ©quence de cette thĂ©orie les apparitions publiques du basileus sont conçues comme de vĂ©ritables Ă©piphanies, destinĂ©es Ă  manifester l’éclat de la puissance divine dont le souverain tient son pouvoir. Tout est fait pour contribuer Ă  ce qu’Otto Treitinger qualifie d’Absonderung, de sĂ©paration, de mise Ă  part du souverain17 la splendeur du costume impĂ©rial, seul Ă  utiliser la couleur rouge, le caractĂšre hiĂ©ratique des cĂ©rĂ©monies oĂč les moindres gestes sont codifiĂ©s, la pratique de la proskynĂšse aux pieds de l’empereur qui, lors des rĂ©ceptions au palais, siĂšge sur un trĂŽne surĂ©levĂ© sur une estrade, le silence gardĂ© par le souverain, qui s’exprime le plus souvent par un signe de tĂȘte Ă  peine perceptible, ou par l’intermĂ©diaire d’un mandator, comme si son corps Ă©tait prĂ©sent, mais son esprit dans une autre sphĂšre autant d’élĂ©ments concourant Ă  isoler le basileus du monde humain par des limites symboliques qui le placent en dehors de tout contact18. 19 Cf. Guilland 1959. 8On pourrait donc avoir l’impression qu’à Byzance, l’hybris est inscrite jusque dans la mise en scĂšne du pouvoir impĂ©rial. Mais la thĂ©orie de la thĂ©ocratie porte en elle-mĂȘme son propre garde-fou car l’élection divine n’est jamais dĂ©finitivement acquise, et l’empereur choisi par Dieu est un empereur placĂ©, pour ainsi dire, sous haute surveillance, le pouvoir ne lui Ă©tant garanti que s’il observe la volontĂ© divine ; dans le cas contraire, Dieu lui retire son soutien et ses pouvoirs deviennent caducs19. Ainsi la religion joue-t-elle Ă  Byzance le rĂŽle de contre-pouvoir elle exerce une fonction modĂ©ratrice, que suggĂ©rait trĂšs clairement la prĂ©sence dans la salle de rĂ©ception du palais impĂ©rial, le Chrysotriclinos, d’une icĂŽne du Christ au-dessus du trĂŽne. Au sein mĂȘme du cĂ©rĂ©monial Ă©taient d’ailleurs inscrites diverses parades rituelles contre la dĂ©mesure, qui avaient pour fonction de rappeler au basileus le sens et les limites de sa mission sur terre. Parades rituelles contre la dĂ©mesure Le rite du dĂ©couronnement 20 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. 1, 47 Vogt 1939, 2. 21 Cf. Guilland 1966-1967, 258. 22 Voir par exemple CĂ©r. 1, 1 Vogt 1935, 10-11 et 26 procession Ă  la Grande Église ; 1 ... 23 Dagron 1996, 104, 116. 24 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. 1, 69 Vogt 1939, 84-85. 9Je passerai rapidement sur un rite dont l’étude est au cƓur du beau livre, Empereur et prĂȘtre, que Gilbert Dagron a consacrĂ© aux relations complexes des pouvoirs politique et religieux Ă  Byzance je veux parler du rite du dĂ©couronnement. Empereur Ă©lu de Dieu », c’est du patriarche que le basileus reçoit sa couronne lors des cĂ©rĂ©monies de l’avĂšnement, comme nous le rappelle le Livre des CĂ©rĂ©monies, oĂč l’on voit le patriarche faire la priĂšre sur la couronne du souverain, avant de la lui placer personnellement sur la tĂȘte20 ; le patriarche Ă©tait d’ailleurs le seul personnage de l’Empire Ă  ne pas rendre Ă  l’empereur les honneurs de la proskynĂšse il saluait simplement le basileus, qui lui rendait son salut et lui donnait l’accolade21. DĂ©signĂ© dĂšs son accession au pouvoir comme fils de l’Église, l’empereur, pendant toute la durĂ©e de son rĂšgne, sera tenu, lors des multiples cĂ©rĂ©monies religieuses qui vont scander son existence officielle, de retirer sa couronne, Ă  chaque entrĂ©e dans un lieu saint, et notamment Ă  Sainte-Sophie, la Grande Église22 – signe que dans la maison de Dieu, le pouvoir ne lui appartient plus ; cette couronne qu’il retire pour attester sa soumission au pouvoir spirituel, le basileus la reçoit Ă  nouveau, des mains du patriarche, lorsqu’il quitte l’église, reconnaissant, par ce geste rituel, que la souverainetĂ© ne lui est que prĂȘtĂ©e la basileia pleine et entiĂšre appartient Ă  Dieu seul, qui la dĂ©lĂšgue provisoirement Ă  un homme choisi par lui »23. L’empereur byzantin n’emporte d’ailleurs pas dans la tombe l’insigne de la royautĂ© le protocole des funĂ©railles impĂ©riales veut que le maĂźtre des cĂ©rĂ©monies, au moment oĂč le corps du souverain dĂ©funt va ĂȘtre mis en biĂšre, remplace sa couronne par un simple bandeau de pourpre – geste accompagnĂ© de cette triple proclamation Entre, empereur, le Roi des Rois et le Seigneur des Seigneurs t’appelle. DĂ©pose la couronne de ta tĂȘte »24. L’akakia 25 Sur l’akakia, voir Treitinger 1938, 117 ; Kazhdan 1991. 26 Cf. CĂ©r. 1, 1 Vogt 1935, 20 tenue de l’empereur le jour de PĂąques ; 1, 9 Vogt 1935 ... 27 Cf. Underwood & Hawkins 1961, 195-196 et fig. 1 et 8. L’akakia est Ă©galement figurĂ©e su ... 28 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. 2, 40 Reiske 1829, 638. Voir Dagron 1996, ... 29 Pseudo-Kodinos, TraitĂ© des offices, ch. IV, Verpeaux 1966, 201-202 CĂ©rĂ©monial des f ... 30 SymĂ©on de Thessalonique, De sancto templo, ch. 148, PG, 155, col. 356 
 ᜎΜ ጀÎșαÎș᜷αΜ, ... 10Parmi les emblĂšmes du pouvoir impĂ©rial, il en est un tout spĂ©cialement destinĂ© Ă  rappeler au basileus le caractĂšre prĂ©caire de la souverainetĂ© Ă  cĂŽtĂ© du globe, symbole de domination universelle l’empereur byzantin est rĂ©putĂ© maĂźtre du monde », kosmokrator, Ă  cĂŽtĂ© du sceptre, insigne d’autoritĂ©, Ă  cĂŽtĂ© de la croix, marque de la protection divine dont bĂ©nĂ©ficie le souverain, apparaĂźt en effet un curieux rouleau de pourpre, dit akakia ou anexikakia, que l’empereur tient Ă  la main en certaines circonstances solennelles25 il est question de cet objet en plusieurs passages du Livre des CĂ©rĂ©monies26, et divers portraits impĂ©riaux nous en offrent l’illustration – notamment le cĂ©lĂšbre portrait en mosaĂŻque de l’éphĂ©mĂšre empereur Alexandre 912-913, qui orne l’une des galeries de l’église Sainte-Sophie27. Un passage du Livre des CĂ©rĂ©monies, oĂč il est question du costume d’apparat portĂ© par l’empereur et ses dignitaires Ă  l’occasion des fĂȘtes de PĂąques, parle de l’akakia comme d’un tome » ጀΜΔΟÎčÎșαÎș᜷α áœčÎŒÎżÏ… oĂč est inscrite la lĂ©gislation du salut » ᜎΜ ηρÎč᜜Ύη ÎœÎżÎŒÎżÎžÎ”áœ·Î±Îœ – formule qui, selon Gilbert Dagron, ferait rĂ©fĂ©rence aux prĂ©ceptes Ă©vangĂ©liques inscrits sur un rouleau »28. Mais le tĂ©moignage de deux auteurs tardifs des XIVe et XVe siĂšcles invite Ă  prendre plutĂŽt la formule du PorphyrogĂ©nĂšte en un sens figurĂ© d’aprĂšs le TraitĂ© des offices du Pseudo-Kodinos, ouvrage composĂ© par un haut dignitaire qui appartenait Ă  l’entourage de Jean VI CantacuzĂšne 1347-1354, l’akakia est un sachet de pourpre en forme de rouleau de parchemin contenant de la terre, marque que l’empereur est humble en tant que mortel, et que la majestĂ© de la royautĂ© ne doit pas le rendre vaniteux et orgueilleux » ; ce sachet pourpre est nouĂ© par un mouchoir, symbole de l’instabilitĂ© de la royautĂ© qui passe de l’un Ă  l’autre »29. À cette description trĂšs prĂ©cise fait Ă©cho celle de SymĂ©on, mĂ©tropolite de Thessalonique † 1429, qui dĂ©finit plus briĂšvement l’akakia comme de la poussiĂšre dans un mouchoir, pour signifier le caractĂšre pĂ©rissable du pouvoir et l’humilitĂ© que doit en Ă©prouver [l’empereur] »30. Memento mori 31 LĂ©ontios de NĂ©apolis, Vie de Jean de Chypre, chap. 17, FestugiĂšre & Ryden 1974, 365 te ... 11La prĂ©sence de l’akakia parmi les attributs du pouvoir impĂ©rial montre qu’à Byzance, la vanitĂ© des gloires de ce monde Ă©tait inscrite au cƓur mĂȘme du cĂ©rĂ©monial. Le caractĂšre Ă©phĂ©mĂšre de toute puissance humaine Ă©tait d’ailleurs rappelĂ© aux empereurs byzantins dĂšs leur avĂšnement, puisque la coutume voulait que les constructeurs de la tombe impĂ©riale se prĂ©sentent au nouveau souverain le jour mĂȘme de son couronnement, pour lui demander en quel marbre il souhaitait voir exĂ©cuter son tombeau, lui adressant ainsi une mise en garde que LĂ©ontios de NĂ©apolis, dans sa Vie de Jean de Chypre, dit l’AumĂŽnier, patriarche d’Alexandrie 610-619, interprĂšte en ces termes En tant qu’homme mortel et qui passe, prends soin de ton Ăąme et gouverne avec piĂ©tĂ© ton empire »31. 32 Cf. Vasiliev 1932, 159. 33 Sur les cĂ©rĂ©monies du triomphe, voir Cagnat 1919 ; Ehlers 1939 ; Versnel 1970 ; Scheid ... 34 Cf. Pline, NH, 33, 111 ; Tite-Live, 10, 7, 10. 35 Pline, NH, 28, 39 l’effigie du dieu Fascinus est suspendue sous le char des triomphat ... 36 ÉpictĂšte, Entretiens, 3, 24, 85 Fais obstacle Ă  ton imagination Ă  la maniĂšre de c ... 12Un auteur arabe nommĂ© Haroun ibn Yayah, qui fut prisonnier Ă  Constantinople au tournant des IXe et Xe siĂšcles, nous a conservĂ© le souvenir d’une autre cĂ©rĂ©monie Ă  l’occasion de laquelle l’empereur byzantin Ă©tait soumis Ă  un insistant Memento mori il s’agit de la procession des Cendres, Ă  l’occasion de laquelle ibn Yayah vit le basileus se rendre, Ă  pied, jusqu’à la Grande Église, tandis que le ministre du culte lui rappelait tous les deux pas ÎœáœłÎŒÎœÎ·ÎžÎ” οῩ͂ ÎžÎ±Îœáœ±ÎżÏ… ; alors, raconte ibn Yayah, le souverain s’arrĂȘtait, regardait la poussiĂšre contenue dans son akakia, l’embrassait et pleurait32. La coutume ainsi Ă©voquĂ©e rappelle curieusement un usage attestĂ© Ă  Rome lors des cĂ©rĂ©monies du triomphe33, oĂč le triomphateur, bien qu’il fĂ»t pour ainsi dire transformĂ© en statue vivante de Jupiter, au point de porter la tunique et les ornements du dieu et d’arborer un visage enduit de minium comme celui des statues de culte34, n’en Ă©tait pas moins flanquĂ© d’un esclave qui, tout en soutenant la couronne d’or de Jupiter, trop lourde pour une tĂȘte d’homme, rĂ©pĂ©tait au triomphateur, chaque fois que le peuple poussait des acclamations en son honneur, Respice post te, hominem te esse memento » – coutume mentionnĂ©e par divers auteurs latins Pline, Tertullien, saint JĂ©rĂŽme, Isidore de SĂ©ville35 et grecs ÉpictĂšte, Dion Cassius36. Il est possible, comme le pensent certains commentateurs modernes, que cet usage ait eu une fonction apotropaĂŻque et ait Ă©tĂ© destinĂ© Ă  dĂ©tourner du triomphateur la jalousie des dieux, au mĂȘme titre que la bulla et les diverses amulettes qu’il portait sur lui, mais les mises en garde de l’esclave n’en possĂ©daient pas moins une portĂ©e didactique, puisqu’elles visaient Ă  prĂ©munir le triomphateur contre la superbia, au moment mĂȘme oĂč il jouait le rĂŽle du dieu. Les tensions caractĂ©ristiques du triomphe romain, dont le hĂ©ros se trouvait simultanĂ©ment assimilĂ© Ă  Jupiter et soumis au rappel de son humaine faiblesse, se retrouvent Ă  Byzance, transposĂ©es dans le cadre chrĂ©tien de la cĂ©rĂ©monie des Cendres, en la personne du basileus, Ă  la fois simple mortel et image de la gloire de Dieu. Conduites de dĂ©rision 37 Cf. SuĂ©tone, CĂ©sar, 49 ; Denys d’Halicarnasse, AR, 7, 72, 11. 38 SĂ©minaire du 3 octobre 1996 CollĂšge de France. 39 Choricios de Gaza, Λáœčγο ᜑπáœČρ Μ ጐΜ ΔÎčÎżÎœáœ»ÎżÏ… ᜞Μ ÎČáœ·ÎżÎœ ΔጰÎșÎżÎœÎčζáœčΜΜ, 119-12 ... 13Toujours Ă  l’occasion des cĂ©rĂ©monies du triomphe, le gĂ©nĂ©ral romain victorieux processionnait au milieu des acclamations
 et des quolibets, destinĂ©s, comme le Respice post te », Ă  dĂ©tourner de lui puissances mauvaises et tentation de l’hybris37. Il semble que Byzance ait connu des pratiques de dĂ©rision analogues, dans le cadre de l’hippodrome, lieu de haute souverainetĂ© », selon la formule de Gilbert Dagron38. De fait, un lien organique unissait Ă  Byzance courses de l’hippodrome et idĂ©ologie impĂ©riale les victoires remportĂ©es par les cochers Ă©taient dĂ©diĂ©es au souverain, censĂ© participer symboliquement au triomphe de l’équipe gagnante, et le rituel de la compĂ©tition avait pour but ultime d’exalter la puissance de l’empereur, en mettant en scĂšne l’un des articles fondamentaux de l’idĂ©ologie monarchique, le don de victoire perpĂ©tuelle du souverain. Les courses de char constituaient donc une piĂšce maĂźtresse du culte impĂ©rial. Or il semble que ces festivitĂ©s aient aussi servi de cadre aux plaisanteries bouffonnes, dont Choricios de Gaza, dans son Apologie des mimes, souligne l’utilitĂ© politique parce qu’il est permis aux mimes de railler sans crainte », ils rappellent opportunĂ©ment les dirigeants Ă  la modĂ©ration áŒ„ÏÏ‡ÎżÎœÎ±â€Š Ï†ÏÎżÎœáœ·Î¶ÎżÎœÎ”, alors que les amis des princes reculent devant la majestĂ© du pouvoir » ᜞Μ áœ„ÎłÎșÎżÎœ áœ‘Ï€ÎżáœłÎ»Î»ÎżÎœÎ±Îč ῆ áŒÎŸÎżÏ…áœ·Î±39. 14Le RĂ©cit sur la construction du temple de la Grande Église de Dieu nommĂ©e Sainte-Sophie, Ɠuvre anonyme du Xe siĂšcle, fait par ailleurs allusion Ă  un rite de dĂ©rision, apparemment encore en usage Ă  cette Ă©poque Ă  l’hippodrome de Constantinople. Ce rite aurait eu pour origine les dĂ©mĂȘlĂ©s de l’empereur Justinien, fondateur de Sainte-Sophie, avec un dĂ©nommĂ© XĂ©nophon, que Justinien voulait exproprier pour pouvoir construire la Grande Église le personnage finit par cĂ©der Ă  la demande de l’empereur, mais exigea en contrepartie que pendant la sĂ©ance de l’hippodrome oĂč cela [la vente ?] se produirait, les quatre cochers lui rendissent les honneurs en se prosternant devant lui » ; l’empereur accepta sa requĂȘte et en maniĂšre de plaisanterie », dĂ©cida de pĂ©renniser la cĂ©rĂ©monie 40 RĂ©cit sur la construction du temple de la Grande Église, 5 Preger 1901, 80 ; ... Les jours de dĂ©part , notre homme devait s’asseoir au beau milieu des barriĂšres de dĂ©part, et les cochers devaient se prosterner pour rire devant son postĂ©rieur avant de monter sur leurs chars. Cela dure jusqu’à nos jours c’est celui qu’on appelle l’archonte des puissances infernales ; il est vĂȘtu d’une chlamyde blanche tissĂ©e en lin trĂšs fin40. 41 Cf. Dagron 1984, 222. Cette anecdote, caractĂ©ristique du folklore urbain de Constantinople, nous fait assister Ă  un Ă©pisode de proskynĂšse dĂ©voyĂ©e, oĂč le postĂ©rieur d’un homme du peuple se substitue irrĂ©vĂ©rencieusement Ă  la face rayonnante de l’empereur, Sol Oriens, en un renversement typiquement carnavalesque41. La cĂ©rĂ©monie du lavement des pieds 15Le dernier rituel dont je parlerai ici est d’une tonalitĂ© bien diffĂ©rente, puisqu’il s’agit d’une pratique qui ressortit Ă  la mimesis Christou. Le TraitĂ© des offices du Pseudo-Kodinos nous apprend qu’à une date tardive il n’est pas question de cet usage chez Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, une cĂ©rĂ©monie du lavement des pieds » ΜÎčπ᜔ρ se tenait au palais impĂ©rial, pendant la Semaine Sainte, avant la messe du Jeudi Saint le protagoniste en Ă©tait l’empereur lui-mĂȘme, qui rĂ©itĂ©rait, en cette occasion, le geste accompli par le Christ sur la personne de ses disciples le maĂźtre des cĂ©rĂ©monies tenait donc prĂȘts d’avance douze pauvres, revĂȘtus pour l’occasion d’une chemise, d’un caleçon et de souliers » Un baquet est placĂ© dans la chambre de l’empereur », le protopapas fait lecture de l’Évangile ; quand il prononce les mots Il verse de l’eau dans le bassin » Jean, 13, 5, l’empereur verse de l’eau dans le baquet. Puis on amĂšne un par un les pauvres tenus prĂȘts Ă  l’avance et portant un cierge allumĂ© ; tour Ă  tour, chacun d’eux s’assied, et le protopapas continue la lecture de l’Évangile ; 42 Pseudo-Kodinos, TraitĂ© des offices, XII, Verpeaux 1966, 228-229. Sur cette cĂ©rĂ©monie, v ... il lit le passage JĂ©sus se mit Ă  laver les pieds de ses disciples », cela plusieurs fois, jusqu’à ce que tous aient Ă©tĂ© lavĂ©s ; l’empereur lave le pied droit de chacun et, ayant Ă©pongĂ© le pied lavĂ© avec un linge suspendu devant lui, il le baise. Ceci fait, la cĂ©rĂ©monie du lavement des pieds prend fin42. 43 Jean, 13, 16 Osty & Trinquet 1974. 44 Voir Grabar 1971, 200-201. Dans l’Évangile de Jean, JĂ©sus explique en ces termes le sens d’un geste qui a scandalisĂ© les disciples, habituĂ©s Ă  l’appeler MaĂźtre et Seigneur L’esclave [autrement dit JĂ©sus lui-mĂȘme] n’est pas plus grand que son seigneur [Dieu], ni l’envoyĂ© plus grand que celui qui l’a envoyĂ© »43. TransposĂ©e au basileus, la leçon du lavement des pieds est donc censĂ©e lui rappeler qu’il ne doit pas, lui, esclave, se croire plus grand que Dieu. Sans doute la date d’apparition tardive de cette cĂ©rĂ©monie s’explique-t-elle par la tendance qu’ont eue les Byzantins, dans les derniers siĂšcles de leur histoire, Ă  associer plus Ă©troitement liturgie impĂ©riale » et offices religieux44 en ces temps difficiles, oĂč l’Empire byzantin lutte, affaibli, pour sa survie, le contenu des rituels s’est appauvri, l’appareil dont s’entourait l’empereur a Ă©tĂ© beaucoup rĂ©duit, et l’accent mis, dans une cĂ©rĂ©monie comme le lavement des pieds, sur la mimesis Christou va de pair avec une tendance croissante Ă  souligner l’humanitĂ© de l’empereur. Miroirs des princes 45 Cf. Hunger 1978, 157-165 ; Blum 1981. 46 Formule empruntĂ©e Ă  Prinzing 1988. 47 L’Ekthesis d’Agapet est destinĂ©e Ă  Justinien 527-565, le Λáœčγο ÎœÎżÏ…ÎžÎ”Î·ÎčÎș᜞ πρ᜞ ÎČαÎčÎ»áœł ... 48 L’archevĂȘque ThĂ©ophylacte de Bulgarie s’adresse Ă  Constantin Doukas, fils de l’empereur M ... 49 Thomas Magister destine son miroir des princes au jeune Constantin, fils d’Andronic II Pa ... 50 Voir Anastasi 1976. 16À ces mises en garde ritualisĂ©es, intĂ©grĂ©es au cĂ©rĂ©monial, font Ă©cho les admonestations insistantes figurant dans les miroirs des princes, dont les Byzantins nous ont lĂ©guĂ© une riche collection45. J’ai choisi de limiter mon enquĂȘte Ă  une douzaine de textes, qui furent composĂ©s entre le VIe et le XVe siĂšcle. Neuf d’entre eux sont de purs reprĂ©sentants d’un genre littĂ©raire dont le discours d’Isocrate À NicoclĂšs constitue le plus ancien exemple grec ; trois autres sont des miroirs des princes intĂ©grĂ©s »46, qui prennent place Ă  l’intĂ©rieur d’ouvrages plus vastes, rĂ©cit historique ThĂ©ophylacte SimokattĂšs, roman hagiographique Barlaam et Joasaph ou manuel de la vie chrĂ©tienne Thesaurus de ThĂ©ognostos. Ces textes s’adressent soit Ă  des empereurs rĂ©gnants47, soit Ă  de jeunes princes que leur naissance destine Ă  exercer le pouvoir, et dont nos auteurs Ă©taient, parfois, les prĂ©cepteurs48. Chez ThĂ©ophylacte SimokattĂšs et dans Barlaam, les miroirs des princes intĂ©grĂ©s » prennent la forme de discours prononcĂ©s par des empereurs Ă  l’adresse de leurs successeurs49 – mise en scĂšne que l’on retrouve dans la Parenesis ad Leonem filium, texte censĂ©ment adressĂ© par l’empereur Basile Ier 867-886 Ă  son fils LĂ©on mais Ă©manant en fait d’un Ă©rudit proche du pouvoir ; Les Muses sont la mise en forme poĂ©tique des derniers conseils qu’Alexis Ier ComnĂšne aurait adressĂ©s Ă  son fils Jean, depuis son lit de mort ; composĂ© peut-ĂȘtre Ă  partir de notes laissĂ©es par l’empereur dĂ©funt, le poĂšme se donne pour le testament spirituel d’Alexis50 ; enfin, nous possĂ©dons un miroir des princes Ă©manant, non plus fictivement, ou indirectement, mais bien rĂ©ellement et sans intermĂ©diaire, d’un empereur byzantin, Manuel II PalĂ©ologue 1391-1425, qui adresse Ă  son fils Jean ses áżȘÏ€ÎżÎžáż†ÎșαÎč ÎČαÎčλÎčÎșῆ παÎčΎΔ᜷α – texte particuliĂšrement intĂ©ressant, puisqu’il nous permet d’entrer dans les coulisses du pouvoir, et d’observer comment un monarque investi de l’autoritĂ© absolue se met lui-mĂȘme en garde contre la dĂ©mesure Ă  laquelle sa position l’expose. 51 Sur la postĂ©ritĂ© d’Agapet, voir Sevcenko 1978. 52 Voir Sevcenko 1954. 53 Cf. Sevcenko 1954, 163-164. 54 Cf. Gautier 1980, 48. 55 Cf. Dujcev 1965, 117-118. 56 Édition synoptique des deux textes par Hunger 1986. 17Si les textes que je viens d’évoquer ne sont guĂšre connus aujourd’hui que d’une poignĂ©e de spĂ©cialistes, il n’en fut pas toujours ainsi, et certains ont mĂȘme bĂ©nĂ©ficiĂ©, pendant des siĂšcles, d’une grande popularitĂ©. Tel est le cas de l’Ekthesis d’Agapet cet ouvrage, fort prisĂ© des Byzantins, a non seulement exercĂ© une influence considĂ©rable sur les miroirs des princes ultĂ©rieurs Pseudo-Basile, Barlaam, Manuel II et fourni de nombreux extraits Ă  divers florilĂšges byzantins Pseudo-Maxime, Antoine Melissa, mais il a mĂȘme, apparemment, Ă©tĂ© utilisĂ© comme texte scolaire, d’oĂč la prĂ©sence frĂ©quente, dans la centaine de manuscrits oĂč il figure, de scolies grammaticales, lexicales, orthographiques et littĂ©raires51. La diffusion de l’Ekthesis a d’ailleurs largement dĂ©passĂ© les frontiĂšres de Byzance traduit en slave, dĂšs le Xe siĂšcle, le texte d’Agapet a bĂ©nĂ©ficiĂ© en Europe de l’Est d’une faveur exceptionnelle, et il exerça une profonde influence sur la propagande des princes moscovites, aux XVe et XVIe siĂšcles52. À la mĂȘme Ă©poque, l’Ekthesis fit aussi l’objet de traductions en latin, italien, français, anglais – traductions souvent dĂ©diĂ©es Ă  des princes, Charles IX de France 1563, Mary Stuart 1564, Maximilien II 1569, pour ne citer que quelques exemples. À Louis XIII enfant, on fit lire et traduire une version latine du texte d’Agapet, moyen de perfectionner sa connaissance des langues anciennes tout en le prĂ©parant Ă  son mĂ©tier de roi, et la traduction du prince, publiĂ©e en 1612 par son prĂ©cepteur, David Rivault, fut rééditĂ©e en 1649 Ă  l’intention du jeune Louis XIV, en guise de manuel sur l’art de gouverner. D’autres miroirs des princes byzantins ont connu un sort certes moins brillant que l’Ekthesis, mais nĂ©anmoins fort estimable la Parenesis du Pseudo-Basile a, comme le traitĂ© d’Agapet, exercĂ© une influence importante sur la littĂ©rature politique moscovite au XVIe siĂšcle53 ; la Paideia BasilikĂȘ de ThĂ©ophylacte de Bulgarie fut dĂ©diĂ©e par son premier Ă©diteur Pierre Poussines au jeune Louis XIV, qui rĂ©gnait alors sous la rĂ©gence de sa mĂšre Anne d’Autriche54 ; la lettre de Photius au prince Michel de Bulgarie fut adaptĂ©e en vers français par le pĂšre thĂ©atin D. Bernard, Ă  l’intention du roi Louis XV55 ; quant au Basilikos Andrias de NicĂ©phore BlemmydĂšs, texte composĂ© par son auteur Ă©rudit en style rhĂ©torique et obscur, il fit, au XIVe siĂšcle, l’objet d’une paraphrase, rĂ©alisĂ©e par Georges GalĂ©siotĂšs et Georges OinaiotĂšs56 – clair indice de l’intĂ©rĂȘt attachĂ© Ă  cette Ɠuvre difficile, mise ainsi Ă  la portĂ©e d’un plus grand cercle de lecteurs. 57 Cf. Hadot 1969. 58 Manuel II PalĂ©ologue, Praecepta, PG, 156, col. 317. 18On a accusĂ© bien souvent les miroirs des princes byzantins de manquer d’originalitĂ©, et de reproduire Ă  satiĂ©tĂ© les idĂ©es de leurs modĂšles antiques – exaltation des vertus de justice et de tempĂ©rance, motif de la Ό᜷ΌηÎč ΞΔοῊ, importance accordĂ©e au choix des amis, mise en garde contre les flatteurs57
 Sans doute nos traitĂ©s byzantins doivent-ils beaucoup Ă  des auteurs comme Isocrate ou Platon, beaucoup aussi aux reprĂ©sentations du pouvoir forgĂ©es Ă  l’époque alexandrine dans l’entourage des monarques hellĂ©nistiques, et diffusĂ©es ensuite par les auteurs de l’époque impĂ©riale, mais ils s’efforcent de concilier cet hĂ©ritage ancien avec celui de la Bible, pour Ă©laborer le portrait idĂ©al d’un prince chrĂ©tien. Les lectures conseillĂ©es par le Pseudo-Basile Ă  son royal interlocuteur comprennent le Livre de Salomon, le Siracide et Isocrate ch. 66 ; l’empereur Manuel II avoue pour sa part s’ĂȘtre inspirĂ©, pour composer ses Praecepta, de nombreux auteurs anciens Dion, Isocrate, et bien d’autres », mais en les complĂ©tant par des emprunts Ă  des hommes plus divins » i. e chrĂ©tiens58 ; et dans l’Ekthesis d’Agapet, oĂč l’empreinte chrĂ©tienne est particuliĂšrement forte, prĂšs de vingt-quatre chapitres environ un tiers de l’ouvrage traitent des relations de l’empereur et de Dieu. Un empereur de terre et de cendre » γῆ Îșα᜶ Ï€ÎżÎŽáœč 59 Isocrate, À NicoclĂšs, 37. 60 Ap. StobĂ©e, 6, 22 Delatte 1942, 26 texte grec et 47 traduction. Delatte place la ... 61 Le poids des modĂšles antiques est particuliĂšrement sensible dans le dĂ©veloppement oĂč Th ... 19Parmi les thĂšmes nouveaux figurant dans les miroirs des princes byzantins, on note la prĂ©sence d’un insistant Memento mori, ressassĂ© d’auteur en auteur, alors que ce motif, lorsqu’il apparaĂźt dans les Ɠuvres antiques, n’y est jamais qu’ébauchĂ©. À peine Isocrate a-t-il rappelĂ© Ă  NicoclĂšs Ne perds pas de vue que toute ta personne se dissout avec toi », qu’il ajoute, comme s’il voulait attĂ©nuer l’amertume du propos Mais puisque tu as obtenu du sort un corps mortel ÎžÎœáœ”ÎżÏ… áœœÎŒÎ±Îż, fais effort pour laisser de ton Ăąme un souvenir immortel áŒ€Îžáœ±ÎœÎ±ÎżÎœ ᜎΜ ΌΜ᜔ΌηΜ »59. Le nĂ©o-pythagoricien Ecphante admettait lui aussi, dans son traitĂ© Sur la royautĂ©, que le roi est semblable aux autres par la guenille ÎșáŸ¶ÎœÎż, attendu qu’il fut fait de la mĂȘme matiĂšre », mais il n’en qualifiait pas moins le souverain d’ ĂȘtre plus divin, l’emportant dans la nature commune par son principe supĂ©rieur », parce qu’ il fut fabriquĂ© par le meilleur artiste, qui le crĂ©a en se prenant lui-mĂȘme pour modĂšle »60. Sans doute n’est-ce donc pas un hasard si, dans le seul des traitĂ©s byzantins oĂč l’influence antique est prĂ©pondĂ©rante et l’empreinte chrĂ©tienne beaucoup plus discrĂšte, la Paideia BasilikĂȘ de ThĂ©ophylacte de Bulgarie, manque prĂ©cisĂ©ment le motif du Memento mori61. 62 C’est en raison mĂȘme de cette ambivalence que l’Ekthesis a pu ĂȘtre exploitĂ©e au XVIe si ... 20Agapet parle assurĂ©ment, comme Isocrate ou Ecphante, de dualitĂ© du pouvoir62, lorsqu’il affirme, dans l’un des plus cĂ©lĂšbres chapitres de son Ekthesis 63 Agapet, Ekthesis, ch. 21. Ce passage a Ă©tĂ© intĂ©gralement repris dans Barlaam pour carac ... Par la nature de son corps, le roi est l’égal de n’importe quel homme ; par le pouvoir de sa dignitĂ©, il est pareil Ă  Dieu, qui veille sur tous ; car il n’y a sur terre personne qui soit plus Ă©levĂ© que lui. Comme Dieu, il doit donc ne pas se mettre en colĂšre et, comme mortel, ne pas s’exalter s’il a l’honneur d’ĂȘtre Ă  l’image de Dieu, il n’en est pas moins liĂ© aussi Ă  l’image de poussiĂšre ΔጰÎșáœčΜÎč Ï‡ÎżÎčÎșῇ, et celle-ci lui enseigne qu’il est l’égal de tous63. Ailleurs dans l’Ekthesis, Agapet reprend et amplifie toutefois le motif de l’ image de poussiĂšre », qui acquiert ainsi la prĂ©pondĂ©rance Que nul ne tire vanitĂ© de la noblesse de ses aĂŻeux car tous ont la boue πηλáœčΜ pour ancĂȘtre de leur race, ceux qui se glorifient dans la pourpre et la soie comme ceux qui se consument dans la pauvretĂ© et la maladie, ceux qui sont ceints du diadĂšme comme ceux qui sont rĂ©duits Ă  implorer la charitĂ© ch. 4 ; La mort ne se laisse pas intimider par l’éclat des dignitĂ©s sur tous elle porte ses dents voraces ch. 67 ; MĂȘme s’il exerce le commandement sur terre, ne doit pas ignorer qu’il a Ă©tĂ© tirĂ© de la terre γῆ, que c’est de la poussiĂšre du sol Ï‡Îżáœč qu’il est montĂ© sur le trĂŽne et qu’il y redescendra aprĂšs quelque temps ch. 71. 64 Dagron 1996, 37-38. Voir Marc AurĂšle, PensĂ©es, 4, 48 ConsidĂ©rer sans ce ... 21Gilbert Dagron a comparĂ© Ă  juste titre les dĂ©veloppements de ce genre aux exercices spirituels mis Ă  la mode par les stoĂŻciens il s’agit, dit-il, de conduire le souverain, par le biais de sentences mĂ©morisables et de formules incantatoires, Ă  une mĂ©ditation sur lui-mĂȘme » – contrepoison qui l’immunisera contre l’illusion de la toute-puissance ; la fonction de l’Ekthesis d’Agapet, comme celle des PensĂ©es de Marc AurĂšle, est par consĂ©quent de servir de thĂ©rapeutique aux inĂ©vitables maladies du pouvoir absolu »64. Mais dans le traitĂ© d’Agapet, le Memento mori prend des accents nouveaux, d’une brutalitĂ© accrue, due peut-ĂȘtre Ă  ce qu’il est formulĂ© en termes oĂč se ressent l’influence de la langue imagĂ©e de la Septante. Le motif de l’ image de poussiĂšre » ΔጰÎșᜌΜ Ï‡ÎżÎčÎș᜔ renvoie bien Ă©videmment au rĂ©cit biblique de la crĂ©ation de l’homme, oĂč l’on voit Dieu façonner Adam poussiĂšre prise Ă  la terre » 2, 7 Ï‡ÎżáżŠÎœ ጀπ᜞ ῆ γῆ, puis le chasser du Paradis Terrestre, avec cette malĂ©diction 65 Gen. 3, 19 Dogniez et al. 2001. À la sueur de ta face tu mangeras ton pain, jusqu’à ce que tu retournes dans la terre d’oĂč tu as Ă©tĂ© pris, parce que tu es terre γῆ Δጶ et que tu t’en iras dans la terre65. 66 Gen. 18, 27 áŒÎłáœœ ΔጰΌÎč γῆ Îșα᜶ Ï€ÎżÎŽáœč. 67 Job, 10, 9 πηλáœčΜ ΌΔ ጔπλαα, Δጰ ÎŽáœČ Îłáż†Îœ ΌΔ πᜱλÎčΜ áŒ€Ï€ÎżÏáœłÏ†Î”Îč ; 30, 19 áŒ„ÎłÎ·Î±Îč ÎŽáœł ΌΔ ... 68 Sag. 7, 1 ΕጰΌ᜶ ÎŒáœČΜ ÎșáŒ€ÎłáœŒ ΞΜη᜞ áŒ„ÎœÎžÏÏ€Îż, áŒŽÎż ጅπαÎčΜ Îșα᜶ ÎłÎ·ÎłÎ”ÎœÎżáżŠ ጀπáœčÎłÎżÎœÎż ... 69 Sir. 10, 9-11 ᜷ ᜑπΔρηφαΜΔ᜻ΔαÎč γῆ Îșα᜶ Ï€ÎżÎŽáœč ; 17, 32 áŒ„ÎœÎžÏÏ€ÎżÎč πᜱΜΔ γῆ Îșα᜶ Ï€ÎżÎŽáœč ... On songe aussi Ă  Abraham se dĂ©clarant terre et cendre » γῆ Îșα᜶ Ï€ÎżÎŽáœč, avant de se risquer Ă  intercĂ©der en faveur des justes de Sodome et Gomorrhe66, Ă  Job rappelant qu’il a Ă©tĂ© façonnĂ© avec de la boue πηλáœčΜ et que sa place est parmi la terre et la cendre »67, Ă  Salomon disant ĂȘtre descendant du premier qui fut modelĂ© de terre » ÎłÎ·ÎłÎ”ÎœÎżáżŠ Ï€ÏÎżÏ€Î»áœ±ÎżÏ…68, Ă  la dĂ©finition enfin, plusieurs fois rĂ©pĂ©tĂ©e dans le Siracide, de l’homme terre et cendre »69. 22Utilisant la mĂȘme terminologie biblique, le Pseudo-Basile affirme avec force 70 Pseudo-Basile I, Parenesis, ch. 14 ΠΔρ᜶ απΔÎčÎœÎżÏ†ÏÎżáœ»ÎœÎ·, col. XXVIII C. C’est la boue πηλáœč qui est l’unique ancĂȘtre de notre race, mĂȘme si, poussiĂšre χáœčΔ que nous sommes, nous nous enflons les uns contre les autres. Souviens-toi donc de toi-mĂȘme, toi qui n’es que poussiĂšre hautaine ᜑψηλ᜞ Ï‡ÎżáżŠ, et sache bien que, si tu as Ă©tĂ© haussĂ© depuis terre, de toute façon tu retourneras Ă  la terre70. L’auteur du Λáœčγο ÎœÎżÏ…ÎžÎ”Î·ÎčÎș᜞ πρ᜞ ÎČαÎčÎ»áœłÎ± dit, pour sa part, que tous les hommes sont fils d’Adam, les empereurs et les souverains comme ceux qui gagnent leur pain par leur travail » § 15-16. Thomas Magister rappelle au jeune prince Constantin que, malgrĂ© son rang, il partage le lot des mortels » Tu n’étais pas avant de naĂźtre
, l’origine de ta race remonte Ă  la poussiĂšre et au nĂ©ant Δጰ Ï‡ÎżáżŠÎœ Δ Îșα᜶ ᜞ ÎŒÎ·ÎŽáœłÎœâ€Š, non seulement tu ne demeureras pas toujours, mais tu obtiendras toi aussi le mĂȘme sort que tes ancĂȘtres ch. 2. L’empereur Manuel II tient Ă  son fils un discours tout aussi austĂšre, et plusieurs fois rĂ©pĂ©tĂ© au chapitre 7, il lui rappelle que l’homme créé de la main de Dieu est l’ancĂȘtre de tous » et l’invite donc Ă  ne pas s’exalter de l’inĂ©galitĂ© de son apparence » Tu es, lui dit-il, boue tirĂ©e de la mĂȘme boue » πηλ᜞Μ áœÎŒÎżáœ·ÎżÏ… Ï€Î·Î»ÎżáżŠ ; au chapitre 68, il reprend Nous sommes tous les enfants d’Adam, qui vint Ă  l’existence façonnĂ© par la main de Dieu avec de la boue πηλ » ; et la mĂȘme thĂ©matique reparaĂźt Ă  nouveau dans le centiĂšme et dernier chapitre des Praecepta, assortie d’une rĂ©fĂ©rence Ă  l’enseignement davidique Il se montre sensĂ©, celui qui, sachant qu’il est poussiĂšre Ï‡ÎżáżŠ et qu’il faut accorder son dĂ» Ă  la terre-mĂšre γῇ͂ ῇ͂ Όηρ᜷, Ă©coute David et arrive Ă  la mort en Ă©tat de repentance. Le ÎČαÎčλΔáœș áœ»ÎœÎŽÎżÏ…Î»Îż Compagnon d’esclavage » de ses propres sujets 71 Photius, Lettre Ă  Michel de Bulgarie, l. 619-622. 72 ThĂ©ognostos, Thesaurus, § 1. 73 NicĂ©phore BlemmydĂšs, Basilikos Andrias, ch. 35 et 39. 23Beaucoup de passages, dans nos traitĂ©s byzantins, soulignent la solidaritĂ© de l’empereur avec les autres hommes Photius rappelle au prince Michel de Bulgarie que les mĂȘmes rĂšgles de comportement valent pour gouvernant et gouvernĂ©, car commune est leur nature, communs les commandements , communs la vigilance et le soin requis par ces commandements »71. L’empereur ne doit pas, dĂ©clare ThĂ©ognostos, alors qu’il rĂšgne sur des hommes de mĂȘme nature que lui » áœÎŒÎżÎłÎ”ÎœÎœ, se laisser dominer par d’indignes passions72. Il doit savoir, dit NicĂ©phore BlemmydĂšs, que ses sujets lui sont apparentĂ©s » ᜞ ጀρχáœčÎŒÎ”ÎœÎżÎœ áœ»ÎłÎłÎ”ÎœÎ”, et penser, s’il chĂątie l’un d’entre eux, que celui qu’il chĂątie est de la mĂȘme essence que lui » ῆ Î±áœáż† Îżáœáœ·Î±73. Thomas Magister affirme pareillement 74 Thomas Magister, De regis officiis, ch. 2. Avant tout, il te faut considĂ©rer que, mĂȘme si tu as obtenu de diriger le monde et d’ĂȘtre environnĂ© d’une telle puissance, tu n’en partages pas moins toi aussi le lot des mortels et le mĂȘme sort que nous74. 75 Agapet, Ekthesis, ch. 68. Dans la liturgie mĂȘme, l’empereur Ă©tait dĂ©signĂ© comme escla ... 76 Barlaam, ch. 36, § 333 ; le mĂȘme motif est repris au § 334 Barachias devra se montrer ... 24Cette solidaritĂ© essentielle liant souverain et sujets, plusieurs de nos auteurs l’évoquent en termes d’esclavage partagĂ©. Sans doute, rappelle Agapet, le roi est-il maĂźtre de tous, mais avec tous il est esclave de Dieu » ΎοῊλο ΞΔοῊ75. Dans Barlaam, Joasaph tient le mĂȘme langage Ă  celui qu’il s’est choisi pour successeur, Barachias, afin de l’inviter Ă  pratiquer la charitĂ© Tels nous sommes disposĂ©s Ă  l’égard de nos compagnons d’esclavage Ï…ÎœÎŽÎżáœ»Î»ÎżÎč, lui dit-il, tel nous trouverons le Seigneur disposĂ© Ă  notre Ă©gard »76. Le Pseudo-Basile dĂ©clare avec plus d’insistance 77 Pseudo-Basile I, Parenesis, ch. 14 ΠΔρ᜶ απΔÎčÎœÎżÏ†ÏÎżáœ»ÎœÎ·, col. XXVIII C. Tu veux te rendre Dieu favorable ? Montre-toi favorable Ă  tes sujets, toi aussi. Car mĂȘme si tu leur as Ă©tĂ© dĂ©signĂ© pour maĂźtre, tu n’en es pas moins leur compagnon d’esclavage áœ»ÎœÎŽÎżÏ…Î»Îż. Nous, les hommes, possĂ©dons tous en effet un seul et unique maĂźtre universel
 Souviens-toi de tes fautes envers Dieu, et tu oublieras les fautes que ton prochain a commises envers toi77. Mais, de tous nos auteurs, sans doute est-ce l’empereur Manuel II qui, dans ses Praecepta, a donnĂ© au motif du ÎČαÎčλΔáœș áœ»ÎœÎŽÎżÏ…Î»Îż l’expression la plus vigoureuse. Il rappelle Ă  son fils 78 Manuel II, Praecepta, ch. 7. Dieu te prodiguera ses bienfaits, si tu sais que tu lui dois le sceptre, si tu es bien conscient que tu es son esclave ÎŽÎżáżŠÎ»ÎżÎœ, et te rĂ©jouis de cette servitude ÎŽÎżÏ…Î»Î”áœ·áŸł plus que de rĂ©gner sur autrui ; sache que tu es esclave de Dieu bien plus que n’est esclave chez toi n’importe quel homme achetĂ© Ă  prix d’argent
 Et mĂȘme, exceptĂ© pour l’apparence extĂ©rieure, cet homme achetĂ© Ă  prix d’argent est ton compagnon d’esclavage áœ»ÎœÎŽÎżÏ…Î»Îż, ton frĂšre, ton Ă©gal, en raison de votre commune nature tirĂ©e de la terre78. 79 ThĂ©ophylacte SimokattĂšs, Historiae, 3, 11, 9. 80 ThĂ©ognostos, Thesaurus, § 4 et 14 cf. Matthieu, 19, 23. 25Comme le Memento mori, le motif de l’empereur-esclave de Dieu possĂšde une fonction prophylactique il sert Ă  protĂ©ger le souverain du pĂ©ril de l’hybris, en lui rappelant notamment qu’il sera, comme tout un chacun, soumis au jugement de Dieu. ThĂ©ophylacte SimokattĂšs fait tenir Ă  l’empereur Justin, Ă  l’intention de TibĂšre, qu’il s’apprĂȘte Ă  associer au pouvoir, un discours oĂč il avoue avoir, dans l’exercice de la royautĂ©, commis des fautes dont il devra rendre compte devant le tribunal du Christ »79. ThĂ©ognostos, dans son Thesaurus, rappelle au destinataire de son miroir des princes intĂ©grĂ© » qu’il doit redouter le seul roi vĂ©ritable, grand et sans successeur » et ne pas oublier que, si les riches entreront difficilement au royaume des cieux », la chose sera plus malaisĂ©e encore pour le roi qui ne gouvernerait pas comme il plaĂźt Ă  Dieu » ; il doit songer qu’à l’heure du dĂ©part, il n’emportera avec lui aucune de ses richesses, mais ses seuls actes Car c’est nu que tout mortel vient au jour, et il s’en ira, nu, dans l’au-delĂ  »80. Une nouvelle vertu princiĂšre l’humilitĂ© 81 EusĂšbe, Louanges de Constantin, 18, 3 Maraval 2001 Tu pourrais nous exposer en dĂ© ... 82 ThĂ©ognostos, Thesaurus, § 1 ጐΜ Îłáœ°Ï ῇ͂ χΔÎčρ᜶ Îżáœ»ÎżÏ… áŒĄ ᜎ ÎșαρΎ᜷α. 83 Prov. 21, 1 d’Hamonville 2000. Dagron 1968, 150-153, signale trois rĂ©fĂ©re ... 84 Antoine Melissa, Loci communes, II, 1, col. 1000 D. 26S’il est comptable devant Dieu des fautes qu’il peut ĂȘtre amenĂ© Ă  commettre, l’empereur doit en revanche attribuer au Tout-Puissant le mĂ©rite de ses succĂšs, puisque, comme EusĂšbe l’exposait dĂ©jĂ  dans ses Louanges de Constantin, Dieu Ɠuvre Ă  ses cĂŽtĂ©s pour lui assurer la victoire81. ThĂ©ognostos dĂ©bute ses conseils au prince en lui rappelant que son cƓur est entre les mains de Dieu82 – citation tronquĂ©e des Proverbes, oĂč il est Ă©crit Comme un jaillissement d’eau, ainsi le cƓur du roi dans la main de Dieu ; oĂč qu’il veuille le faire tendre, c’est lĂ  qu’il incline »83. La formule Ă©tait chĂšre aux Byzantins, comme l’atteste sa prĂ©sence rĂ©currente dans les florilĂšges spirituels ; dans les Loci communes d’Antoine Melissa, elle figure Ă  deux reprises dans le chapitre Sur le bon roi », assortie, Ă  la premiĂšre occurrence, du commentaire Ce n’est pas la force des armes, mais l’aide de Dieu qui assure le salut du roi »84. 27Cette conviction s’exprime en bien des passages de nos miroirs des princes. Photius rappelle Ă  Michel de Bulgarie 85 Photius, Lettre Ă  Michel de Bulgarie, l. 1165-1169. Tous les succĂšs que tu remportes, que ce soit dans ta vie privĂ©e ou pour l’intĂ©rĂȘt commun de l’État, juge bon d’en attribuer Ă  Dieu la responsabilitĂ© tu te le rendras ainsi plus secourable, tu passeras pour un ami de Dieu ÎžÎ”ÎżÏ†Îčλ᜔, tu ne t’entendras pas reprocher d’ĂȘtre lĂ©ger et fanfaron ÎșÎżáżŠÏ†ÎżÎœ Îșα᜶ áŒ€Î»Î±Î¶ÎżÎœÎčÎșáœčΜ et tu verras brisĂ©s les aiguillons de la jalousie85. 86 Pseudo-Basile I, Parenesis, ch. 65 ΠΔρ᜶ οῊ Όᜎ ጐπα᜷ρΔΞαÎč, col. LIII D – LVI A. Sur l ... 87 Manuel II, Praecepta, § 13 et 42. Le Pseudo-Basile consacre tout un chapitre Ă  expliquer qu’il ne faut pas se glorifier » Ne considĂšre aucun des succĂšs que tu as obtenus comme absolument tiens », dit-il, et consacre Ă  Dieu seul, avec reconnaissance, »86. Manuel II donne Ă  son fils le mĂȘme conseil Aucun bien, lui rappelle-t-il, n’advient sans la volontĂ© de Dieu » ; si nous sommes dĂ©pourvus de son aide, gardes du corps, citadelle, troupe nombreuse et savantes machines deviennent inutiles »87. 88 ThĂ©ophylacte SimokattĂšs, Historiae, 1, 1, 6 et 16-18. La formule ᜑψηλáœčΜ Îșα᜶ ÎŒÎ”áœłÏÎżÎœ es ... 89 Agapet, Ekthesis, ch. 14. 90 Barlaam, ch. 36, § 332. 91 Barlaam, ch. 33, § 306. 92 Photius, Lettre Ă  Michel de Bulgarie, l. 1197. 93 Alexis Ier ComnĂšne, Les Muses, I, 408-413. 28Dans nos miroirs des princes, l’orgueil apparaĂźt donc comme le danger majeur, et l’humilitĂ© comme la vertu la plus souhaitable du bon dirigeant. Évoquant les mises en garde de l’empereur TibĂšre Ă  son successeur Maurice, ThĂ©ophylacte SimokattĂšs nous le montre rĂ©trospectivement effrayĂ© de l’étendue de son pouvoir LĂ  oĂč il y a excĂšs de puissance, dit-il, il est naturel que s’ensuivent aussi des fautes plus nombreuses » ; la royautĂ© est chose hautaine et altiĂšre » ᜑψηλáœčΜ Îč Ï‡Ïáż†ÎŒÎ± Îșα᜶ ÎŒÎ”áœłÏÎżÎœ, elle exalte qui la dĂ©tient et incite Ă  l’arrogance ; pour ne pas cĂ©der Ă  cette tentation, il convient de considĂ©rer la pourpre comme une humble guenille » Î”áœáœłÎ»Î” Îč áż„áœ±ÎșÎż et le pouvoir comme un brillant esclavage » ÎŽÎżÏ…Î»Î”áœ·Î±Îœ áŒ”ÎœÎŽÎżÎŸÎżÎœ88. Si le souverain sait purifier son esprit des illusions humaines et considĂ©rer la nullitĂ© de sa propre nature, la briĂšvetĂ© et la fugacitĂ© de l’existence ici-bas et la souillure liĂ©e Ă  la chair, il ne tombera pas dans le gouffre de l’orgueil » ῆ ᜑπΔρηφαΜ᜷α ÎșρηΌΜáœčΜ, dĂ©clare Agapet89 – formule que l’auteur de Barlaam a textuellement reproduite dans le discours oĂč Joasaph engage son successeur, Barachias, Ă  ne pas se laisser entraĂźner par la gloire Ă©phĂ©mĂšre » Ă  Ă©prouver un vain orgueil » ΌᜱαÎčÎżÎœ φ᜻ηΌα90. Joasaph lui-mĂȘme, pendant la courte durĂ©e de son rĂšgne, a d’ailleurs donnĂ© l’exemple d’une parfaite modestie, en s’employant Ă  susciter crainte et respect moins en raison de la majestĂ© du pouvoir et de la magnificence de la royautĂ© » ጀπ᜞ οῩ͂ áœ„ÎłÎșÎżÏ… ῆ áŒÎŸÎżÏ…áœ·Î± Îșα᜶ ῆ ÎČαÎčλÎčÎșῆ ÎŒÎ”ÎłÎ±Î»ÎżÏ€ÏÎ”Ï€Î”áœ·Î± que pour son humilitĂ© et sa douceur » ጀπ᜞ ῆ απΔÎčÎœÎżÏ†ÏÎżáœ»ÎœÎ· Îșα᜶ πραáœčηο91. Photius, usant d’une formulation volontairement paradoxale, souhaite que Michel de Bulgarie l’emporte sur la prĂ©somption et soit vaincu par l’humilitĂ© » ÎżáŒ°áœ”Î” ΌΔ᜷ζΜ, απΔÎčÎœÎżÏ†ÏÎżáœ»ÎœÎ· áŒÎ»Î±Îżáœ»ÎŒÎ”ÎœÎż92, et Alexis Ier rappelle Ă  son fils que c’est uniquement en attachant peu de prix Ă  la majestĂ© du trĂŽne et du pouvoir » ᜞Μ áœ„Ì“ÎłÎșÎżÎœ οῊ ΞρáœčÎœÎżÏ… Îșα᜶ οῩ͂ ÎșÏáœ±ÎżÏ… qu’il pourra faire partie des heureux » et passer pour grand aux yeux du Seigneur93. 94 Or. 19 ̓Επ᜶ ῇ͂ φÎčÎ»Î±ÎœÎžÏÏ€áœ·áŸł οῊ Î±áœÎżÎșÏáœ±ÎżÏÎż Î˜Î”ÎżÎŽÎżáœ·ÎżÏ…, 226 d – 227 a. 95 Sur cette Ă©volution sĂ©mantique du terme πρα᜻η, voir Spicq 1947, 324-332. 29La prĂ©sence de la απΔÎčÎœÎżÏ†ÏÎżáœ»ÎœÎ· au nombre des vertus exigĂ©es du bon prince constitue une innovation spĂ©cifiquement chrĂ©tienne. Le terme n’apparaĂźt jamais dans les miroirs des princes anciens, oĂč l’accent est mis sur la justice, la tempĂ©rance Ï†ÏÎżáœ»ÎœÎ·, la clĂ©mence ou la bontĂ©. Dans les nombreux discours que ThĂ©mistios composa, entre 350 et 386, Ă  l’adresse des empereurs Constance II, Jovien, Valens et ThĂ©odose, c’est la philanthropie » qui passe pour la vertu royale par excellence elle est, dit-il, Ă  l’origine de toutes les autres qualitĂ©s, douceur, justice, piĂ©tĂ©, et c’est elle seule qui permet au roi de s’assimiler Ă  Dieu ΞΔ͂ͅ áœÎŒÎżÎčοῊΞαÎč94. Il semble nĂ©anmoins que la mise en valeur de vertus comme la douceur áŒĄÎŒÎ”Ïáœčη, πραáœčη ou la juste mesure ΌΔρÎčáœčη ait frayĂ© la voie Ă  l’exaltation chrĂ©tienne de la απΔÎčÎœÎżÏ†ÏÎżáœ»ÎœÎ·. C’est d’ailleurs, dans la Septante, le terme πρα᜻η qui, pourvu d’une signification nouvelle, sert bien souvent Ă  Ă©voquer humilitĂ© et modestie95 – qualitĂ©s spĂ©cifiques du serviteur de Dieu, habituĂ© Ă  s’abaisser devant le TrĂšs-Haut. 96 Isocrate figure parmi les sources mentionnĂ©es dans le prologue des Praecepta, et il est ... 97 Souvenir possible de Jean Chrysostome pour qui le diptyque du Pharisien et du Publicain ... 30Peut-ĂȘtre est-ce sous l’influence de ses modĂšles antiques que Manuel II, dans ses Praecepta, prĂŽne avec tant d’insistance la ΌΔρÎčáœčη admirateur d’Isocrate, qui, dans son discours À NicoclĂšs, exhortait le prince de Chypre Ă  ne nourrir que des dĂ©sirs modĂ©rĂ©s § 26 ΌΔρ᜷Μ ጐπÎčÎžÏ…ÎŒáż‡, l’empereur byzantin paraĂźt vouloir imiter l’orateur96, en adjoignant la ΌΔρÎčáœčη aux quatre vertus cardinales de justice, courage, tempĂ©rance et sagesse ch. 73 ; mais la juste mesure antique se confond visiblement dans son esprit avec l’humilitĂ© chrĂ©tienne Garder la mesure ΌΔρÎčᜱζΔÎčΜ quand on a obtenu de grands succĂšs, dit-il, c’est dresser un double trophĂ©e » qui, au bĂ©nĂ©fice du succĂšs lui-mĂȘme, adjoint le profit que l’on recueille Ă  n’en pas tirer gloire, car l’orgueil est ennemi de Dieu » ch. 77 ; il faut se concilier le CrĂ©ateur en accomplissant de bonnes actions, mais sans en Ă©prouver de vanitĂ©, Ă  la diffĂ©rence du Pharisien qui, tout en pratiquant la vertu, n’avait pas appris la juste mesure » ΌΔρÎčᜱζΔÎčΜ agir comme celui-ci serait perdre Ă  la lĂ©gĂšre le bĂ©nĂ©fice de ses efforts ch. 9997. 98 BlemmydĂšs a apparemment confondu ce personnage avec BellĂ©rophon ; la paraph ... 99 Lycaon, pour mettre Zeus Ă  l’épreuve, lui fit servir de la chair humaine, et le dieu le ... 100 Ici encore, la paraphrase est plus prĂ©cise et condamne explicitement SalmonĂ©e en Ă©voqua ... 101 Il s’agit du feu de l’ጀυφ᜷α et de la απΔ᜷ΜÎč », explique la paraphrase. 102 Cf. Dion Chrysostome, Or. 1, 46 celui qui se montre irrespectueux envers la divinitĂ© ... 103 BlemmydĂšs emploie le terme ΌΔρÎčÎżÏ†ÏÎżÎœÎœ, que la paraphrase transpose, dans le registre ... 104 Dans la paraphrase, le motif figure trĂšs explicitement, en commentaire Ă  la formule ala ... 31Dans son Basilikos Andrias, NicĂ©phore BlemmydĂšs a pour sa part utilisĂ© une sĂ©rie d’exemples mythologiques, pour illustrer une leçon fondamentalement chrĂ©tienne ch. 95-102. Voulant mettre son Ă©lĂšve en garde contre les mĂ©faits de l’orgueil, il lui cite successivement le Corinthien Hipponoos qui, s’étant Ă©lancĂ© vers le ciel, montĂ© sur PĂ©gase, fut prĂ©cipitĂ© au sol la tĂȘte la premiĂšre98 ; puis Icare qui, submergĂ© par l’ocĂ©an de la folle prĂ©somption » ῆ ጀαΞαλ᜷α, perdit ses ailes, pour avoir cherchĂ©, contre toute mesure » Ï€áœłÏÎ± οῊ ÎŒáœłÏÎżÏ…, Ă  toucher les rayons du soleil ; puis les Lycaonides foudroyĂ©s – Ă  cause de leur vain orgueil » ÎŽÎčᜰ ᜞Μ ΌᜱαÎčÎżÎœ áżŠÏ†ÎżÎœ αᜐΜ, prĂ©cise la paraphrase de GalasiotĂšs99 ; puis SalmonĂ©e qui, pour s’ĂȘtre essayĂ© Ă  imiter Zeus, fut lui aussi frappĂ© de la foudre100 ; et, pour finir, les Aloades ÉphialtĂšs et Otos qui, ayant voulu, en Ă©levant l’Ossa sur l’Olympe, et le PĂ©lion sur l’Ossa, se hausser jusqu’au ciel, furent prĂ©cipitĂ©s Ă  terre. De ces exemples, BlemmydĂšs conclut qu’il faut bannir la superbe ᜞ ÎŒÎ”áœłÏÎżÎœ φρáœčΜηΌα, source de catastrophes, et lui prĂ©fĂ©rer la juste mesure ᜞ ÎŒáœłÏÎčÎżÎœ et, puisant Ă  nouveau dans le rĂ©pertoire mythologique, il invite le bon roi Ă  imiter PersĂ©e combattant la Gorgone ou HĂ©raclĂšs terrassant l’hydre – images de la lutte que la raison doit mener contre les passions, une lutte dont l’arme est le feu de l’esprit mesurĂ© et dĂ©nuĂ© d’orgueil » ᜞ ΌΔρÎčáœčÏ†ÏÎżÎœ Îșα᜶ áŒ„Ï…Ï†ÎżÎœ Îșα᜶ Ï€áżŠÍ‚Ï101 – vĂ©hicule vraiment royal qui, loin de prĂ©cipiter Ă  terre son passager, comme il arriva jadis Ă  PhaĂ©thon, peut seul lui permettre de s’élever sans danger jusqu’au ciel. Si, dans tout ce passage, l’imagerie est exclusivement paĂŻenne et si, parmi les exemples invoquĂ©s, plusieurs Icare ou PhaĂ©thon avaient dĂ©jĂ  Ă©tĂ© utilisĂ©s par des auteurs antiques Dion Chrysostome, Lucien ou Julien pour stigmatiser l’esprit de dĂ©mesure, et notamment l’hybris des princes102, la conclusion Ă  laquelle aboutit ce dĂ©veloppement truffĂ© de rĂ©fĂ©rences mythologiques est indubitablement chrĂ©tienne Un roi, s’il possĂšde, en plus des autres vertus royales, un esprit mesurĂ© »103, Ă©voque trĂšs exactement celui qui, aprĂšs ĂȘtre montĂ© aux cieux, en est redescendu Ă  prendre la forme d’un esclave », autrement dit le Christ, roi de gloire ». Le traitĂ© de BlemmydĂšs nous offre ainsi un exemple, littĂ©raire, du motif de la mimesis Christou104, dont nous avions rencontrĂ© prĂ©cĂ©demment la version rituelle Ă  travers la cĂ©rĂ©monie du lavement des pieds. Les leçons politiques de la Bible 105 Cf. Dagron 1996, 20-21 Le passage au christianisme a autant modifiĂ© les donnĂ©es de la ... 106 Pour le Moyen Âge occidental, voir Reydellet 1985 ; pour Byzance, Dagron 1996, ... 32Les miroirs des princes byzantins illustrent donc, indubitablement, la christianisation de l’institution monarchique105. Leur tonalitĂ© nouvelle reflĂšte l’influence profonde exercĂ©e sur la rĂ©flexion politique des Byzantins par le texte de la Bible, lue, au Moyen Âge, comme un miroir des princes106 on trouve en effet dans les Écritures, d’une part, les Ă©lĂ©ments d’une thĂ©orie du pouvoir monarchique, et d’autre part, un rĂ©pertoire de situations, d’épisodes, de personnages que les Byzantins ont Ă©rigĂ©s en archĂ©types modĂšles et contre-modĂšles Ă  l’aune desquels ils pouvaient interprĂ©ter les Ă©vĂ©nements du prĂ©sent. ModĂšles 107 Exode, 18, 21 Dogniez et al. 2001 ጄΜΎρα ÎŽÎčÎșÎ±áœ·ÎżÏ… ÎŒÎčÎżáżŠÎœÎ± ᜑπΔρηφαΜ᜷αΜ. 108 Deut., 17, 20 Dogniez et al. 2001 ጔΜα Όᜎ áœ‘ÏˆÎžáż‡Í‚ áŒĄ ÎșαρΎ᜷α Î±áœÎżáżŠ ጀπ᜞ Μ ጀΎΔλφΜ Î±áœÎż ... 109 Cf. LĂ©v., 29, 19 ᜎΜ ᜕ÎČρÎčΜ ῆ ᜑπΔρηφαΜ᜷α ; Esther, 4, 17 d ÎżáœÎș ጐΜ ᜕ÎČρΔÎč ÎżáœÎŽáœČ ጐΜ ... 110 Prov., 16, 5 ; 3, 34 d’Hamonville 2000. 111 Jacques, 4, 6 et 1 Pierre, 5, 5. 112 Cf. Évagre, Schol. Prov. 39 GĂ©hin 1987 Le Seigneur rĂ©siste aux orguei ... 113 On rencontre ce verset, Ă  trois reprises, dans les chapitres consacrĂ©s par Antoine ... 114 Lettre d’AristĂ©e Ă  Philocrate, § 262 Pelletier 1962. 33Dans le Pentateuque sont exprimĂ©es, Ă  propos des chefs du peuple d’IsraĂ«l les juges », des exigences qui ont indĂ©niablement contribuĂ© Ă  nourrir l’idĂ©al politique des Byzantins on peut lire dans l’Exode que les juges » devront ĂȘtre des hommes justes qui haĂŻssent l’arrogance »107, et dans le DeutĂ©ronome que le chef devra lire tous les jours de sa vie » les commandements du Seigneur, afin que son cƓur ne s’élĂšve pas au-dessus de ses frĂšres »108. Les prescriptions Ă©noncĂ©es dans les Proverbes sont d’un intĂ©rĂȘt tout particulier, puisque la traduction de ce livre en grec a Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©e, aux environs de 175 avant par un personnage, Aristobule, qui Ă©tait le prĂ©cepteur de PtolĂ©mĂ©e VI, et qui, semble-t-il, effectua ce travail Ă  l’intention du jeune prince, pour parfaire son Ă©ducation politique les Proverbes LXX Ă©taient donc, dĂšs l’origine, un livre de pĂ©dagogie royale. C’est dans ce recueil que l’on rencontre la formule Comme un jaillissement d’eau, ainsi le cƓur du roi dans la main de Dieu
 » 21, 1 – formule citĂ©e, nous l’avons vu, dans le Thesaurus de ThĂ©ognostos. Les mises en garde abondent, dans les Proverbes, contre l’ᜑπΔρηφαΜ᜷α, rĂ©guliĂšrement associĂ©e Ă  l’hybris dans le texte de la Septante109 l’auteur qualifie d’ impur pour Dieu tout cƓur altier » áœ‘ÏˆÎ·Î»ÎżÎșᜱρΎÎčÎż et rappelle que le Seigneur rĂ©siste aux orgueilleux » áœ‘Ï€Î”ÏÎ·Ï†áœ±ÎœÎżÎč, tandis qu’ aux humbles απΔÎčÎœÎżáż– il donne sa grĂące »110 – verset d’autant plus familier aux Byzantins qu’il est citĂ©, Ă  deux reprises, dans le Nouveau Testament, par Jacques et Pierre111, et qu’il fit l’objet de nombreux commentaires patristiques112 et de multiples rĂ©fĂ©rences dans les florilĂšges spirituels113. Son utilisation politique est attestĂ©e, dĂšs l’époque hellĂ©nistique, dans la Lettre d’AristĂ©e Ă  Philocrate, texte composĂ© au IIe siĂšcle avant en milieu judĂ©o-alexandrin, pour retracer l’histoire de la traduction de la Bible en grec, Ă  l’initiative de PtolĂ©mĂ©e II Philadelphe la sĂ©rie de banquets offerts par le souverain aux soixante-douze traducteurs nouvellement arrivĂ©s de JĂ©rusalem y fournit le cadre d’un petit traitĂ© ΠΔρ᜶ ÎČαÎčλΔ᜷α, prĂ©sentĂ© sous forme de questions-rĂ©ponses Ă©changĂ©es par le roi et les sages juifs § 187-293 ; le roi ayant demandĂ© au 51e traducteur ce qu’il devait faire pour ne pas cĂ©der Ă  l’orgueil ᜑπΔρηφαΜ᜷α, le sage lui rĂ©pond qu’il y parviendra en gardant l’égalitĂ© et en se rappelant devant chacun qu’il reste homme, tout chef qu’il est. Car Dieu fait pĂ©rir les orgueilleux, tandis qu’il Ă©lĂšve les doux et les humbles »114. Comme le livre des Proverbes, le Siracide est riche en mises en garde contre l’orgueil, dont beaucoup sont explicitement adressĂ©es aux puissants Plus tu es grand, plus il faut t’humilier et devant le Seigneur tu trouveras grĂące 3, 18 ; Le Seigneur a culbutĂ© les trĂŽnes des princes, il a Ă©tabli les doux Ï€ÏÎ±Î”áż– Ă  leur place 10, 14 ; 115 Trad. ƓcumĂ©nique 2004. Au jour de ta gloire ne t’élĂšve pas Όᜎ áŒÏ€Î±áœ·ÏÎżÏ…â€Š Bien des tyrans se sont assis par terre
 Bien des princes ont Ă©tĂ© complĂštement dĂ©shonorĂ©s et des hommes cĂ©lĂšbres livrĂ©s Ă  la merci d’autrui 11, 4-6115. 116 Nombres, 12, 3 Dogniez et al. 2001. S’appliquant Ă  montrer qu’aucune vert ... 117 Cf. 2 Regn. 6 ; 12 ; 16. L’épisode de David et AbishaĂŻ est souvent citĂ© dan ... 34À ces recommandations thĂ©oriques, fournies par la Bible, s’ajoutent des exemples concrets, offerts Ă  l’imitation des princes. Dans le Pentateuque, figure un portrait de MoĂŻse appelĂ© Ă  devenir un point de rĂ©fĂ©rence obligĂ© dans la dĂ©finition du bon prince L’homme qu’était MoĂŻse Ă©tait extrĂȘmement doux πραáœș φáœčΎρα en comparaison de tous les hommes de la terre »116. Dans les Livres historiques, c’est David qui apparaĂźt comme le modĂšle privilĂ©giĂ©, parce qu’il a su mettre l’honneur de Dieu au-dessus de l’étiquette royale en dansant devant l’arche, parce qu’il n’a pas hĂ©sitĂ© Ă  reconnaĂźtre ses fautes et Ă  s’humilier devant Dieu, parce qu’il a supportĂ© sans colĂšre les malĂ©dictions d’AbishaĂŻ117. La priĂšre qu’il formule, au moment d’accorder l’investiture Ă  son fils et successeur Salomon, priĂšre en forme de testament spirituel, peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme le prototype de tous les miroirs des princes byzantins, tant le roi d’IsraĂ«l y exprime avec clartĂ© la dĂ©pendance essentielle dans laquelle le pouvoir humain se trouve par rapport Ă  Dieu 118 1 Par. 29, 11-17 Îżáœ·, Îș᜻ρÎčΔ, áŒĄ ÎŒÎ”ÎłÎ±Î»áœ»ÎœÎ· Îșα᜶ áŒĄ Ύ᜻ΜαΌÎč Îșα᜶ ᜞ Îșα᜻χηΌα Îșα᜶ áŒĄ Μ᜷Îșη ... À toi, Seigneur, la grandeur, la puissance, la fiertĂ©, la victoire et la force, parce que c’est toi le maĂźtre de tout ce qui existe dans le ciel et sur terre et que devant ta face, tout monarque et tout peuple se troublent. De toi viennent la richesse et la gloire, et c’est toi qui domines tout, Seigneur qui es au fondement de toute domination. Dans ta main sont la force et la puissance ; dans ta main, Tout-Puissant, le pouvoir de grandir et d’affermir toutes choses
 Qui suis-je ?
 Tout t’appartient
 Nous sommes des Ă©trangers devant toi
 Nos jours sur la terre sont comme l’ombre
 J’ai compris, Seigneur, que tu es celui qui sonde les cƓurs et chĂ©ris la justice118. 119 Matthieu, 11, 29 Osty & Trinquet 1974. Dans le chapitre qu’Antoine Melissa consacre Ă  ... 120 Marc, 9, 35 Osty & Trinquet 1974. Dans la cinquiĂšme de ses CatĂ©chĂšses l. 610 sq., S ... 121 Ambroise, Apologie de David, 81 Cordier 1977. 35Sans doute le Nouveau Testament est-il moins riche en enseignements directement adressĂ©s aux princes, bien que le Christ puisse, lui aussi, ĂȘtre considĂ©rĂ© comme une figure royale – en tĂ©moigne, notamment, l’épisode de l’entrĂ©e Ă  JĂ©rusalem, oĂč il figure en triomphateur, mais un triomphateur plein de mansuĂ©tude, Ă  l’opposĂ© des princes paĂŻens rĂ©gnant par la violence, puisqu’il se proclame doux et humble de cƓur »119 et fait rĂ©sider la grandeur dans l’humiliation volontaire, et la force dans le fait, non d’infliger l’outrage, mais de s’y exposer, invitant ainsi qui veut ĂȘtre le premier Ă  ĂȘtre le dernier de tous et le serviteur de tous »120. Pour reprendre les mots de saint Ambroise, qui voit en lui le vrai David, vraiment humble et doux, premier et dernier », le Christ-Roi est venu comme maĂźtre d’humilitĂ©, apprendre aux orgueilleux et Ă  ceux qui Ă©taient gonflĂ©s par l’enflure de leur cƓur qu’il faut passer de ces dispositions Ă  la douceur et Ă  l’humilitĂ© »121. 
 Et contre-exemples 122 2 Par. 26, 16-19. 123 4 Regn. 19, 28. 124 2 Macc. 9, 8-12 trad. ƓcumĂ©nique 2004. Sort prĂ©dit par Mattathias, en 1 M ... 36Si la Bible offre aux princes d’admirables modĂšles de comportement, elle est plus riche encore en figures repoussoirs, offertes Ă  leur dĂ©testation. On trouve ainsi dans les Livres historiques RĂšgnes et ParalipomĂšnes une sĂ©rie de mauvais dirigeants dont le vice majeur est presque toujours l’arrogance – arrogance qui les conduit Ă  surestimer leurs forces et Ă  se rendre ainsi coupables d’impiĂ©tĂ©. Tel est le cas d’Ozias, le dixiĂšme roi de Judas 781-740, que Dieu frappe de la lĂšpre, parce qu’ en raison de sa puissance, son cƓur s’est exaltĂ© pour sa perte » et qu’il a osĂ© empiĂ©ter sur les prĂ©rogatives des prĂȘtres122. Par son orgueil, le roi d’Assyrie SennachĂ©rib 705-681 s’attire lui aussi la colĂšre du Tout-Puissant, qui lui adresse ces rĂ©primandes Parce que tu t’es irritĂ© contre moi et que ton insolence Ïáż†ÎœÎż est montĂ©e Ă  mes oreilles, je mettrai un anneau Ă  tes narines et un mors Ă  tes lĂšvres ! »123. Dans les livres des MaccabĂ©es, c’est Antiochos IV Épiphane 175-164 qui est dĂ©crit comme un fils d’arrogance », lui qui croyait, dans sa jactance surhumaine ÎŽÎčᜰ ᜎΜ ᜑπáœČρ áŒ„ÎœÎžÏÏ€ÎżÎœ áŒ€Î»Î±Î¶ÎżÎœÎ”áœ·Î±Îœ, pouvoir commander aux vagues de la mer et s’imaginait peser dans la balance la hauteur des montagnes » frappĂ© par Dieu d’une maladie qui rĂ©duit sa chair en pourriture απρ᜷αΜ, celui qui naguĂšre pensait toucher aux astres du ciel » devient pour tous un objet d’horreur et, brisĂ© par le fouet divin », finit, dĂ©pouillant son excĂšs d’orgueil ᜞ Ï€ÎżÎ»áœș ῆ ᜑπΔρηφαΜ᜷α, par confesser Il est juste de se soumettre Ă  Dieu et, simple mortel, de renoncer Ă  s’égaler Ă  la divinitĂ© »124. 37Mais c’est chez les ProphĂštes que l’on trouve les plus virulentes attaques contre l’arrogance des puissants. Le jour de YahvĂ© », dont IsaĂŻe annonce la venue, est un jour oĂč la hauteur des hommes sera abaissĂ©e et le Seigneur seul exaltĂ© », jour dirigĂ© 125 IsaĂŻe, 2, 11-17 Îșα᜶ απΔÎčΜΞ᜔ΔαÎč ᜞ áœ•ÏˆÎż Μ ጀΜΞρ᜜πΜ, Îșα᜶ ᜑψΞ᜔ΔαÎč Îș᜻ρÎčÎż ÎŒáœčÎœÎż ... contre tous les ĂȘtres insolents et orgueilleux, tous les ĂȘtres hautains et altiers, qui seront abaissĂ©s, contre tous les cĂšdres du Liban, hautains et altiers, contre tous les chĂȘnes de Bashan, contre toutes les montagnes, toutes les collines hautaines, contre toutes les tours hautaines, toutes les murailles hautaines, contre tous les vaisseaux de la mer, tous les bateaux de somptueuse apparence125. 126 IsaĂŻe, 10, 12-15. Le roi en question pourrait ĂȘtre Sargon II 721-705, prĂ©dĂ©cesseur et ... Les foudres du prophĂšte sont plus particuliĂšrement dirigĂ©es contre les souverains Ă©trangers et leurs prĂ©tentions insensĂ©es Est-ce que la cognĂ©e se glorifiera aux dĂ©pens de celui qui s’en sert pour tailler ? », ironise-t-il Ă  propos du roi d’Assyrie, trop fier de sa force, de sa sagesse, de son intelligence126. En un autre passage, il s’en prend au roi de Babylone qui a, dit-il, poussĂ© l’insolence jusqu’à prĂ©tendre rivaliser avec Dieu, et se vantait en ces termes 127 IsaĂŻe, 14, 13-14 Εጰ ᜞Μ ÎżáœÏÎ±ÎœáœžÎœ ጀΜαÎČáœ”ÎżÎŒÎ±Îč, ጐπᜱΜ Μ ጄρΜ οῊ ÎżáœÏÎ±ÎœÎżáżŠ Ξ᜔ ᜞Μ Ξρ ... Je monterai dans les cieux, je hausserai mon trĂŽne au-dessus des Ă©toiles du ciel, je siĂ©gerai sur une haute montagne, parmi les hautes montagnes du nord, je monterai au-dessus des nuages, je serai pareil au TrĂšs-Haut127. 128 Sur ce passage, voir Grelot 1956 qui renvoie Ă  Gordon 1949, 44 texte 49 ... 129 IsaĂŻe, 14, 11-12 et 15. 130 ÉzĂ©chiel, 17, 24 áŒÎłáœŒ Îș᜻ρÎčÎż ᜁ απΔÎčΜΜ ÎŸáœ»Î»ÎżÎœ ᜑψηλ᜞Μ Îșα᜶ ᜑψΜ ÎŸáœ»Î»ÎżÎœ απΔÎčΜáœčΜ. Formule ... 131 ÉzĂ©chiel, 28, 2. Pour tracer ce portrait de monarque en proie Ă  l’hybris, le poĂšte biblique s’est, semble-t-il, inspirĂ© d’un vieux mythe ougaritique racontant la tentative d’usurpation d’ Attar l’arrogant » qui, ayant voulu s’asseoir sur le trĂŽne du dieu El dieu suprĂȘme du panthĂ©on ougaritique et rĂ©gner sur les sommets de SaphĂŽn », fut prĂ©cipitĂ© du haut du ciel128 – tout comme, dans le texte d’IsaĂŻe, le roi de Babylone, Astre Brillant, Fils de l’Aurore », est rejetĂ© par la mort depuis les sommets jusqu’ au plus profond de la terre », oĂč la vermine doit lui servir de matelas et les vers de couverture129. Aux portraits de ces deux monarques mĂ©sopotamiens font Ă©cho, chez ÉzĂ©chiel, auteur de la formule fameuse Je suis le Seigneur qui abaisse l’arbre Ă©levĂ©, qui Ă©lĂšve l’arbre abaissĂ© »130, les portraits du prince de Tyr et de Pharaon ; Dieu abandonne le premier Ă  l’assaut des Ă©trangers, parce que, dans sa superbe, il a mis son cƓur au rang du cƓur de Dieu et dĂ©clarĂ© Je suis un Dieu, j’habite une demeure de dieu au cƓur de la mer »131 ; quant Ă  Pharaon, il est livrĂ© aux mains des chefs des nations » pour avoir Ă©levĂ© sa taille et portĂ© son pouvoir au milieu des nuĂ©es, et son chĂątiment est explicitement destinĂ© Ă  servir d’exemple aux puissants, 132 ÉzĂ©chiel, 31, 10-14. afin qu’aucun arbre bien arrosĂ© ne s’élĂšve en hauteur
, car tous ils sont livrĂ©s Ă  la mort, dans la profondeur de la terre, au milieu des fils d’hommes, auprĂšs de ceux qui descendent dans la fosse132. 133 Daniel, 4, 10 sq. Îșα᜶ áŒ°ÎŽÎżáœș ÎŽáœłÎœÎŽÏÎżÎœ ጐΜ ÎŒáœł ῆ γῆ, Îșα᜶ ᜞ áœ•ÏˆÎż Î±áœÎżáżŠ Ï€ÎżÎ»áœ» ; 4, 17 ... On citera enfin un dernier portrait de monarque Ă  l’ambition sans mesure, dans le livre de Daniel, oĂč Nabuchodonosor le personnage est ici nommĂ©ment dĂ©signĂ© se trouve comparĂ© Ă  un arbre d’une hauteur immense, que le Seigneur abat afin que les vivants reconnaissent que le TrĂšs-Haut est maĂźtre de la royautĂ© des hommes, qu’il la donnera Ă  qui il voudra et y Ă©lĂšvera le plus inexistant des hommes »133. InterprĂ©tation typologique de l’histoire byzantine 134 Voir Pseudo-Maxime, Loci communes, ch. 9 et 34 ΠΔρ᜶ áŒ€ÏÏ‡áż† Îșα᜶ áŒÎŸÎżÏ…áœ·Î± ; ch. 42 ΠΔρ᜶ ... 135 Dagron 1996, 70. 38On comprend que les Byzantins, nourris de ces rĂ©fĂ©rences bibliques, dont la diffusion Ă©tait favorisĂ©e par les florilĂšges oĂč les textes prĂ©cĂ©demment citĂ©s figurent sous forme d’extraits dans les chapitres consacrĂ©s Ă  l’exercice du pouvoir, aux vertus d’humilitĂ© et de douceur » ou au pĂ©chĂ© d’orgueil134, aient vu dans les grandes figures de la Bible des normes de l’action politique – et plus particuliĂšrement dans les figures de l’Ancien Testament qui, comme le souligne Gilbert Dagron, avait Ă  Byzance une valeur constitutionnelle et possĂ©dait la mĂȘme autoritĂ© dans le domaine politique que le Nouveau Testament dans le domaine moral135. C’est donc Ă  l’aune des modĂšles et antimodĂšles vĂ©tĂ©ro-testamentaires que les Byzantins Ă©valuent leur propre histoire, en sorte que tout basileus digne de ce nom passe systĂ©matiquement pour un nouveau David », tandis qu’aux ennemis de l’Empire, intĂ©rieurs ou extĂ©rieurs, est attribuĂ© l’orgueil qui, dans le texte biblique, est une caractĂ©ristique majeure du mauvais prince. 136 Voir Dulaey 1999. L’ arrogance » ÎłÎ±Ï…Ïáœ·Î±ÎŒÎ± de Goliath est explicitement mentionnĂ©e da ... 137 Augustin, Enarr. in Ps. 33, 1, 4 Dekkers & Fraipont 1956, 276 Humilitas occidit s ... 138 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. 1, 82 Vogt 1939, 167 course hippique de ... 139 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. 1, 78 Vogt 1939, 136. 39Les PĂšres de l’Église avaient vu dans le premier exploit de David, sa victoire sur le gĂ©ant Goliath, un symbole du triomphe de l’homme humble sur l’arrogant136 L’humilitĂ© a tuĂ© l’orgueil », dit Augustin137. Cette victoire, inaugurale, de l’humilitĂ© sur l’orgueil fournit le schĂ©ma bipolaire en fonction duquel seront interprĂ©tĂ©s tous les affrontements du prĂ©sent – schĂ©ma auquel se conforment mĂȘme les acclamations reproduites dans le Livre des CĂ©rĂ©monies, puisqu’elles placent le basileus sous le patronage daviditique de la πραáœčη et vouent l’adversaire au gouffre de l’orgueil. À l’empereur vont les bĂ©nĂ©dictions de la foule Votre Ville, refleurissant, un tel, Autokrator, prie, comme elle le doit, en voyant votre douceur πραáœčηα. Elle vous appelle un autre David »138 ; Ă  l’ennemi sont rĂ©servĂ©es des imprĂ©cations de ce genre Gloire Ă  Dieu qui a jetĂ© dans la honte l’arrogance ᜞ Ï†Ïáœ»Î±ÎłÎŒÎ± d’un tel, l’ennemi du Christ ΧρÎčÎżÎŒáœ±Ï‡ÎżÏ… »139. 140 Le titre du discours est, Ă  soi seul, tout un programme De l’attaque insensĂ©e des A ... 40On pourrait citer, chez les historiens byzantins, beaucoup d’exemples du mĂȘme scĂ©nario manichĂ©en, oĂč c’est prĂ©cisĂ©ment la dĂ©mesure qui trace la ligne de partage entre les bons et les mĂ©chants. Je me contenterai de trois exemples empruntĂ©s Ă  trois Ă©poques diffĂ©rentes de l’histoire de Byzance. Le premier figure chez ThĂ©odore le Syncelle, dans un discours prononcĂ© le 7 aoĂ»t 627 pour cĂ©lĂ©brer la victoire de l’empereur HĂ©raclius sur les Avares, qui assiĂ©geaient Constantinople140 le Khagan des Avares y est dĂ©peint comme un homme orgueilleux et vantard » § 11 ᜑπΔρáœčπηΜ Îșα᜶ ጀλαζáœčΜα, un second SalmonĂ©e » personnage citĂ©, rappelons-le, dans le Basilikos Andrias de BlemmydĂšs, pour illustrer les dangers de l’orgueil ; cet infĂąme tyran », qui se faisait fort de prendre la ville et de la dĂ©peupler tout entiĂšre § 21, a Ă©tĂ© vaincu par un empereur dont la piĂ©tĂ© ΔᜐΔÎČÎ”áœ·áŸł et la douceur πραáœčηÎč font un autre David, et qu’ Ă  l’exemple de David » le Seigneur orne de victoires » § 52. 41Chez l’historienne Anne ComnĂšne qui, dans son Alexiade, nous raconte les dĂ©mĂȘlĂ©s de son pĂšre Alexis Ier ComnĂšne avec les CroisĂ©s, l’opposition entre orgueil et humilitĂ© sous-tend la majoritĂ© des portraits des princes occidentaux et du basileus. De la dĂ©mesure congĂ©nitale » des chefs croisĂ©s, le Normand TancrĂšde offre un plaisant exemple s’étant rendu maĂźtre d’Antioche, 141 Anne ComnĂšne, Alexiade, 14, 2, 4 Leib 1946. La formule fardeau de la terre » áŒ„Ï‡ÎžÎż ... ce barbare furieux et dĂ©ment
, gonflĂ© de vanitĂ© áŒ€Î»Î±Î¶ÎżÎœÎ”áœ·Î±, se vanta de placer son trĂŽne au-dessus des Ă©toiles, menaça de percer avec la pointe de sa lance les remparts de Babylone, parla avec assurance et grandiloquence de sa puissance, disant qu’il Ă©tait aussi intrĂ©pide qu’irrĂ©sistible dans son attaque, et affirma que, quoi qu’il arrivĂąt, il ne rendrait pas Antioche, mĂȘme si les soldats qui devaient le combattre avaient des mains de feu lui Ă©tait Ninos, le grand Assyrien, tel un grand gĂ©ant Ă  qui il est impossible de rĂ©sister, toujours debout sur le sol comme un fardeau de la terre », tandis que les Romains n’étaient tous, Ă  son avis, que des fourmis et les plus chĂ©tifs des vivants141. L’humilitĂ© du basileus Alexis, en revanche, ne se dĂ©ment jamais, depuis son avĂšnement jusqu’à sa derniĂšre heure. Le fait mĂȘme qu’il soit arrivĂ© au pouvoir Ă  la suite d’un coup d’État est, pour Anne ComnĂšne, prĂ©texte Ă  mettre en valeur la pĂ©nitence publique de l’empereur, qui d’emblĂ©e s’identifie ainsi Ă  David pĂ©cheur et repentant 142 Anne ComnĂšne, Alexiade, 3, 5, 1 Leib 1937. L’invite au repentir s’imposait au basileu ... Être irrĂ©prĂ©hensible conduit parfois au fol orgueil ጀπáœčÎœÎżÎčαΜ celui qui n’a jamais achoppĂ© contre quoi que ce soit. Quant au pĂ©cheur, pourvu qu’il soit de ceux qui sont pieux et rĂ©flĂ©chis, il sent aussitĂŽt son Ăąme envahie par la crainte de Dieu ; il est tout bouleversĂ©, il a peur, et cela d’autant plus qu’il a entrepris de grandes choses et qu’il est montĂ© au faĂźte des honneurs. Car il est effrayĂ© par la crainte de tourner contre lui la colĂšre de Dieu en agissant avec ignorance, tĂ©mĂ©ritĂ© et insolence áŒ€ÎŒÎ±Îžáœ·áŸł Îșα᜶ ΞρᜱΔÎč Îșα᜶ ᜕ÎČρΔÎč et de perdre, aprĂšs avoir Ă©tĂ© prĂ©cipitĂ© du pouvoir, ce qu’il a tenu jusque-lĂ . C’est aussi bien ce qui arriva Ă  SaĂŒl Dieu, Ă  cause de la folle prĂ©somption ᜞ áŒ€áœ±ÎžÎ±Î»ÎżÎœ de ce roi, brisa son empire en deux142. Si Alexis a l’humilitĂ© de David, il a aussi la patience du Christ, et notre historienne n’hĂ©site pas Ă  le comparer trĂšs explicitement au Sauveur crucifiĂ© – dĂ©plorant l’ingratitude dont son pĂšre fut trop souvent payĂ©, 143 Anne ComnĂšne, Alexiade, 14, 3, 6 Leib 1946. On notera comment la geste de MoĂŻse est p ... comme jadis l’avait Ă©tĂ© Ă©galement le bienfaiteur du genre humain, le Seigneur, qui fit pleuvoir la manne dans le dĂ©sert, qui rassasia les foules sur les montagnes, qui fit passer la mer Ă  pied sec, et qui aprĂšs cela fut reniĂ©, insultĂ© ᜑÎČρÎčζáœčÎŒÎ”ÎœÎż, frappĂ©, pour ĂȘtre finalement condamnĂ© Ă  la croix par des impies143. 144 Michel ChoniatĂšs, Or. 14 Lampros 1879, 246. 42Chez Michel ChoniatĂšs, c’est le rebelle byzantin Alexis Branas qui, dans un discours d’éloge adressĂ© Ă  l’empereur Isaac II Ange 1185-1195, est comparĂ© Ă  Absalom pour s’ĂȘtre soulevĂ© contre le souverain lĂ©gitime, notre David », ce doux fleuve de paix », qui sut garder sa sĂ©rĂ©nitĂ© face Ă  l’adversaire, parce qu’il avait confiance en Dieu et possĂ©dait la douceur de David » ; la tentative d’usurpation de Branas est assimilĂ©e Ă  un acte de dĂ©mesure il a dĂ©sirĂ© inconsidĂ©rĂ©ment ce qui n’était pas fait pour lui » Μ Îżáœ Ï€ÏÎżÎ·ÎșáœčΜΜ et, nouveau SalmonĂ©e », s’est vouĂ© Ă  une mort misĂ©rable du fait de son orgueilleuse exaltation » οῊ áœ‘Ï€Î”ÏÎ·Ï†áœ±ÎœÎżÏ… ΌΔΔρÎčÎŒÎżáżŠ144. L’accusation de dĂ©mesure arme polĂ©mique 43L’accusation de dĂ©mesure est donc utilisĂ©e par les Ă©crivains byzantins comme une arme polĂ©mique, pour mieux stigmatiser l’adversaire. Les invectives de GrĂ©goire de Nazianze contre Julien nous offrent une illustration du procĂ©dĂ©, puisqu’on y voit l’auteur chrĂ©tien comparer, dans sa premiĂšre invective, l’empereur apostat aux princes orgueilleux de l’Ancien Testament, Nabuchodonosor ou Antiochos Épiphane, et flĂ©trir son arrogance, en s’appuyant sur l’enseignement des Écritures 145 GrĂ©goire de Nazianze, Or. 4, 32 Bernardi 1983 cf. Prov. 16, 18 et 3, 34. Pour une Ă© ... L’arrogance marche devant la ruine, disent justement les Proverbes
 Car le Seigneur s’oppose aux orgueilleux, mais il donne sa grĂące aux humbles
 C’est parce qu’il savait cela que David, sous l’inspiration divine, met au nombre des avantages qu’il a reçus le fait d’avoir Ă©tĂ© abaissĂ©145. 146 GrĂ©goire de Nazianze, Or. 5, 8 Bernardi 1983 Mais lui, excitĂ© et aiguillonnĂ© par ... Dans la seconde invective, vient se superposer aux rĂ©fĂ©rences vĂ©tĂ©ro-testamentaires une allusion mythologique qui nous est, elle aussi, familiĂšre GrĂ©goire accuse en effet l’empereur Julien d’avoir agi en nouveau SalmonĂ©e », en se lançant prĂ©somptueusement dans une expĂ©dition contre les Perses, Ă  l’imitation de Trajan ou d’Hadrien146. 147 Adversus Constantinum Cabalinum, 23 PG, 95, col. 341 texte citĂ© par Dag ... 148 Cf. Attar 2006. 44À l’époque de la querelle iconoclaste, ce sont les empereurs hostiles aux images qui, bien souvent, furent accusĂ©s par leurs adversaires iconophiles de cĂ©der Ă  la dĂ©mesure. Gilbert Dagron cite en exemple les Invectives contre Constantin Kaballinos, oĂč LĂ©on III 717-741, partisan de l’iconoclasme, est jugĂ© coupable d’avoir rompu avec la tradition des bons empereurs » par excĂšs d’orgueil, devenant la proie du mĂȘme Satan qui avait dit Ă  Adam Si tu manges des fruits de cet arbre, tu deviendras Dieu », et qui lui a dit Ă  son tour Le jour oĂč tu aboliras la vĂ©nĂ©ration des images, tu seras heureux et tu surpasseras tous les rois de la terre par l’intelligence et par le nombre des annĂ©es »147 en partant en guerre contre les images, LĂ©on III a donc rĂ©itĂ©rĂ© le pĂ©chĂ© originel – pĂ©chĂ© dont Jamel Attar a montrĂ©, dans son article sur GrĂ©goire de Nazianze, quel lien il entretenait avec l’hybris148. 149 Sur cette affaire, Ă  l’origine de vives tensions entre pouvoir impĂ©rial et milieux ... 45Un dernier exemple nous permettra d’observer comment l’accusation de dĂ©mesure est rĂ©versible Ă  volontĂ©. L’épisode incriminĂ© se passe au XIIe siĂšcle, et met aux prises l’empereur Alexis Ier ComnĂšne et l’évĂȘque de ChalcĂ©doine LĂ©on pour essayer de remĂ©dier Ă  la pĂ©nurie du trĂ©sor impĂ©rial, Alexis avait ordonnĂ© la saisie de biens ecclĂ©siastiques, et l’évĂȘque LĂ©on rĂ©agit en l’accusant d’hybris, parce qu’il avait osĂ© faire main basse sur des objets prĂ©cieux appartenant Ă  l’Église149 ; mais dans la version des Ă©vĂ©nements fournie par Anne ComnĂšne, version bien Ă©videmment destinĂ©e Ă  soutenir le bon droit de l’empereur, il est intĂ©ressant de constater que l’accusation d’hybris, toujours prĂ©sente, a changĂ© de camp, et vise dĂ©sormais l’évĂȘque, dont l’historienne dĂ©nonce le comportement plein de morgue 150 Anne ComnĂšne, Alexiade, 5, 2, 4 Leib 1943. Ce fut avec assez d’insolence ᜑÎČρÎčÎčÎșáœœÎ”ÏÎżÎœ et, pour ainsi dire, en rĂ©voltĂ© ጀαÎșáœčÎ”ÏÎżÎœ, que se conduisit Ă  l’égard du souverain alors rĂ©gnant, abusant de sa patience ጀΜΔΟÎčÎșαÎșáœ·áŸł et de sa bontĂ© φÎčÎ»Î±ÎœÎžÏÏ€áœ·áŸł150. Le renversement opĂ©rĂ© par Anne ComnĂšne illustre clairement, me semble-t-il, l’importance accordĂ©e par les Byzantins Ă  la question de l’hybris et le poids des grands modĂšles bibliques dans leur reprĂ©sentation du pouvoir l’ጀΜΔΟÎčÎșαÎș᜷α est une vertu proprement davidique. Conclusion 151 Barker 1957, 29. 152 Eschyle, Perses, 827-828. 153 Les byzantinistes français, qui travaillaient alors sans relĂąche, se firent, bon grĂ© ... 154 Bossuet, Politique
, PrĂ©face », in ƒuvres complĂštes, IX, 700. 46Le jeu de rĂŽles auquel Ă©tait soumis, Ă  Byzance, chaque basileus successif possĂ©dait une valeur hautement contraignante, et c’est pourquoi l’historien Ernest Barker est en droit d’affirmer que l’empereur byzantin n’exerçait finalement qu’une autocratie limitĂ©e »151. Les Grecs du Moyen Âge paraissent, au bout du compte, n’avoir pas Ă©tĂ© moins hantĂ©s que ceux de l’époque classique par le spectre de l’hybris, et le Dieu de la Bible a, pour ainsi dire, pris le relais du Zeus d’Eschyle, ce vengeur des pensĂ©es trop prĂ©somptueuses », terrible redresseur de comptes »152 ainsi les leçons de l’Écriture Sainte viennent-elles complĂ©ter et parfaire celles de la tragĂ©die grecque sur la question de la dĂ©mesure. De l’utilisation du texte biblique comme parade contre les dĂ©rives absolutistes, les Byzantins n’ont Ă©videmment pas eu l’exclusive ; au XVIIe siĂšcle, Bossuet, qui fut le prĂ©cepteur du fils de Louis XIV – Ă  qui l’Empire grec d’Orient, mis Ă  la mode par l’essor des Ă©tudes byzantines, a servi de modĂšle politique153 –, adresse au Dauphin, dans sa Politique tirĂ©e des propres paroles de l’Écriture Sainte, des mises en garde qui rappellent d’étonnamment prĂšs celles des miroirs des princes prĂ©cĂ©demment Ă©voquĂ©s Dieu est le roi des rois »154, dit-il, et si la majestĂ© est l’image de la grandeur de Dieu dans le prince », celui-ci ne doit pas pour autant oublier ce qu’il est ; citant un passage du Psaume 81 – Vous ĂȘtes des dieux, et vous ĂȘtes tous enfants du TrĂšs-Haut ; mais vous mourrez comme des hommes, et vous tomberez comme les grands » –, Bossuet commente en ces termes les versets bibliques 155 Bossuet, Politique
, livre V, Article IV, 1re prop., ibid., 830. Vous ĂȘtes des dieux, c’est-Ă -dire vous avez dans votre autoritĂ©, vous portez sur votre front un caractĂšre divin. Vous ĂȘtes les enfants du TrĂšs-Haut c’est lui qui a Ă©tabli votre puissance pour le bien du genre humain. Mais, ĂŽ dieux de chair et de sang, dieux de boue et de poussiĂšre, vous mourrez comme des hommes, et vous tomberez comme les grands. La grandeur sĂ©pare les hommes pour peu de temps ; une chute commune Ă  la fin les Ă©gale tous. Ô rois, exercez donc hardiment votre puissance ; car elle est divine et salutaire au genre humain ; mais exercez-la avec humilitĂ©. Elle vous est appliquĂ©e par le dehors. Au fond, elle vous laisse faibles ; elle vous laisse mortels ; elle vous laisse pĂ©cheurs, et vous charge devant Dieu d’un plus grand compte155. Haut de page Bibliographie Textes anciens156 Bible Septuaginta id est Vetus Testamentum Graece iuxta LXX interpretes, A. 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Julien cite et commente longuement ce passage de Platon dans l’ÉpĂźtre Ă  ThĂ©mistios oĂč, immĂ©diatement aprĂšs son accession au pouvoir, il exprime ses craintes de n’ĂȘtre pas Ă  la hauteur de ses nouvelles fonctions – l’exercice de la royautĂ© excĂ©dant, dit-il, les forces de l’homme Or. 6, 257 d – 259 b. 4 Affirmation similaire dans l’opuscule À un chef mal Ă©duquĂ©, 6 Le vice, dont la course est accĂ©lĂ©rĂ©e par le pouvoir, dĂ©chaĂźne toutes les passions, rendant la colĂšre meurtriĂšre, l’amour adultĂšre, la cupiditĂ© spoliatrice ». 5 Dion Chrysostome, Or. 57 Nestor, 6-8 Agamemnon et Achille ont pĂ©chĂ© par insolence ÎŽÎč ̓ ᜕ÎČρÎčΜ – sentiment auquel les hommes cĂšdent, exaltĂ©s par la gloire ou le pouvoir » Ύ᜻ΜαΌÎčΜ ; c’est le pouvoir de la royautĂ© et le fait de diriger Ă  lui seul tous les Grecs » qui a rendu Agamemnon arrogant, l’a fait sombrer dans l’orgueil áœ»Ï†ÎżÏ… et la folie ; Or. 61 ChrysĂ©is, 12-13 Agamemnon est exaltĂ© par le pouvoir » ÎŽÎčᜰ ᜎΜ ጀρχᜎΜ ጐπαÎčρáœčÎŒÎ”ÎœÎż, il est orgueilleux » áœ‘Ï€Î”Ïáœ”Ï†Î±ÎœÎż et insolent » ᜑÎČρÎč᜔. 6 Acte II, scĂšne 3, Ă©d. de Paris 1877, 350. Texte prĂ©sentĂ© par Delouis 2003, 104-105. 7 Cf. Barker 1957, 28-29. Dans la Novelle 105, 2, en affirmant que Dieu a subordonnĂ© les lois Ă  la tychĂȘ impĂ©riale, Ă©rigĂ©e au rang de loi vivante » ΜáœčÎŒÎżÎœ áŒ”ÎŒÏˆÏ…Ï‡ÎżÎœ, Justinien proclame la supĂ©rioritĂ© de l’ Ă©conomie » sur la lĂ©gislation Schoell & Kroll 1954, 507. La novelle 47 de LĂ©on VI 886-911 renforça encore l’autoritĂ© de l’empereur, en abolissant les pouvoirs que le SĂ©nat possĂ©dait par le passĂ© de nommer des stratĂšges et autres magistrats, sous prĂ©texte qu’ aujourd’hui, toutes les choses dĂ©pendent de la sollicitude de l’empereur ῆ ÎČαÎčλÎčÎșῆ Ï†ÏÎżÎœáœ·ÎŽÎż et sont, grĂące Ă  Dieu, examinĂ©es et dirigĂ©es par le soin providentiel Ï€ÏÎżÎœÎżáœ·áŸł de cette sollicitude » Zachariae von Lingenthal 1931, 116-117. 8 Voir Guilland 1959. 9 NicĂ©tas ChoniatĂšs, Historia rĂšgne d’Isaac Ier Ange, van Dieten 1975, 366 áŒÎœÎ·ÎŒÎ±ÎœÎžáœłÎœÎ± χΔÎčρ᜶ ΞΔοῊ. 10 EusĂšbe de CĂ©sarĂ©e, Louanges de Constantin, 1, 3 Celui qui est pour nous le grand roi Dieu est vĂ©ritablement l’auteur du pouvoir royal » ; 2, 1 l’empereur tire ses prĂ©rogatives des Ă©manations royales d’en haut et sa puissance de l’attribution d’un titre divin » ; 2, 4 il est interprĂšte du Logos de Dieu » ; 3, 5 ParĂ© de l’image de la royautĂ© cĂ©leste, regardant vers le haut, gouverne et dirige ceux d’en bas Ă  la maniĂšre de son modĂšle » Maraval 2001. 11 Cf. Guilland 1959, 218. L’iconographie du pouvoir reflĂšte elle aussi cette idĂ©ologie thĂ©ocratique, comme le montre le thĂšme, souvent exploitĂ© Ă  l’époque macĂ©donienne, du couronnement symbolique de l’empereur par le Christ ou par une figure dĂ©lĂ©guĂ©e Vierge, ange ou saint voir Jolivet-LĂ©vy 1987, 445-449. 12 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. I, 9 Vogt 1935, 55. 13 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. I, 74 Vogt 1939, 102. 14 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. 1, 78 Vogt 1939, 130-131. 15 Sur l’importance de la notion d’ ordre » dans l’idĂ©ologie byzantine, voir Ahrweiler 1975, 134-135 le terme ordre » taxis a jouĂ© Ă  Byzance le rĂŽle qu’avait dans l’AntiquitĂ© le terme mesure » metron. 16 Denys l’ArĂ©opagyte, HiĂ©rarchie cĂ©leste, 3, 1-2 Roques, Heil & de Candillac 1958. 17 Treitinger 1938, 49-123. TĂ©moin de cette formalisation des rituels, dont la mise en place remonte Ă  l’AntiquitĂ© tardive, SynĂ©sios, dans son discours Sur la royautĂ©, critique violemment ce qu’il considĂšre comme une dĂ©rive barbare ; il dĂ©nonce l’apprĂ©hension qu’ont les empereurs de se ravaler au rang de simples mortels » en se rendant accessibles Ă  tous Vous ressemblez, dit-il, au prisonnier qui, sous des chaĂźnes et des biens d’une inestimable valeur, ne comprendrait pas sa misĂšre
 Vous menez la vie recluse de lĂ©zards hĂ©sitant Ă  tirer la tĂȘte Ă  la lumiĂšre, de crainte que les hommes ne constatent que vous ĂȘtes des hommes comme eux » 1076 c et 1080 b-c Lacombrade 1951. 18 Dagron 2002, 30. Aux Xe-XIe siĂšcles encore, le mutisme de l’empereur est presque absolu lors des rĂ©ceptions officielles c’est un maĂźtre des cĂ©rĂ©monies qui, normalement, parle en son nom ; les quelques exceptions figurant dans le Livre des CĂ©rĂ©monies sont des cas oĂč l’empereur se contente de prononcer un seul mot
 en latin cf. Grabar 1971, 200. 19 Cf. Guilland 1959. 20 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. 1, 47 Vogt 1939, 2. 21 Cf. Guilland 1966-1967, 258. 22 Voir par exemple CĂ©r. 1, 1 Vogt 1935, 10-11 et 26 procession Ă  la Grande Église ; 1, 32 Vogt 1935, 122 fĂȘte de la Sainte Naissance ; 1, 35 Vogt 1935, 134 fĂȘte des LumiĂšres ; 1, 45 Vogt 1935, 174 cortĂšge de l’union de l’Église. 23 Dagron 1996, 104, 116. 24 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. 1, 69 Vogt 1939, 84-85. 25 Sur l’akakia, voir Treitinger 1938, 117 ; Kazhdan 1991. 26 Cf. CĂ©r. 1, 1 Vogt 1935, 20 tenue de l’empereur le jour de PĂąques ; 1, 9 Vogt 1935, 57 tenue de l’empereur lors de la fĂȘte de la PentecĂŽte ; 1, 46 Vogt 1935, 175 tenue des souverains lors des fĂȘtes et cortĂšges. 27 Cf. Underwood & Hawkins 1961, 195-196 et fig. 1 et 8. L’akakia est Ă©galement figurĂ©e sur diverses monnaies byzantines Constantin V, Constantin VIII
, et on la distingue nettement dans certaines miniatures reprĂ©sentant des empereurs en costume d’apparat Jean VI CantacuzĂšne dans le Par. gr. 1242 cf. Grabar 1936, pl. VI, 2 et XXII, 2 ; Grabar 1953, 184. 28 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. 2, 40 Reiske 1829, 638. Voir Dagron 1996, 350. 29 Pseudo-Kodinos, TraitĂ© des offices, ch. IV, Verpeaux 1966, 201-202 CĂ©rĂ©monial des fĂȘtes du Seigneur ». Sur ce texte, voir Grabar 1971. 30 SymĂ©on de Thessalonique, De sancto templo, ch. 148, PG, 155, col. 356 
 ᜎΜ ጀÎșαÎș᜷αΜ, ᜅπΔρ Ï‡ÎżáżŠ ጐÎčΜ ጐΜ ΌαΜΎυλ᜷, Î·ÎŒÎ±áż–ÎœÎżÎœ ᜞ φΞαρ᜞Μ ῆ áŒ€ÏÏ‡áż† Îșα᜶ ᜎΜ ጐÎș Îżáœ»ÎżÏ… απΔ᜷ΜÎčΜ. 31 LĂ©ontios de NĂ©apolis, Vie de Jean de Chypre, chap. 17, FestugiĂšre & Ryden 1974, 365 texte grec et 467 traduction. 32 Cf. Vasiliev 1932, 159. 33 Sur les cĂ©rĂ©monies du triomphe, voir Cagnat 1919 ; Ehlers 1939 ; Versnel 1970 ; Scheid 1986. 34 Cf. Pline, NH, 33, 111 ; Tite-Live, 10, 7, 10. 35 Pline, NH, 28, 39 l’effigie du dieu Fascinus est suspendue sous le char des triomphateurs en guise de mĂ©decin contre l’envie » invidia, tandis qu’ une voix ayant pareille fonction curatrice leur ordonne de se retourner afin de conjurer derriĂšre eux la Fortune, ce bourreau de la gloire » ; Tertullien, ApologĂ©tique, 33, 4 On rappelle qu’il est un homme, le jour mĂȘme du triomphe, quand il est assis sur le plus sublime des chars ; dans son dos, on lui suggĂšre “Regarde derriĂšre toi ! Souviens-toi que tu es homme” » ; JĂ©rĂŽme, Ep. 39, 2, 8 Ă  propos de saint Paul et son Ă©charde dans la chair » Pour abaisser la superbe des rĂ©vĂ©lations, il lui est adjoint une sorte de moniteur de l’humaine faiblesse, comme c’était le cas pour les triomphateurs, aux cĂŽtĂ©s desquels se tenait, Ă  l’arriĂšre du char, un compagnon qui, chaque fois que les citoyens poussaient des acclamations, disait “Souviens-toi que tu es un homme !” » ; Isidore de SĂ©ville, s’étant mĂ©pris sur le sens du texte de Pline, imagine les triomphateurs flanquĂ©s d’un bourreau » carnifice, destinĂ© Ă  leur rappeler la mĂ©diocritĂ© humaine » Étym. 18, 2, 6. 36 ÉpictĂšte, Entretiens, 3, 24, 85 Fais obstacle Ă  la maniĂšre de ceux qui se tiennent en arriĂšre des triomphateurs et leur rappellent qu’ils sont des hommes » ; Dion Cassius, 6, 21 ap. Zonaras, 7, 21, 9 description du triomphe de Camille, en 396 avant Un serviteur public se tenait sur le char, Ă  ses cĂŽtĂ©s, soutenant sa couronne de pierres prĂ©cieuses serties d’or, et il lui disait “Regarde derriĂšre toi ᜀπ᜷ ÎČÎ»áœłÏ€Î” ᜞ ÎșαáœčπÎčΜ, songe Ă  la suite de ton existence, ne te laisse pas exalter par le prĂ©sent, ne sois pas arrogant !” ; au char Ă©taient attachĂ©s une clochette et un fouet, pour lui montrer qu’il pouvait lui aussi connaĂźtre le malheur au point de subir des outrages et d’ĂȘtre condamnĂ© Ă  mort car il Ă©tait d’usage que les gens condamnĂ©s Ă  mort pour quelque offense portent une clochette, afin que nul ne contracte de souillure, en tombant sur eux en cours de route » ; on retrouve les mĂȘmes dĂ©tails chez TzetzĂšs, Ep. 97 et Chil. 13, hist. 461. Par ailleurs, il semble qu’Élien, auteur latin d’expression grecque, se soit souvenu des usages du triomphe romain lorsqu’il attribue Ă  Philippe de MacĂ©doine les prĂ©cautions suivantes contre l’hybris AprĂšs avoir vaincu les AthĂ©niens Ă  ChĂ©ronĂ©e, Philippe, bien qu’exaltĂ© par le succĂšs, contint nĂ©anmoins sa pensĂ©e et ne se montra pas arrogant ÎżáœÏ‡ ᜕ÎČρÎčΔ. C’est prĂ©cisĂ©ment pourquoi il jugea nĂ©cessaire de se faire rappeler dĂšs l’aube par l’un de ses esclaves qu’il Ă©tait un homme, et il commanda Ă  cet esclave de se vouer Ă  la tĂąche en question. À ce que l’on dit, lui-mĂȘme ne sortait pas, et aucun de ceux qui venaient le solliciter ne l’approchait, avant que l’esclave ne lui eĂ»t, chaque jour, criĂ© Ă  trois reprises cet avertissement. Il lui disait “Philippe, tu es un homme !” » HV, 8, 15. 37 Cf. SuĂ©tone, CĂ©sar, 49 ; Denys d’Halicarnasse, AR, 7, 72, 11. 38 SĂ©minaire du 3 octobre 1996 CollĂšge de France. 39 Choricios de Gaza, Λáœčγο ᜑπáœČρ Μ ጐΜ ΔÎčÎżÎœáœ»ÎżÏ… ᜞Μ ÎČáœ·ÎżÎœ ΔጰÎșÎżÎœÎčζáœčΜΜ, 119-122 Förster & Richtsteig 1972, 371-372. 40 RĂ©cit sur la construction du temple de la Grande Église, 5 Preger 1901, 80 ; trad. Dagron 1984, 198-199. 41 Cf. Dagron 1984, 222. 42 Pseudo-Kodinos, TraitĂ© des offices, XII, Verpeaux 1966, 228-229. Sur cette cĂ©rĂ©monie, voir Treitinger 1938, 126-128 ; il s’agit d’un rite ancien importĂ© » tardivement au palais impĂ©rial il Ă©tait, semble-t-il, en usage Ă  l’église dĂšs la fin du IVe siĂšcle voir PĂ©tridĂšs 1899. 43 Jean, 13, 16 Osty & Trinquet 1974. 44 Voir Grabar 1971, 200-201. 45 Cf. Hunger 1978, 157-165 ; Blum 1981. 46 Formule empruntĂ©e Ă  Prinzing 1988. 47 L’Ekthesis d’Agapet est destinĂ©e Ă  Justinien 527-565, le Λáœčγο ÎœÎżÏ…ÎžÎ”Î·ÎčÎș᜞ πρ᜞ ÎČαÎčÎ»áœłÎ± fut peut-ĂȘtre composĂ© Ă  l’intention d’Alexis Ier ComnĂšne 1081-1118. 48 L’archevĂȘque ThĂ©ophylacte de Bulgarie s’adresse Ă  Constantin Doukas, fils de l’empereur Michel VII 1071-1078 ; NicĂ©phore BlemmydĂšs Ă©crit pour le futur empereur ThĂ©odore II Laskaris 1254-1258 ; 49 Thomas Magister destine son miroir des princes au jeune Constantin, fils d’Andronic II PalĂ©ologue 1282-1328. ThĂ©ophylacte et Thomas Magister Ă©taient les prĂ©cepteurs respectifs de Constantin Doukas et Constantin PalĂ©ologue. 49. Il s’agit des discours de Justin II Ă  TibĂšre a. 574 et de TibĂšre Ă  Maurice a. 582 chez ThĂ©ophylacte SimokattĂšs Historiae, 1, 1, 5-20 et 3, 11, 8-11, du discours de Joasaph Ă  Barachias dans Barlaam ch. 36, § 331-335. 50 Voir Anastasi 1976. 51 Sur la postĂ©ritĂ© d’Agapet, voir Sevcenko 1978. 52 Voir Sevcenko 1954. 53 Cf. Sevcenko 1954, 163-164. 54 Cf. Gautier 1980, 48. 55 Cf. Dujcev 1965, 117-118. 56 Édition synoptique des deux textes par Hunger 1986. 57 Cf. Hadot 1969. 58 Manuel II PalĂ©ologue, Praecepta, PG, 156, col. 317. 59 Isocrate, À NicoclĂšs, 37. 60 Ap. StobĂ©e, 6, 22 Delatte 1942, 26 texte grec et 47 traduction. Delatte place la composition du traitĂ© d’Ecphante Ă  une date assez rĂ©cente Ier ou IIe siĂšcle aprĂšs 61 Le poids des modĂšles antiques est particuliĂšrement sensible dans le dĂ©veloppement oĂč ThĂ©ophylacte prĂ©sente Ă  son jeune Ă©lĂšve les traits distinctifs de la tyrannie et de la royautĂ© et trace un portrait classique de tyran qui ne fait confiance Ă  personne, n’a aucun ami, se rend ou suppose tous les hommes ennemis » et ne cesse de couper les Ă©pis dont la tĂȘte dĂ©passe » Gautier 1980, 196 – souvenir Ă©vident du passage cĂ©lĂšbre oĂč HĂ©rodote Ă©voque le conseil du tyran Thrasybule Ă  PĂ©riandre 5, 92. 62 C’est en raison mĂȘme de cette ambivalence que l’Ekthesis a pu ĂȘtre exploitĂ©e au XVIe siĂšcle Ă  la fois par les partisans du tsar Ivan le Terrible et par ses adversaires, les premiers gommant tout ce qui avait trait Ă  la fragilitĂ© de l’empereur en tant qu’homme, tandis que les seconds insistaient au contraire sur l’aspect humain du prince ! Voir Sevcenko 1954, 173-178. 63 Agapet, Ekthesis, ch. 21. Ce passage a Ă©tĂ© intĂ©gralement repris dans Barlaam pour caractĂ©riser Joasaph ch. 33, § 306 ; par ailleurs, il est citĂ© dans les Loci communes du Pseudo-Maxime ch. 9, no 72 /75 et no 73 / 76 et dans le florilĂšge d’Antoine Melissa, qui en attribue indĂ»ment la paternitĂ© Ă  Philon d’Alexandrie II, 2, col. 1012 B. 64 Dagron 1996, 37-38. Voir Marc AurĂšle, PensĂ©es, 4, 48 ConsidĂ©rer sans cesse
 combien de tyrans qui, avec un terrible orgueil Ï†ÏÏ…áœ±ÎłÎŒÎ±Îż, comme s’ils Ă©taient immortels, avaient abusĂ© de leur pouvoir sur la vie des hommes » ; 8, 5 Dans peu de temps, tu ne seras rien nulle part, pas plus qu’Hadrien ou Auguste » ; 8, 25 Se souvenir qu’il faudra soit que ton ĂȘtre composite se disperse, soit que ton souffle s’éteigne ou s’en aille et soit affectĂ© ailleurs ». 65 Gen. 3, 19 Dogniez et al. 2001. 66 Gen. 18, 27 áŒÎłáœœ ΔጰΌÎč γῆ Îșα᜶ Ï€ÎżÎŽáœč. 67 Job, 10, 9 πηλáœčΜ ΌΔ ጔπλαα, Δጰ ÎŽáœČ Îłáż†Îœ ΌΔ πᜱλÎčΜ áŒ€Ï€ÎżÏáœłÏ†Î”Îč ; 30, 19 áŒ„ÎłÎ·Î±Îč ÎŽáœł ΌΔ ጎα πηλ͂, ጐΜ γῇ͂ Îșα᜶ Ï€ÎżÎŽÍ‚ ÎŒÎżÏ… áŒĄ ÎŒáœłÏÎč. 68 Sag. 7, 1 ΕጰΌ᜶ ÎŒáœČΜ ÎșáŒ€ÎłáœŒ ΞΜη᜞ áŒ„ÎœÎžÏÏ€Îż, áŒŽÎż ጅπαÎčΜ Îșα᜶ ÎłÎ·ÎłÎ”ÎœÎżáżŠ ጀπáœčÎłÎżÎœÎż Ï€ÏÎżÏ€Î»áœ±ÎżÏ…. 69 Sir. 10, 9-11 ᜷ ᜑπΔρηφαΜΔ᜻ΔαÎč γῆ Îșα᜶ Ï€ÎżÎŽáœč ; 17, 32 áŒ„ÎœÎžÏÏ€ÎżÎč πᜱΜΔ γῆ Îșα᜶ Ï€ÎżÎŽáœč. La plupart des formules qui viennent d’ĂȘtre citĂ©es n. 65-69 ont Ă©tĂ© abondamment exploitĂ©es dans les homĂ©lies des PĂšres de l’Église notamment chez Jean Chrysostome et se retrouvent en de multiples exemplaires dans les florilĂšges monastiques cf. Antoine Melissa, II, 73, col. 1173 D et 1176 A rĂ©fĂ©rence Ă  Gen. 18, 27 et Ă  Job, 30, 19 ; II, 74, col. 1181 B rĂ©fĂ©rence Ă  Sir. 10, 9-11. La formule terre et cendre » est typique de l’imaginaire chrĂ©tien les Grecs de l’AntiquitĂ© classique voyaient l’homme comme un composĂ© de terre et d’eau cf. Vernant 1979, 76-78. 70 Pseudo-Basile I, Parenesis, ch. 14 ΠΔρ᜶ απΔÎčÎœÎżÏ†ÏÎżáœ»ÎœÎ·, col. XXVIII C. 71 Photius, Lettre Ă  Michel de Bulgarie, l. 619-622. 72 ThĂ©ognostos, Thesaurus, § 1. 73 NicĂ©phore BlemmydĂšs, Basilikos Andrias, ch. 35 et 39. 74 Thomas Magister, De regis officiis, ch. 2. 75 Agapet, Ekthesis, ch. 68. Dans la liturgie mĂȘme, l’empereur Ă©tait dĂ©signĂ© comme esclave » de Dieu Ă  l’instar des autres hommes voir les passages consacrĂ©s aux rites propres Ă  la Cour dans l’euchologe du Barberini gr. 336 VIIIe siĂšcle, le plus ancien et le plus cĂ©lĂšbre des euchologes byzantins, ouvrages oĂč sont consignĂ©s les formulaires et priĂšres en usage dans la liturgie cf. § 171, 175, 177 et § 174, oĂč l’empereur est censĂ© courber la nuque » devant le seul Roi des hommes, au mĂȘme titre que tous les autres fidĂšles Parenti & Velkovska 1995, 195, 199, 200 et 198. 76 Barlaam, ch. 36, § 333 ; le mĂȘme motif est repris au § 334 Barachias devra se montrer indulgent avec les fautes de ses compagnons d’esclavage » áœÎŒÎżÎŽÎżáœ»Î»ÎżÏ…, s’il veut bĂ©nĂ©ficier lui-mĂȘme de l’indulgence divine. 77 Pseudo-Basile I, Parenesis, ch. 14 ΠΔρ᜶ απΔÎčÎœÎżÏ†ÏÎżáœ»ÎœÎ·, col. XXVIII C. 78 Manuel II, Praecepta, ch. 7. 79 ThĂ©ophylacte SimokattĂšs, Historiae, 3, 11, 9. 80 ThĂ©ognostos, Thesaurus, § 4 et 14 cf. Matthieu, 19, 23. 81 EusĂšbe, Louanges de Constantin, 18, 3 Maraval 2001 Tu pourrais nous exposer en dĂ©tail, de la maniĂšre qui convient, les secours manifestes de ton Dieu, ton champion et ton protecteur, dans les guerres, la destruction des ennemis et des comploteurs, la protection de sa droite dans les dangers, la solution dans les difficultĂ©s, le soutien dans la solitude, les trouvailles dans les impasses, la prescience du futur, la prudente prĂ©voyance pour le bien gĂ©nĂ©ral, la dĂ©cision dans les incertitudes, les plans pour les grandes entreprises, les dĂ©cisions politiques, l’administration de l’armĂ©e, la correction de toute chose, les dĂ©crets pour le bien public, les lois utiles Ă  la vie ». 82 ThĂ©ognostos, Thesaurus, § 1 ጐΜ Îłáœ°Ï ῇ͂ χΔÎčρ᜶ Îżáœ»ÎżÏ… áŒĄ ᜎ ÎșαρΎ᜷α. 83 Prov. 21, 1 d’Hamonville 2000. Dagron 1968, 150-153, signale trois rĂ©fĂ©rences au mĂȘme verset des Proverbes dans les discours du paĂŻen ThĂ©mistios – signe que ce passage Ă©tait dĂ©jĂ  au IVe siĂšcle un lieu commun de la rhĂ©torique chrĂ©tienne. 84 Antoine Melissa, Loci communes, II, 1, col. 1000 D. 85 Photius, Lettre Ă  Michel de Bulgarie, l. 1165-1169. 86 Pseudo-Basile I, Parenesis, ch. 65 ΠΔρ᜶ οῊ Όᜎ ጐπα᜷ρΔΞαÎč, col. LIII D – LVI A. Sur la transcription iconographique de ce motif, voir Jolivet-LĂ©vy 1987, 450 portrait de Basile II entourĂ© de saints guerriers, symbolisant l’origine divine des victoires impĂ©riales. 87 Manuel II, Praecepta, § 13 et 42. 88 ThĂ©ophylacte SimokattĂšs, Historiae, 1, 1, 6 et 16-18. La formule ᜑψηλáœčΜ Îșα᜶ ÎŒÎ”áœłÏÎżÎœ est empruntĂ©e Ă  IsaĂŻe, 2, 12. 89 Agapet, Ekthesis, ch. 14. 90 Barlaam, ch. 36, § 332. 91 Barlaam, ch. 33, § 306. 92 Photius, Lettre Ă  Michel de Bulgarie, l. 1197. 93 Alexis Ier ComnĂšne, Les Muses, I, 408-413. 94 Or. 19 ̓Επ᜶ ῇ͂ φÎčÎ»Î±ÎœÎžÏÏ€áœ·áŸł οῊ Î±áœÎżÎșÏáœ±ÎżÏÎż Î˜Î”ÎżÎŽÎżáœ·ÎżÏ…, 226 d – 227 a. 95 Sur cette Ă©volution sĂ©mantique du terme πρα᜻η, voir Spicq 1947, 324-332. 96 Isocrate figure parmi les sources mentionnĂ©es dans le prologue des Praecepta, et il est Ă  nouveau citĂ© au chapitre 15. 97 Souvenir possible de Jean Chrysostome pour qui le diptyque du Pharisien et du Publicain Luc, 18, 9-14 est l’illustration parfaite des avantages de l’humilitĂ© et des dangers du fol orgueil ጀπáœčÎœÎżÎčα Le fol orgueil peut faire descendre des cieux mĂȘmes celui qui se montre inattentif, tandis que l’humilitĂ© peut Ă©lever dans les hauteurs, depuis l’abĂźme mĂȘme des pĂ©chĂ©s, celui qui sait garder la mesure » De profectu Evangelii 1-2, PG, 51, col. 311-312. 98 BlemmydĂšs a apparemment confondu ce personnage avec BellĂ©rophon ; la paraphrase de GalasiotĂšs attribue explicitement l’entreprise d’Hipponoos Ă  l’ጔπαρÎč. 99 Lycaon, pour mettre Zeus Ă  l’épreuve, lui fit servir de la chair humaine, et le dieu le punit en foudroyant ses cinquante fils. 100 Ici encore, la paraphrase est plus prĂ©cise et condamne explicitement SalmonĂ©e en Ă©voquant son fol orgueil áŒ€Ï€ÎżÎœÎżáœ·Î± et son ጔπαρÎč. Sur ce personnage, voir Apollodore, 1, 9, 7 Plein d’insolence ᜑÎČρÎč᜔, il voulait s’égaler Ă  Zeus et fut chĂątiĂ© pour son impiĂ©tĂ©. Il disait qu’il Ă©tait lui-mĂȘme Zeus. Retirant au dieu ses sacrifices, il ordonna qu’ils soient offerts Ă  lui-mĂȘme. Il traĂźnait, accrochĂ©s Ă  un char, des outres de peau sĂ©chĂ©e et des chaudrons de bronze, et prĂ©tendait que c’était le tonnerre ; et lançant vers le ciel des torches enflammĂ©es, il affirmait que c’étaient des Ă©clairs. Zeus le foudroya et fit disparaĂźtre la citĂ© qu’il avait fondĂ©e et tous ses habitants ». 101 Il s’agit du feu de l’ጀυφ᜷α et de la απΔ᜷ΜÎč », explique la paraphrase. 102 Cf. Dion Chrysostome, Or. 1, 46 celui qui se montre irrespectueux envers la divinitĂ© qui lui a donnĂ© le pouvoir ressemble Ă  PhaĂ©thon, juchĂ© de maniĂšre inconvenante παρᜰ ÎŒÎżáż–ÏÎ±Îœ sur un char puissant et divin, sans ĂȘtre capable de le conduire » ; Or. 4, 118-122 l’esprit toujours exaltĂ© » ጀΔ᜶ ÎŒÎ”áœłÏÎż des hommes passionnĂ©s de gloire Ă©voque l’aventure violente et contre nature d’Icare » ; Lucien, Le Coq, 23 la chute fracassante d’Icare fait penser aux naufrages infamants » de CrĂ©sus ou Denys de Syracuse ; Julien, Or. 3, 83 d l’homme, une fois nanti de la puissance royale, s’exalte et devient excessivement hautain αጎρΔαÎč ÎŒÎ”áœłÏÎż ጐπ᜷παΜ ; son sort ne diffĂšre en rien de la tragique histoire de PhaĂ©thon ». 103 BlemmydĂšs emploie le terme ΌΔρÎčÎżÏ†ÏÎżÎœÎœ, que la paraphrase transpose, dans le registre chrĂ©tien, en απΔÎčΜáœčφρΜ. 104 Dans la paraphrase, le motif figure trĂšs explicitement, en commentaire Ă  la formule alambiquĂ©e de BlemmydĂšs Î±áœÎżáżŠ οῊ ΧρÎčοῊ οῊ ጀληΞÎčÎœÎżáżŠÍ‚ ΘΔοῊ áŒĄÎŒÎœ ጐÎč ÎŒÎčΌη᜔. 105 Cf. Dagron 1996, 20-21 Le passage au christianisme a autant modifiĂ© les donnĂ©es de la politique que celles de la religion » ; 114 La christianisation du pouvoir romain s’est faite, au IVe siĂšcle, en grande partie par l’interposition d’images bibliques ». 106 Pour le Moyen Âge occidental, voir Reydellet 1985 ; pour Byzance, Dagron 1996, 68-69 La royautĂ©, son origine et la nature, sacerdotale ou non, de sa fonction sont l’un des grands sujets de l’Ancien Testament, et un lecteur byzantin pouvait y puiser quelques idĂ©es maĂźtresses ». 107 Exode, 18, 21 Dogniez et al. 2001 ጄΜΎρα ÎŽÎčÎșÎ±áœ·ÎżÏ… ÎŒÎčÎżáżŠÎœÎ± ᜑπΔρηφαΜ᜷αΜ. 108 Deut., 17, 20 Dogniez et al. 2001 ጔΜα Όᜎ áœ‘ÏˆÎžáż‡Í‚ áŒĄ ÎșαρΎ᜷α Î±áœÎżáżŠ ጀπ᜞ Μ ጀΎΔλφΜ Î±áœÎżáżŠ. 109 Cf. LĂ©v., 29, 19 ᜎΜ ᜕ÎČρÎčΜ ῆ ᜑπΔρηφαΜ᜷α ; Esther, 4, 17 d ÎżáœÎș ጐΜ ᜕ÎČρΔÎč ÎżáœÎŽáœČ ጐΜ áœ‘Ï€Î”ÏÎ·Ï†Î±Îœáœ·áŸł ; 2 Macc., 1, 28 ጐΟυÎČÏáœ·Î¶ÎżÎœÎ± ጐΜ áœ‘Ï€Î”ÏÎ·Ï†Î±Îœáœ·áŸł ; Prov., 8, 13 ᜕ÎČρÎčΜ Δ Îșα᜶ ᜑπΔρηφαΜ᜷αΜ ; IsaĂŻe, 2, 12 ᜑÎČρÎčᜎΜ Îșα᜶ áœ‘Ï€Î”Ïáœ”Ï†Î±ÎœÎżÎœ ; 13, 11 ᜕ÎČρÎčΜ ᜑπΔρηφᜱΜΜ ; JĂ©r., 31, 29 ᜕ÎČρÎčΜ Î±áœÎżáżŠ Îșα᜶ ᜑπΔρηφαΜ᜷αΜ Î±áœÎżáżŠâ€Š 110 Prov., 16, 5 ; 3, 34 d’Hamonville 2000. 111 Jacques, 4, 6 et 1 Pierre, 5, 5. 112 Cf. Évagre, Schol. Prov. 39 GĂ©hin 1987 Le Seigneur rĂ©siste aux orgueilleux, en ce qu’il est lui-mĂȘme humilitĂ© » οῖ áœ‘Ï€Î”ÏÎ·Ï†áœ±ÎœÎżÎč áœĄ απΔÎčÎœÎżÏ†ÏÎżáœ»ÎœÎ· ጀΜÎčᜱΔαÎč. 113 On rencontre ce verset, Ă  trois reprises, dans les chapitres consacrĂ©s par Antoine Melissa aux humbles et aux orgueilleux II, 73, col. 1176 B et 1177 A ; II, 74, col. 1180 D. 114 Lettre d’AristĂ©e Ă  Philocrate, § 262 Pelletier 1962. 115 Trad. ƓcumĂ©nique 2004. 116 Nombres, 12, 3 Dogniez et al. 2001. S’appliquant Ă  montrer qu’aucune vertu chrĂ©tienne n’est plus admirable que l’humilitĂ©, Jean Chrysostome invoque prĂ©cisĂ©ment ce passage, oĂč MoĂŻse est dĂ©crit comme le plus doux de tous les hommes », et il loue le chef des HĂ©breux de s’ĂȘtre montrĂ© si humble » alors qu’il dirigeait un peuple si nombreux In Ep. 1 ad Cor. 1, 2, PG, 61, col. 15. 117 Cf. 2 Regn. 6 ; 12 ; 16. L’épisode de David et AbishaĂŻ est souvent citĂ© dans les florilĂšges, comme exemple d’humilitĂ© cf. Antoine Melissa, II, 1, col. 997 A ; II, 73, col. 1173 D. Ce mĂȘme Ă©pisode est invoquĂ© aussi dans le Thesaurus de ThĂ©ognostos pour illustrer l’ጀΜΔΟÎčÎșαÎș᜷α du trĂšs doux David » πραáœčÎ±ÎżÎœ. Jolivet-LĂ©vy 1987, 461, signale la prĂ©sence d’une personnification de la Πραáœčη aux cĂŽtĂ©s de David dans l’une des miniatures du Psautier de Paris Paris. gr. 139. 118 1 Par. 29, 11-17 Îżáœ·, Îș᜻ρÎčΔ, áŒĄ ÎŒÎ”ÎłÎ±Î»áœ»ÎœÎ· Îșα᜶ áŒĄ Ύ᜻ΜαΌÎč Îșα᜶ ᜞ Îșα᜻χηΌα Îșα᜶ áŒĄ Μ᜷Îșη Îșα᜶ áŒĄ ጰχ᜻, ᜅÎč áœș πᜱΜΜ Μ ጐΜ ͂ ÎżáœÏÎ±ÎœÍ‚ Îșα᜶ ጐπ᜶ ῆ γῆ ΎΔπáœčζΔÎč, ጀπ᜞ Ï€ÏÎżáœœÏ€ÎżÏ… ÎżÏ… αρᜱΔαÎč π៶ ÎČαÎčλΔáœș Îșα᜶ áŒ”ÎžÎœÎż. παρᜰ οῊ ᜁ Ï€Î»ÎżáżŠÎż Îșα᜶ áŒĄ ÎŽáœčΟα, áœș πᜱΜΜ ጄρχΔÎč, Îș᜻ρÎčΔ ᜁ ጄρχΜ πᜱη áŒ€ÏÏ‡áż†, Îșα᜶ ጐΜ χΔÎčρ᜷ ÎżÏ… ጰχáœș Îșα᜶ ΎυΜαΔ᜷α, Îșα᜶ ጐΜ χΔÎčρ᜷ ÎżÏ…, Ï€Î±ÎœÎżÎșρᜱρ, ÎŒÎ”ÎłÎ±Î»áżŠÎœÎ±Îč Îșα᜶ ÎșαÎčÏ‡áżŠÎ±Îč ᜰ πᜱΜα  Îșα᜶ ᜷ ΔጰΌÎč áŒÎłáœœ ÍŸ  ᜰ ᜰ πᜱΜα  Ï€áœ±ÏÎżÎčÎșÎżáœ· ጐΌΔΜ áŒÎœÎ±Îœáœ·ÎżÎœ ÎżÏ…â€Š áœĄ ÎșÎčᜰ αጱ áŒĄÎŒáœłÏÎ±Îč áŒĄÎŒÎœ ጐπ᜶ γῆ
 Îșα᜶ áŒ”ÎłÎœÎœ, Îș᜻ρÎčΔ, ᜅÎč áœș Δጶ ᜁ ጐᜱζΜ ÎșαρΎ᜷α Îșα᜶ ÎŽÎčÎșαÎčÎżáœ»ÎœÎ·Îœ áŒ€ÎłÎ±Ï€áŸ·. 119 Matthieu, 11, 29 Osty & Trinquet 1974. Dans le chapitre qu’Antoine Melissa consacre Ă  l’humilitĂ© II, 84 ΠΔρ᜶ Ï€ÏÎ±áœ»Î·Îż Îșα᜶ ΔᜐλαÎČΔ᜷α, sont Ă©voquĂ©es Ă  la fois la douceur » de MoĂŻse col. 1201 B cf. Nombres, 12, 3 et celle du Christ col. 1201 D d’ap. Matthieu, 11, 29. 120 Marc, 9, 35 Osty & Trinquet 1974. Dans la cinquiĂšme de ses CatĂ©chĂšses l. 610 sq., SymĂ©on le Nouveau ThĂ©ologien rappelle aux rois et gouverneurs cette parole du Christ, qui a inspirĂ© Ă  saint Paul la formule fameuse Je me complais dans les faiblesses, dans les outrages ጐΜ ᜕ÎČρΔÎčΜ, dans les dĂ©tresses, dans les persĂ©cutions et les angoisses pour Christ ; car lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort » 2 Cor. 12, 10 Osty & Trinquet 1974. 121 Ambroise, Apologie de David, 81 Cordier 1977. 122 2 Par. 26, 16-19. 123 4 Regn. 19, 28. 124 2 Macc. 9, 8-12 trad. ƓcumĂ©nique 2004. Sort prĂ©dit par Mattathias, en 1 Macc. 2, 62-63 trad. ƓcumĂ©nique 2004 Ne craignez pas les menaces de l’homme pĂ©cheur, car sa gloire s’en va vers la pourriture et les vers. Aujourd’hui il s’élĂšve, et demain on ne le trouvera plus, car il sera retournĂ© Ă  sa poussiĂšre Δጰ ᜞Μ Ï‡ÎżáżŠÎœ Î±áœÎżáżŠ et ses projets seront anĂ©antis ». 125 IsaĂŻe, 2, 11-17 Îșα᜶ απΔÎčΜΞ᜔ΔαÎč ᜞ áœ•ÏˆÎż Μ ጀΜΞρ᜜πΜ, Îșα᜶ ᜑψΞ᜔ΔαÎč Îș᜻ρÎčÎż ÎŒáœčÎœÎż ጐΜ ῇ͂ áŒĄÎŒáœłÏáŸł ጐÎșÎ”áœ·Îœáżƒ. áŒĄÎŒáœłÏÎ± Îłáœ°Ï ÎșÏ…Ïáœ·ÎżÏ… αÎČαΞ ጐπ᜶ πᜱΜα ᜑÎČρÎčᜎΜ Îșα᜶ áœ‘Ï€Î”Ïáœ”Ï†Î±ÎœÎżÎœ Îșα᜶ ጐπ᜶ πᜱΜα ᜑψηλ᜞Μ Îșα᜶ ÎŒÎ”áœłÏÎżÎœ, Îșα᜶ απΔÎčÎœÎžáœ”ÎżÎœÎ±Îč, Îșα᜶ ጐπ᜶ π៶αΜ ÎșáœłÎŽÏÎżÎœ οῊ ΛÎčÎČáœ±ÎœÎżÏ… Μ ᜑψηλΜ Îșα᜶ ΌΔΔ᜜ρΜ Îșα᜶ ጐπ᜶ π៶Μ ÎŽáœłÎœÎŽÏÎżÎœ ÎČÎ±Î»áœ±ÎœÎżÏ… ΒααΜ Îșα᜶ ጐπ᜶ π៶Μ áœ„ÏÎż Îșα᜶ ጐπ᜶ πᜱΜα ÎČÎżÏ…ÎœáœžÎœ ᜑψηλ᜞Μ Îșα᜶ ጐπ᜶ πᜱΜα Ï€áœ»ÏÎłÎżÎœ ᜑψηλ᜞Μ Îșα᜶ ጐπ᜶ π៶Μ Î”áż–Ï‡Îż ᜑψηλ᜞Μ Îșα᜶ ጐπ᜶ π៶Μ Ï€Î»Îżáż–ÎżÎœ Ξαλᜱη Îșα᜶ ጐπ᜶ π៶αΜ ÎžáœłÎ±Îœ Ï€Î»Îżáœ·Îœ Îșáœ±Î»Î»ÎżÏ… · Îșα᜶ απΔÎčΜΞ᜔ΔαÎč π៶ áŒ„ÎœÎžÏÏ€Îż, Îșα᜶ Ï€Î”Î”áż–Î±Îč áœ•ÏˆÎż ጀΜΞρ᜜πΜ, Îșα᜶ ᜑψΞ᜔ΔαÎč Îș᜻ρÎčÎż ÎŒáœčÎœÎż ጐΜ ῇ áŒĄÎŒáœłÏáŸł ጐÎșÎ”áœ·Îœáżƒ. 126 IsaĂŻe, 10, 12-15. Le roi en question pourrait ĂȘtre Sargon II 721-705, prĂ©dĂ©cesseur et pĂšre de SennachĂ©rib. 127 IsaĂŻe, 14, 13-14 Εጰ ᜞Μ ÎżáœÏÎ±ÎœáœžÎœ ጀΜαÎČáœ”ÎżÎŒÎ±Îč, ጐπᜱΜ Μ ጄρΜ οῊ ÎżáœÏÎ±ÎœÎżáżŠ Ξ᜔ ᜞Μ ΞρáœčÎœÎżÎœ ÎŒÎżÏ…, ÎșαΞÎč ጐΜ ᜄρΔÎč ᜑψηλ͂ ጐπ᜶ ᜰ ᜄρη ᜰ ᜑψηλᜰ ᜰ πρ᜞ ÎČÎżÏÏáŸ¶Îœ, ጀΜαÎČáœ”ÎżÎŒÎ±Îč ጐπᜱΜ Μ ΜΔφΔλΜ, áŒ”ÎżÎŒÎ±Îč áœ…ÎŒÎżÎčÎż ͂ ᜑψ᜷. Ce roi de Babylone pourrait ĂȘtre Nabuchodonosor II 604-562 ou Nabonide 556-539. 128 Sur ce passage, voir Grelot 1956 qui renvoie Ă  Gordon 1949, 44 texte 49 I. Le mythe d’Attar, surnommĂ© le Brillant » Helel, est, d’aprĂšs Grelot, un ancien mythe astral, Ă  comparer avec ceux de PhaĂ©thon et de Lucifer. Le texte d’IsaĂŻe 14 a d’ailleurs Ă©tĂ© utilisĂ© par les PĂšres de l’Église pour Ă©voquer la chute de Satan, comme l’a montrĂ© Jamel Attar Ă  propos de GrĂ©goire de Nazianze voir Attar 2006. 129 IsaĂŻe, 14, 11-12 et 15. 130 ÉzĂ©chiel, 17, 24 áŒÎłáœŒ Îș᜻ρÎčÎż ᜁ απΔÎčΜΜ ÎŸáœ»Î»ÎżÎœ ᜑψηλ᜞Μ Îșα᜶ ᜑψΜ ÎŸáœ»Î»ÎżÎœ απΔÎčΜáœčΜ. Formule souvent reprise dans les florilĂšges voir par exemple Antoine Melissa, II, 73, col. 1176 B. 131 ÉzĂ©chiel, 28, 2. 132 ÉzĂ©chiel, 31, 10-14. 133 Daniel, 4, 10 sq. Îșα᜶ áŒ°ÎŽÎżáœș ÎŽáœłÎœÎŽÏÎżÎœ ጐΜ ÎŒáœł ῆ γῆ, Îșα᜶ ᜞ áœ•ÏˆÎż Î±áœÎżáżŠ Ï€ÎżÎ»áœ» ; 4, 17 Îș᜻ρÎčáœč ጐÎčΜ ᜁ ᜕ψÎčÎż ῆ ÎČαÎčλΔ᜷α Μ ጀΜΞρ᜜πΜ, Îșα᜶ ៧ ጐᜰΜ ÎŽáœčÎŸáżƒ, Ύ᜜ΔÎč αᜐᜎΜ Îșα᜶ áŒÎŸÎżÏ…ÎŽáœłÎœÎ·ÎŒÎ± ጀΜΞρ᜜πΜ ጀΜα᜔ΔÎč ጐπ ̓ αᜐ᜔Μ. 134 Voir Pseudo-Maxime, Loci communes, ch. 9 et 34 ΠΔρ᜶ áŒ€ÏÏ‡áż† Îșα᜶ áŒÎŸÎżÏ…áœ·Î± ; ch. 42 ΠΔρ᜶ απΔÎčÎœÎżÏ†ÏÎżáœ»ÎœÎ· ; Antoine Melissa, II, 1 ΠΔρ᜶ ÎČαÎčÎ»áœł Ï‡ÏÎ·ÎżáżŠ ; II, 2 ΠΔρ᜶ ÎČαÎčÎ»áœł Όᜎ λ᜷αΜ ÎžÎ±Ï…ÎŒÎ±Î¶ÎżÎŒáœłÎœÎżÏ… ; II, 73 ΠΔρ᜶ απΔÎčÎœÎżÏ†ÏÎżÎœÎżáœ»ÎœÎœ Îșα᜶ πχΜ ͂ πΜΔ᜻ΌαÎč ; II, 74 ΠΔρ᜶ ᜑπΔρηφᜱΜΜ Îșα᜶ ÎżÎČαρΜ Îșα᜶ ጀλαζáœčΜΜ Îșα᜶ ÎșÎ”ÎœÎżÎŽáœčΟΜ ; II, 84 ΠΔρ᜶ Ï€ÏÎ±áœ»Î·Îż Îșα᜶ ΔᜐλαÎČΔ᜷α. 135 Dagron 1996, 70. 136 Voir Dulaey 1999. L’ arrogance » ÎłÎ±Ï…Ïáœ·Î±ÎŒÎ± de Goliath est explicitement mentionnĂ©e dans Sir. 47, 4. 137 Augustin, Enarr. in Ps. 33, 1, 4 Dekkers & Fraipont 1956, 276 Humilitas occidit superbiam ». En Orient, on trouve le mĂȘme type d’interprĂ©tation chez Didyme l’Aveugle qui fut le maĂźtre de saint JĂ©rĂŽme voir notamment le commentaire in Ps. 32, 16, oĂč la dĂ©faite de Goliath, confiant en sa seule force, est imputĂ©e Ă  son orgueil ጊΜ ÎŽáœČ Îșα᜶ áœ‘Ï€Î”Ïáœ”Ï†Î±ÎœÎż Gronewald 1969, 180. 138 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. 1, 82 Vogt 1939, 167 course hippique des Lupercales. 139 Constantin PorphyrogĂ©nĂšte, CĂ©r. 1, 78 Vogt 1939, 136. 140 Le titre du discours est, Ă  soi seul, tout un programme De l’attaque insensĂ©e des Avares et des Perses athĂ©es contre cette ville, par Dieu protĂ©gĂ©e, et de leur retraite honteuse, que l’amour de Dieu pour les hommes suscita par l’intervention de la ThĂ©otokos » Makk 1975. 141 Anne ComnĂšne, Alexiade, 14, 2, 4 Leib 1946. La formule fardeau de la terre » áŒ„Ï‡ÎžÎż áŒ€ÏÎżáœ»ÏÎ· est une citation d’Iliade, 18, 104. 142 Anne ComnĂšne, Alexiade, 3, 5, 1 Leib 1937. L’invite au repentir s’imposait au basileus chaque fois qu’il franchissait les portes de Sainte-Sophie, puisque la mosaĂŻque du narthex lui offrait l’image d’un empereur en proskynĂšse devant le Christ, dans une attitude rappelant celle de David, en posture de pĂ©nitent, dans les Psautiers byzantins cf. Dagron 1996, 129. 143 Anne ComnĂšne, Alexiade, 14, 3, 6 Leib 1946. On notera comment la geste de MoĂŻse est prĂ©sentĂ©e en ce passage comme une prĂ©figuration de celle du Christ, conformĂ©ment aux usages de l’exĂ©gĂšse typologique. 144 Michel ChoniatĂšs, Or. 14 Lampros 1879, 246. 145 GrĂ©goire de Nazianze, Or. 4, 32 Bernardi 1983 cf. Prov. 16, 18 et 3, 34. Pour une Ă©tude plus dĂ©taillĂ©e du thĂšme de la dĂ©mesure dans les deux invectives Contre Julien, voir Attar 2006. 146 GrĂ©goire de Nazianze, Or. 5, 8 Bernardi 1983 Mais lui, excitĂ© et aiguillonnĂ© par ses folles passions
, entre en campagne contre les Perses, en s’appuyant plus sur une aveugle tĂ©mĂ©ritĂ© que sur la soliditĂ© de ses forces
 Comme un nouveau SalmonĂ©e, il imitait le tonnerre avec une trompette ; il avait les yeux fixĂ©s sur ces Trajans et ces Hadriens dont on n’admirait pas moins la prudence que le courage ». Peut-ĂȘtre cette rĂ©fĂ©rence de GrĂ©goire de Nazianze Ă  SalmonĂ©e – explicitĂ©e dans le commentaire du Pseudo-Nonnos Or. 5, hist. 2 – contribue-t-elle Ă  expliquer que le personnage en question soit si souvent invoquĂ© Ă  titre d’antimodĂšle dans la littĂ©rature byzantine outre les passages, dĂ©jĂ  Ă©voquĂ©s, de NicĂ©phore BlemmydĂšs, ThĂ©odore le Syncelle et Michel ChoniatĂšs, voir aussi Michel Italikos, Or. 43 Basilikos logos adressĂ© en 1138 Ă  l’empereur Jean II ComnĂšne, sur ses combats en Syrie, Gautier 1972, 249 assimilation Ă  SalmonĂ©e de l’ArmĂ©nien Roupen, rebelle » et faux basileus » ; NicĂ©tas ChoniatĂšs, Or. 11 discours prononcĂ© en 1202, pour cĂ©lĂ©brer la victoire d’Alexis III Ange sur les rebelles KamitzĂšs, Chrysos Dobromir, Kalojean et SpiridonakĂšs, van Dieten 1972, 110 comparaison du tsar Kalojean avec SalmonĂ©e ÏˆÎ”Ï…ÎŽÎżÎșÏÎżÎœáœ·ÎœÎ± en raison de son arrogance. 147 Adversus Constantinum Cabalinum, 23 PG, 95, col. 341 texte citĂ© par Dagron 1996, 195-196. 148 Cf. Attar 2006. 149 Sur cette affaire, Ă  l’origine de vives tensions entre pouvoir impĂ©rial et milieux ecclĂ©siastiques, voir Glavinas 1972 notamment p. 66 et 82 citations de la lettre adressĂ©e par LĂ©on Ă  Alexis. Inquiet de l’émotion que sa dĂ©cision avait suscitĂ©e, Alexis dĂ©cida de faire amende honorable, dans un chrysobulle datĂ© de 1082, oĂč il manifesta le regret de son geste et promit, sous serment, de ne plus recourir Ă  ce genre de procĂ©dĂ© – ce qui ne l’empĂȘcha pas de rĂ©cidiver en 1087 ! 150 Anne ComnĂšne, Alexiade, 5, 2, 4 Leib 1943. 151 Barker 1957, 29. 152 Eschyle, Perses, 827-828. 153 Les byzantinistes français, qui travaillaient alors sans relĂąche, se firent, bon grĂ© mal grĂ©, les auxiliaires de la royautĂ© voir AuzĂ©py & GrĂ©lois 2001, 18. 154 Bossuet, Politique
, PrĂ©face », in ƒuvres complĂštes, IX, 700. 155 Bossuet, Politique
, livre V, Article IV, 1re prop., ibid., 830. 156 En l’absence d’autre indication, les traductions proposĂ©es sont dues Ă  l’auteur de l’ de page Pour citer cet article RĂ©fĂ©rence papier Corinne Jouanno, RĂ©flexions sur pouvoir et dĂ©mesure Ă  Byzance », Kentron, 23 2007, 127-165. RĂ©fĂ©rence Ă©lectronique Corinne Jouanno, RĂ©flexions sur pouvoir et dĂ©mesure Ă  Byzance », Kentron [En ligne], 23 2007, mis en ligne le 16 mars 2018, consultĂ© le 21 aoĂ»t 2022. URL ; DOI de page

Georgessur le rooftop du centre pompidou En plein cƓur de Paris et au dernier Ă©tage du Centre Pompidou, le restaurant Georges dispose d’un rooftop idĂ©al avec une vue sur tout Paris. Que l’on soit en terrasse ou Ă  l’intĂ©rieur, on profite Ă  loisir du coucher du soleil et des lumiĂšres de Paris. AprĂšs une exposition au Centre

1En 2013, lors d’une table ronde au Centre Georges-Pompidou de Paris organisĂ©e dans le cadre des commĂ©morations du centenaire de la naissance de Claude Simon, Maylis de Kerangal confessa ses rĂ©ticences de jeune fille face Ă  l’Ɠuvre d’un Ă©crivain qu’elle percevait comme celle d’un classique », car elle Ă©tait enseignĂ©e comme telle Ă  l’universitĂ©. Or, il n’en fut pas toujours ainsi. Loin s’en faut ! Deux Ă©vĂ©nements possĂšdent une importance extrĂȘme dans la prise en compte par les universitaires d’un Ă©crivain qui fut longtemps considĂ©rĂ© comme un second couteau » du Nouveau Roman l’attribution du prix Nobel de littĂ©rature en 1985 et l’inscription au programme de l’agrĂ©gation de lettres de La Route des Flandres en 1998. 2Pressentant peut-ĂȘtre cette reconnaissance du monde des lettres, j’avais inscrit au mois d’octobre 1985 ce roman au programme du cours de littĂ©rature contemporaine que je dispensais alors en troisiĂšme annĂ©e de licence Ă  l’universitĂ© Marien Ngouabi de Brazzaville RĂ©publique Populaire du Congo. Ce roman remplaçait La Modification de Michel Butor qui les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes avait constituĂ© le texte de rĂ©fĂ©rence pour l’étude du Nouveau Roman. Or, une fois maĂźtrisĂ©e la langue du texte », l’intĂ©rĂȘt des Ă©tudiants s’est rĂ©vĂ©lĂ© trĂšs vif Ă  l’endroit d’un ouvrage qui traitait de la guerre, de la dĂ©faite, de l’emprisonnement, au travers d’une Ă©criture Ă  la fois brute et rigoureusement travaillĂ©e. La modification du trajet impulsĂ© Ă  son existence par LĂ©on Delmont lors de son pĂ©riple ferroviaire n’avait prĂ©alablement que peu sollicitĂ© leur attention. L’errance des cavaliers dans les paysages dĂ©vastĂ©s par la guerre possĂ©dait selon eux une dimension universelle qui excĂ©dait toute rĂ©fĂ©rence historique et gĂ©ographique prĂ©cise. Et, les lecteurs qu’ils Ă©taient par ailleurs des livres d’Henri Lopes et de Tchicaya U Tam’si retrouvaient dans le texte de Simon la mĂȘme Ă©criture fragmentĂ©e, Ă©ruptive et ironique. Cette rĂ©action dĂ©montrait qu’au-delĂ  de son inscription dans la mouvance du Nouveau Roman, l’Ɠuvre possĂ©dait une identitĂ© littĂ©raire susceptible de toucher un large public. 3Une autre expĂ©rience dans le contexte universitaire africain mĂ©rite d’ĂȘtre ici rapportĂ©e. À l’universitĂ© de Bujumbura Burundi, afin de rĂ©flĂ©chir sur l’histoire immĂ©diate du pays Ă  travers divers textes de la littĂ©rature française, j’avais construit en 1991 un cours consacrĂ© Ă  la reprĂ©sentation de la guerre civile qui comprenait Les Tragiques d’Agrippa d’AubignĂ©, L’Espoir d’AndrĂ© Malraux, Le Palace de Claude Simon et La ParenthĂšse de sang de Sony Labou Tansi. En aoĂ»t 1988, dans les communes de Ntega et Marangara situĂ©es au nord du pays, avait Ă©tĂ© perpĂ©trĂ© un terrible massacre qui s’était soldĂ© par la mort de 150 000 Hutus. Il s’agissait donc de comprendre l’incomprĂ©hensible en Ă©tudiant les stratĂ©gies discursives auxquelles recourent les Ɠuvres littĂ©raires afin d’exprimer l’ineffable. Le texte de Simon prĂ©sentait la difficultĂ© de reprĂ©senter la guerre civile Ă  l’intĂ©rieur de la guerre civile, en l’occurrence les exactions commises par les communistes Ă  l’encontre des trotskistes et des anarchistes. NĂ©anmoins, la part dĂ©volue par le roman Ă  l’implicite, au non-dit et surtout au refus de confĂ©rer quelque sens que ce soit Ă  l’Histoire constituait selon les Ă©tudiants le langage par excellence de la violence irraisonnĂ©e qui se dĂ©chaĂźne Ă  l’occasion de ces guerres intestines. 4En 1999, Ă  l’universitĂ© de Provence, dans le programme d’un cours consacrĂ© au roman de guerre, j’avais inscrit L’Acacia, qui, au terme d’un parcours distinguant les textes traitant du premier et du second conflit mondial, les associait sous la forme d’un long rĂ©cit de guerre dont les circonstances historiques n’occultaient pas le caractĂšre monstrueux que possĂ©dait par et en lui-mĂȘme le phĂ©nomĂšne. L’investissement autobiographique propre au roman intĂ©ressa tout particuliĂšrement les Ă©tudiants qui, contrairement aux autres Ɠuvres du corpus, les plaçait en prĂ©sence non d’un combattant, mais d’un homme dont la guerre constitua l’une des Ă©preuves cruciales que lui infligea la vie. ParallĂšlement Ă  ce cours destinĂ© aux Ă©tudiants de premiĂšre annĂ©e de licence, un autre enseignement proposĂ© aux Ă©tudiants de deuxiĂšme annĂ©e de licence traitait des reprĂ©sentations romanesques de la jalousie. Parmi les Ɠuvres du programme figurait La Bataille de Pharsale. Le motif de la jalousie n’étant pas ostensible comme il l’est par exemple dans Un amour de Swann ou La PrisonniĂšre, les Ă©tudiants furent profondĂ©ment dĂ©concertĂ©s par la singularitĂ© du texte. La mise en place de la grammaire scripturale Ă  laquelle procĂšdent les trois parties du roman leur parut absconse, les enjeux du motif de la jalousie Ă  l’intĂ©rieur du tissu textuel leur apparurent incomprĂ©hensibles et son Ă©criture illisible. Ils tĂ©moignĂšrent de leur seul attrait pour la matiĂšre guerriĂšre de la fiction. Que la bataille de Pharsale puisse ĂȘtre une mĂ©taphore de la jalousie les laissa profondĂ©ment sceptiques. 5De 1999 Ă  2017, sous diverses formes, j’ai consacrĂ© un cours au roman contemporain, qui chaque fois accordait une importance majeure Ă  la mouvance du Nouveau Roman. J’ai dans ce cadre Ă©tudiĂ© en compagnie des Ă©tudiants tour Ă  tour les principaux romans de Claude Simon, en m’efforçant de dĂ©montrer que si, indĂ©niablement, l’Ɠuvre du romancier s’inscrivait dans le cadre spĂ©cifique de ce mouvement esthĂ©tique, elle possĂ©dait tout aussi indubitablement son identitĂ© propre, ce qui autorisait Ă  l’apprĂ©hender en dehors de toute rĂ©fĂ©rence collective. Dans le contexte d’un cours, puis d’un sĂ©minaire consacrĂ© au phĂ©nomĂšne contemporain de la réécriture et de l’intertextualitĂ©, nous avons Ă©tudiĂ© la spĂ©cificitĂ© de l’hĂ©ritage proustien inscrite au cƓur de l’Ɠuvre ainsi que les innombrables insertions hypertextuelles d’Ɠuvres littĂ©raires et picturales qui Ă©maillent les textes. C’est ainsi que progressivement Claude Simon s’est imposĂ© comme l’un des maillons majeurs au sein du processus qui durant le dernier quart du xxe siĂšcle a conduit le roman du modernisme vers le postmodernisme. Les Ă©tudes successives de L’Herbe, d’Histoire, de Triptyque, des GĂ©orgiques et du Tramway ont convaincu les Ă©tudiants de l’efficience que possĂšde dans son Ɠuvre le protocole scriptural qu’il a mis en place roman aprĂšs roman pour reprĂ©senter conjointement le moi et le monde, l’histoire dans l’Histoire, l’acte crĂ©ateur Ă  l’intĂ©rieur mĂȘme de la crĂ©ation. 6Lors de l’annĂ©e universitaire 2017-2018, deux romans de Claude Simon figuraient dans des programmes qui ne privilĂ©giaient pas l’un des axes spĂ©cifiques de son Ɠuvre. Ainsi, Le Vent Ă©tait analysĂ© selon une approche typologique, la spĂ©cificitĂ© de l’individu face au corps social et Le Tramway relativement Ă  une perspective gĂ©nĂ©rique, celle du rĂ©cit d’enfance. Les stratĂ©gies scripturales du romancier ne reprĂ©sentaient plus l’enjeu de l’étude, mais, confrontĂ©es Ă  celles radicalement diffĂ©rentes d’autres Ă©crivains contemporains, elles rĂ©vĂ©laient leur irrĂ©ductible singularitĂ©, fondatrice d’un univers littĂ©raire Ă  nul autre semblable. Aussi, par un effet en soi paradoxal, c’est en banalisant » l’Ɠuvre que je parvins Ă  en faire reconnaĂźtre l’infinie richesse par ces Ă©tudiants de premiĂšre annĂ©e de licence. 7Il n’en demeure pas moins que chaque fois la supposĂ©e difficultĂ© de l’Ɠuvre simonienne resurgit dans l’esprit des Ă©tudiants au moment oĂč ils se consacrent Ă  leurs travaux de recherche. Parfois, l’un me propose de rĂ©diger un mĂ©moire de master sur tel ou tel aspect de cette Ɠuvre, mais le projet ne dĂ©passe pas le stade de la vellĂ©itĂ©. Cette annĂ©e encore, un Ă©tudiant en master s’est proposĂ© d’étudier les reprĂ©sentations de l’érotisme Ă  l’intĂ©rieur de l’Ɠuvre, en prĂ©cisant qu’il avait l’intention de mener sa rĂ©flexion sur le sujet jusqu’à la thĂšse de doctorat. Il reste Ă  souhaiter que l’ampleur de la tĂąche ne le conduise pas au dĂ©couragement, que le classicisme » de l’écrivain n’estompe pas l’enthousiasme initial en rĂ©duisant son travail de recherche Ă  un fastidieux exercice acadĂ©mique. En attendant, pour la seconde annĂ©e consĂ©cutive, L’Acacia se trouve au programme de littĂ©rature comparĂ©e Ă  l’agrĂ©gation de lettres. Nouvelle opportunitĂ© de traiter de l’une des Ɠuvres maĂźtresses de l’écrivain face Ă  un public qui peut-ĂȘtre le connaĂźt mal. Mais aussi nĂ©cessitĂ© de reconnaĂźtre que dĂ©cidĂ©ment le texte simonien est devenu l’apanage de l’institution universitaire. Ainsi, ce qui apparaissait en 1985 puis en 1998 comme l’expression d’une reconnaissance salutaire peut en 2018 sonner le glas du plaisir du texte, seule garantie valide de la survie d’une Ɠuvre. Et, cette annĂ©e, les romans de Claude Simon ne sont prĂ©sents dans aucun de mes programmes de cours. ManiĂšre bien Ă©videmment d’en parler ailleurs et autrement.
élandu coeur propos et souvenirs: Evaluating New Technologies : Methodological Problems for the Ethical Assessment of Technology Developments: Fils de présidents : une vie au coeur du pouvoir: Georges Pompidou : un président passionné de poésie: Info-éthique : quels acteurs face à quelles responsabilités ? : actes du colloque (janvier
par Patrick Kessel, cofondateur et prĂ©sident d’honneur du ComitĂ© LaĂŻcitĂ© RĂ©publique, ancien Grand MaĂźtre du Grand Orient de France. 22 fĂ©vrier 2022Patrick Kessel, Marianne toujours ! 50 ans d’engagement laĂŻque et rĂ©publicain, prĂ©face de GĂ©rard Delfau, Ă©d. L’Harmattan, 8 dĂ©c. 2021, 34 e. La prĂ©sence au gouvernement de ministres et secrĂ©taires d’État tels Robert Badinter, Charles Hernu, Alain Savary, AndrĂ© Delelis, AndrĂ© Henry, Jean-Pierre ChevĂšnement, Roger Quilliot, Georges Fillioud, Louis Mexandeau, Jean-Pierre Cot, Laurent Fabius, Yvette Roudy, Anicet Le Pors, Edwige Avice, Henri Emmanuelli, Georges Lemoine, AndrĂ© Cellard, François Abadie, amis pour beaucoup de longue date, me rassure. Ils ne sont bien Ă©videmment pas tous maçons ! Mais ce sont tous d’authentiques rĂ©publicains. Parmi les nouveaux dĂ©putĂ©s socialistes qualifiĂ©s de "barbus" par la presse de droite, on trouve beaucoup d’enseignants dont un grand nombre de francs-maçons. Une dizaine de ministres, quelques dizaines de membres dans les cabinets ministĂ©riels, Ă©crit Le Monde qui s’interroge on ne sait qui, du PS ou du Grand Orient, a infiltrĂ© l’autre. La formule est bien excessive. Et les faits vont dĂ©montrer qu’il n’y aura pas mĂ©lange de genres. Mais Ă  ce moment prĂ©cis, une seule question brĂ»le les lĂšvres des journalistes les francs-maçons vont-ils peser d’un poids spĂ©cifique sur l’action du gouvernement Mauroy ? Ce que je sais d’eux me donne Ă  penser que, s’ils sont tous de gauche Ă  des degrĂ©s divers et avec des parcours diffĂ©rents, ils sont tous des laĂŻques convaincus. La plupart des dĂ©putĂ©s et sĂ©nateurs francs-maçons, toutes appartenances confondues, se retrouvent Ă  la Fraternelle parlementaire Ă  laquelle je participe moi-mĂȘme comme journaliste accrĂ©ditĂ© au Parlement. Jamais je n’ai assistĂ© Ă  une rĂ©union au cours de laquelle la franc-maçonnerie aurait donnĂ© des consignes aux Ă©lus avant un vote. Qui aurait essayĂ© se serait ridiculisĂ©. Les Ă©lus ont dĂ©jĂ  bien du mal Ă  respecter les consignes de leur parti ! Il en allait diffĂ©remment sous la IIIĂšme RĂ©publique quand les rĂ©publicains affrontaient un parti clĂ©rical trĂšs bien organisĂ©, puissant et trĂšs conservateur. En revanche, sur certains sujets d’ordre Ă©thique davantage que politique, ayant trait aux principes rĂ©publicains et aux libertĂ©s, telles l’interruption volontaire de grossesse en 1974, l’abolition de la peine de mort en 1981, il Ă©tait bien naturel que des complicitĂ©s philosophiques puissent rapprocher des Ă©lus, chacun pour autant conservant sa totale libertĂ© de vote. FidĂšle Ă  la tradition des banquets que les francs-maçons semblent avoir toujours pratiquĂ©e depuis la FĂȘte de la FĂ©dĂ©ration en 1790, contre la Restauration en 1830, contre la Monarchie de Juillet en 1848, pour la RĂ©publique sous la IIIĂšme, la Fraternelle parlementaire organise des dĂźners-dĂ©bats sur les grands sujets du moment et invite des personnalitĂ©s extĂ©rieures Ă  Ă©clairer les Ă©lus de leurs connaissances. Sous la prĂ©sidence rĂ©cente de Christian Bataille puis Christophe-AndrĂ© Frassa, tous deux dĂ©putĂ©s, l’un de gauche, l’autre de droite, fidĂšle Ă  sa tradition, elle s’est mobilisĂ©e pour dĂ©fendre la laĂŻcitĂ© chaque fois qu’elle Ă©tait menacĂ©e. Certains journaux proches de l’extrĂȘme-droite tel Minute le lui ont reprochĂ©, dĂ©nonçant ces acteurs occultes qui attesteraient de la mainmise de la franc-maçonnerie sur la RĂ©publique ! Les mĂȘmes ne s’indignent jamais des discrĂštes rĂ©unions organisĂ©es autour de dignitaires de l’Église associant des Ă©lus catholiques afin d’orienter les choix politiques tout particuliĂšrement en matiĂšre de mƓurs, de libĂ©ration sexuelle, d’émancipation fĂ©minine, de bioĂ©thique et bien sĂ»r de laĂŻcitĂ©. L’alternance politique n’allait d’ailleurs pas interrompre cette politique, l’Église ayant su Ă©tablir des relations de proximitĂ© Ă  gauche lui permettant notamment de contourner la loi de sĂ©paration des Églises et de l’État et de sauvegarder le Concordat en Alsace-Moselle. Elle saurait se faire plus discrĂšte, ce qui ne signifie pas moins efficace, le cardinal Lustiger ayant ses entrĂ©es Ă  l’ÉlysĂ©e. Pendant les quatorze annĂ©es de la prĂ©sidence mitterrandienne, des francs-maçons ministres, dĂ©putĂ©s, sĂ©nateurs, responsables des partis socialiste et radical de gauche, militants, se retrouvent Ă  la Fraternelle Ramadier. On y parle politique bien Ă©videmment. On y dĂ©bat des grands projets de rĂ©forme, souvent travaillĂ©s depuis des annĂ©es dans des loges, comme l’abolition de la peine de mort, l’extension des droits sociaux, l’égalitĂ© entre hommes et femmes, l’école de la RĂ©publique. Cette Fraternelle Ramadier a pris son nom de l’ancien prĂ©sident du Conseil, cĂ©lĂšbre pour avoir refusĂ© de voter les pleins pouvoirs Ă  PĂ©tain en 1940, pour avoir en 1947 Ă©vincĂ© du gouvernement les ministres communistes qui avaient refusĂ© de voter la confiance au gouvernement, et qui joua un rĂŽle important sous la IVĂšme rĂ©publique et au dĂ©but de la VĂšme, sous la prĂ©sidence de Guy Mollet. Sous l’autoritĂ© de GĂ©rard Jacquet, ancien rĂ©sistant, ancien ministre puis de Roger Fajardie, ancien Grand-MaĂźtre adjoint du Grand Orient, compagnon politique de Pierre Mauroy avant de devenir conseiller du PrĂ©sident, homme subtil aux allures dĂ©bonnaires de nonce apostolique, elle met un point d’honneur Ă  organiser de passionnants dĂ©bats mais Ă  ne surtout rien faire. Exprimant vraisemblablement une volontĂ© jupitĂ©rienne du prĂ©sident Mitterrand, jamais clairement formulĂ©e mais toujours nettement insinuĂ©e, Roger Fajardie fait en sorte qu’on ne puisse jamais reprocher aux francs-maçons d’avoir exercĂ© une pression sur le Parti socialiste. Et s’assure que les maçons ne vont pas planter quelque Ă©pine au talon du PrĂ©sident. Au fait des secrets de chaque circonscription politique, fin connaisseur de l’histoire et des hommes, Roger est aussi un brillant conteur captivant ses auditeurs, qui, par l’alchimie du verbe, fait d’un Ă©vĂšnement une fable. Tous les quinze jours, il vient dĂ©jeuner avec moi dans le quartier des Halles prĂšs du siĂšge du Matin de Paris et nous Ă©changeons des anecdotes parfois drĂŽles, parfois pitoyables sur la politique de derriĂšre le rideau des apparences. Ainsi se plaĂźt-il Ă  me raconter qu’à l’occasion d’un comitĂ© directeur du vieux parti socialiste, il se trouve pris Ă  partie par quelques-uns de ses camarades qui lui reprochent son appartenance maçonnique. Comment peux-tu dĂ©fendre ici les intĂ©rĂȘts des travailleurs et ĂȘtre dans ta Loge le frĂšre d’un banquier ? Il faut choisir, ou bien le parti ou bien la franc-maçonnerie ! Relent d’un antimaçonnisme de gauche qui connut ses plus belles heures dans le guesdisme puis le stalinisme, de la mĂȘme façon qu’a prospĂ©rĂ© un antisĂ©mitisme de gauche qui conduisit certains de ses tenants jusqu’à Vichy. Pris Ă  partie, Fajardie, espiĂšgle, d’un regard circulaire parcourt les visages de l’assemblĂ©e comme s’il comptait combien de ses frĂšres Ă©taient assemblĂ©s. L’orateur qui le provoque demande Ă  tous les francs-maçons de dĂ©missionner de leur obĂ©dience pour demeurer au parti socialiste. Savourant en gourmet l’astuce qu’il prĂ©mĂ©dite, le voilĂ  qui met l’assemblĂ©e en face de ses fantasmes "Mes chers camarades, vous me soumettez Ă  la torture en m’imposant un tel choix socialiste je l’ai toujours Ă©tĂ© depuis mon plus jeune Ăąge, mes convictions sont connues, je n’ai rien Ă  dĂ©montrer, franc-maçon, je le suis de la mĂȘme façon et je n’ai jamais manquĂ© d’affirmer le parallĂ©lisme et la complĂ©mentaritĂ© de deux dĂ©marches qui visent Ă  l’amĂ©lioration de l’homme. Il n’y a donc aucune raison de vouloir remettre en question la libertĂ© d’appartenance philosophique aux membres de notre parti. Il y aurait par contre danger Ă  jeter une telle exclusive d’autant que vous ne savez pas qui est maçon et qui ne l’est pas. La suspicion, la mĂ©fiance viendront affaiblir nos rangs tandis que les maçons blessĂ©s - il accompagne Ă  ce moment sa parole d’un geste large du bras donnant l’impression qu’il s’adresse au travers de l’assemblĂ©e Ă  des dizaines de frĂšres- pourraient ĂȘtre tentĂ©s de rĂ©agir - pourraient ĂȘtre tentĂ©s de rĂ©agir." Grand silence dans la salle. Embarras des uns et des autres. Un vieux socialiste qui en a vu d’autres propose de passer Ă  la suite de l’ordre du jour et de classer ce mauvais procĂšs. AprĂšs ces prĂ©cisions, Fajardie se rassoit, se dĂ©lectant goulĂ»ment d’une vĂ©ritĂ© cachĂ©e qu’il me confie il Ă©tait le seul franc-maçon ce jour-lĂ  parmi ses camarades. La peur fondĂ©e sur la mĂ©connaissance avait habilement Ă©tĂ© retournĂ©e contre elle-mĂȘme. Mais l’humour ne suffit pas toujours Ă  renvoyer les fantasmes les plus Ă©culĂ©s. À deux reprises au moins, en 1906 et en 1912, sous l’influence des guesdistes qui voyaient dans la maçonnerie un instrument de "collaboration de classe", le congrĂšs de la SFIO, le parti socialiste de l’époque, eut Ă  voter une motion demandant l’interdiction de la double appartenance, motion qui fut rejetĂ©e. Dans les annĂ©es 1980, une nouvelle offensive, portĂ©e au Parlement europĂ©en par quelques dĂ©putĂ©s travaillistes britanniques, s’en prit aux Ă©lus francs-maçons, leur donnant Ă  choisir entre la Loge et la section. Aujourd’hui, en Grande Bretagne, tout fonctionnaire franc-maçon doit dĂ©clarer son appartenance. Imagine-t-on pareille offensive contre des Ă©lus catholiques, protestants, juifs, musulmans ? DĂšs lors que de tels clichĂ©s continuent d’habiter les tĂȘtes de certaines Ă©lites, on comprend la prudence qui animait Fajardie dans l’animation de la Fraternelle Sa lĂ©gendaire appĂ©tence pour la bonne chĂšre, sybarite dotĂ© d’une grande culture culinaire et d’une connaissance quasi parfaite des cĂ©pages blancs de Loire, des terroirs et des propriĂ©taires, aura eu raison de son cƓur qu’il avait par ailleurs si gĂ©nĂ©reux, dans un petit train de province, loin des soins, alors qu’il rĂȘvait que son onctuositĂ© de prĂ©lat et ses qualitĂ©s de diplomate convainquent le PrĂ©sident d’exaucer son impossible rĂȘve, ĂȘtre nommĂ© ambassadeur au Vatican. La Fraternelle Ramadier demeura un des rares lieux oĂč chacun s’imposait un ton toujours modĂ©rĂ©, Ă  la façon des loges oĂč l’opposition des idĂ©es n’empĂȘche pas le respect des intervenants. Le parti socialiste devait composer avec la montĂ©e de courants antagonistes agrĂ©gĂ©s autour de fortes personnalitĂ©s et leur transformation au fil du temps en Ă©curies de prĂ©sidentiables avec cette part d’inimitiĂ© et bientĂŽt de dĂ©testation qui rendait difficile, voire impossible toute tentative de conciliation. Un Ă©tat d’esprit qui s’imposa au cƓur de l’arĂšne Ă  l’occasion du triste CongrĂšs de Rennes en 1990, oĂč les dĂ©lĂ©guĂ©s polĂ©miquĂšrent entre eux avec virulence jusqu’au dernier instant sous l’Ɠil assassin des camĂ©ras de tĂ©lĂ©vision. À cette Ă©poque, membre d’un cabinet ministĂ©riel, je suis en temps rĂ©el les rĂ©unions tout au long de la nuit, les avancĂ©es, les ruptures, les ralliements, les trahisons, les coups de semonce inutiles de l’ÉlysĂ©e, tout ce cĂŽtĂ© opĂ©rette des congrĂšs politiques qui, cette fois, n’est pas feinte. À la tribune, les orateurs parmi lesquels un certain nombre de francs-maçons se succĂšdent, pourfendant leurs adversaires de courants comme s’il s’agissait d’ennemis de classe ! Lionel Jospin et Laurent Fabius jouent la prise en main du parti et leurs mousquetaires s’affrontent sur des dĂ©bats dits d’orientation. Les autres leaders, par le jeu des alliances, font plusieurs fois basculer la majoritĂ© au cours de cette interminable nuit d’affrontements verbaux, de tractations secrĂštes, promesses et trahisons. La presse a largement relayĂ© et entretenu les dĂ©bats prĂ©paratoires, un tour de chauffe vite transformĂ© en bataille de tranchĂ©e que se livrent les camarades du poing et la rose. La tension dans ce palais des CongrĂšs atteint son maximum. Vient la traditionnelle rĂ©union du cercle Ramadier Ă  l’occasion d’une suspension de sĂ©ance dans une salle adjacente et fermĂ©e. Le pire est Ă  craindre car les frĂšres qui ont pris la parole en sĂ©ance plĂ©niĂšre n’ont pas mĂ©nagĂ© leurs efforts, leurs arguments, pour certains leurs formules assassines. Mais le temps d’un bref moment, la magie maçonnique opĂšre son Ɠuvre et l’on voit nombre de ceux qui s’escrimaient quelques instants auparavant sur la tribune officielle se donner l’accolade fraternelle si chĂšre aux anciens chevaliers, et qui fait de la franc-maçonnerie un espace privilĂ©giĂ© d’humanitĂ©. Certes, sans naĂŻvetĂ©, y a-t-il probablement quelques baisers de Judas dans ce concert de fraternitĂ©. Mais pour moi, tĂ©moin privilĂ©giĂ© du moment, c’est une merveilleuse occasion d’imaginer que les idĂ©es peuvent encore peser sur la rĂ©alitĂ© et le respect prendre le pas sur la vindicte. Ni la Fraternelle parlementaire, ni la Fraternelle socialiste, Ă  ma connaissance, ne firent pression sur le gouvernement pour soutenir telle ou telle orientation politique ou s’y opposer. Nous allions Ă  quelques-uns regretter ce choix, respectueux dans son principe, absurde politiquement, en particulier quand viendra le temps de la rĂ©forme de l’école publique. Nous Ă©tions convaincus que tous les radicaux, tous les socialistes et tous les francs-maçons se retrouveraient pour promouvoir la laĂŻcitĂ©. L’histoire allait se dĂ©rouler tout autrement. Sur les autres sujets, l’unanimitĂ© ne pouvait pas ĂȘtre au rendez-vous. Les dĂ©bats Ă©taient vifs autour des nationalisations et de la politique Ă©conomique. Les maçons Ă©taient de tous les courants et ils ne furent malheureusement pas les derniers lorsque ceux-ci nous donnĂšrent le triste spectacle que l’on sait. Des francs-maçons de l’opposition s’organisent Ă©galement en groupes fraternels. Le Carrefour de l’AmitiĂ©, de droite, occupe ce crĂ©neau. FrĂ©quentĂ© majoritairement par des membres de la Grande Loge Nationale Française, officiellement apolitique, en rĂ©alitĂ© majoritairement de droite, il sĂ©duit des membres de la Grande Loge de France et du Grand Orient. Jacques Chirac est invitĂ© Ă  un des dĂźners-dĂ©bats. Les prises de position publiques du Carrefour suscitent des remous. Les frĂšres du Grand Orient sont invitĂ©s Ă  en dĂ©missionner. Les radicaux valoisiens qui ont quittĂ© le parti radical lorsque celui-ci a signĂ© le programme commun de la gauche, ralliĂ©s pour beaucoup Ă  ValĂ©ry Giscard d’Estaing, comptent de nombreux frĂšres, dont plus d’un et non des moindres, au Grand Orient. Ils ne s’en cachent pas. Ils auraient pu jouer un rĂŽle politique important dans la recomposition de la droite les annĂ©es suivantes s’ils avaient clairement assumĂ© l’hĂ©ritage philosophique du radicalisme. Ce ne fut pas le cas, notamment au moment de la bataille scolaire de 1984, certains de leurs responsables, tel AndrĂ© Rossinot, alors prĂ©sident du parti, manifestant Ă  la tĂȘte du cortĂšge en faveur de l’école privĂ©e. CĂŽtĂ© RPR, Philippe Dechartre, Jean de PrĂ©aumont, Alain Devaquet, anciens ou futurs ministres, Nicole Nebout, rassemblent quelques barons, des Ă©lus, des diplomates, des journalistes maçons, gaullistes, rĂ©publicains qui s’opposeront Ă  la tentation de dĂ©rive de la droite vers son aile extrĂ©miste et Ă  toute alliance Ă©lectorale avec le Front National. Ils sont un certain nombre au sein de la chiraquie, membres du Grand Orient mais aussi de la Grande Loge de France, de la Grande Loge fĂ©minine, de la Grande Loge Nationale OpĂ©ra, dont le Grand-MaĂźtre, Bernard BiĂ©try fut un ami personnel et un soutien actif du maire de Paris. On imagine qu’ils eurent une influence positive lorsque Jacques Chirac, devenu prĂ©sident de la RĂ©publique, et son ministre de l’Éducation Nationale, Luc Ferry, dĂ©cidĂšrent en 2004 de faire interdire le port ostentatoire de signes religieux Ă  l’école. »
Débutoctobre 1968, une rumeur enflamme le tout-Paris : Claude Pompidou, la femme de l'ancien Premier ministre, aurait fait assassiner un play-boy yougoslave, Stephan Markovic, parce qu'il la

Voici 46 cas, autant de situations diffĂ©rentes et souvent dramatiques. Perdre la vie, perdre une bataille ou une place enviĂ©e, perdre un combat idĂ©ologique, perdre la confiance du peuple ou d’un partenaire essentiel, perdre la face et l’honneur. Perdre parce qu’on est faible ou qu’on se croit trop fort, perdre par malchance, par injustice ou par la force des choses et du sens de l’Histoire Louis XVI sous la RĂ©volution. Perdre individuellement, mais aussi en groupe les femmes, les Templiers, les Girondins sous la RĂ©volution, les canuts de Lyon, la Commune de Paris. Certains cas semblent anecdotiques ou paradoxaux – nous assumons, avec des arguments. MalgrĂ© tout, ces perdantes et perdants sont honorĂ©s Ă  des titres divers. Aux grands hommes, la patrie reconnaissante » le PanthĂ©on leur fait place. Ils se retrouvent ici et lĂ  statufiĂ©s ou s’inscrivent dans la toponymie de nos rues, nos places, notre environnement quotidien. Ils figurent dans les livres d’histoire et les dictionnaires, renaissent dans des Ɠuvres de fiction littĂ©raire, théùtrale, lyrique. La sanctification honore volontiers les femmes, Blandine, GeneviĂšve, Jeanne d’Arc. Parfois, les perdants font Ă©cole, crĂ©ant un courant d’idĂ©es, une thĂ©orie, voire une religion qui change le monde – JĂ©sus-Christ, l’exemple incroyable mais vrai ». Autant de qui perd gagne » permettant une revanche posthume. On peut en tirer une petite philosophie de l’Histoire et rĂ©flĂ©chir au travail de mĂ©moire dont on parle tant. C’est le but de nos Ă©ditos et la preuve que les citations bien choisies se rĂ©vĂšlent toujours utiles. C’est aussi l’occasion de dĂ©mentir deux personnages exceptionnellement rĂ©unis À la fin, il n’y a que la mort qui gagne. » 2980Charles de GAULLE 1890-1970, citant volontiers ce mot de STALINE dans ses MĂ©moires de guerre.Toutes les citations numĂ©rotĂ©es sont comme toujours tirĂ©es de notre Histoire en citations Honneur aux perdants, retrouvez nos quatre Ă©ditos De la Gaule aux guerres de Religion Du rĂšgne d’Henri IV Ă  la RĂ©volution De l’Empire Ă  la DeuxiĂšme RĂ©publique De la TroisiĂšme RĂ©publique Ă  nos jours IV. De la TroisiĂšme RĂ©publique Ă  nos jours LOUISE MICHEL ET LA COMMUNE DE PARIS RĂ©volution manquĂ©e, incarnĂ©e par la Vierge rouge » et des socialistes plus ou moins utopistes et radicaux dont les idĂ©es vont nourrir nombre de rĂ©formes Ă  venir. Suite Ă  la tragique rĂ©pression, la mĂ©moire de la Semaine sanglante » marquera les gĂ©nĂ©rations de gauche. Faisons la rĂ©volution d’abord, on verra ensuite. »2330 Louise MICHEL 1830-1905. L’ÉpopĂ©e de la rĂ©volte le roman vrai d’un siĂšcle d’anarchie 1963, Gilbert Guilleminault, AndrĂ© MahĂ© C’est l’hĂ©roĂŻne la plus populaire de cette page d’histoire ex-institutrice, fĂ©ministe, militante rĂ©publicaine et anarchiste, surnommĂ©e la Vierge rouge », elle appelle Ă  l’insurrection les quartiers rouges » de la capitale, ceux qui font toujours peur aux bourgeois Montmartre, Belleville, ĂŽ lĂ©gions vaillantes, / Venez, c’est l’heure d’en finir. / Debout ! La honte est lourde et pesantes les chaĂźnes, / Debout ! Il est beau de mourir. » On la voit sur les barricades dĂšs les premiers jours du soulĂšvement de Paris cause perdue d’avance, rĂ©volution sans espoir, utopie d’un Paris libre dans une France libre » ? En tout cas, rien de moins prĂ©mĂ©ditĂ© que ce mouvement qui Ă©chappe Ă  ceux qui tentent de le diriger, au nom d’idĂ©aux d’ailleurs contradictoires. Au nom du peuple, la Commune est proclamĂ©e ! »2363 Gabriel RANVIER 1828-1879, place de l’HĂŽtel-de-Ville, DĂ©claration du 28 mars 1871. Histoire socialiste, 1789-1900, volume XI, La Commune, Louis Dubreuilh, sous la direction de Jean JaurĂšs 1908 Ranvier est maire de Belleville, ouvrier peintre dĂ©corateur et disciple de Blanqui - l’éternel insurgĂ©. Les Ă©lections municipales du 26 mars n’ont mobilisĂ© que la moitiĂ© des Parisiens 230 000 votants, trĂšs majoritairement de gauche, beaucoup de gens des beaux quartiers ayant fui la capitale 18 Ă©lus bourgeois » refuseront de siĂ©ger Ă  cĂŽtĂ© des 72 rĂ©volutionnaires, jacobins, proudhoniens, blanquistes, socialistes, internationaux. Comment dĂ©finir cette Commune ? Un conseil municipal de gauche, un contre-gouvernement Ă©lu, provisoire et rival de celui de Versailles, un exemple devant servir de modĂšle Ă  la France ? La Commune de Paris se veut tout Ă  la fois, mais ne vivra pas deux mois. Paris ouvrait Ă  une page blanche le livre de l’histoire et y inscrivait son nom puissant ! »2364 ComitĂ© central de la garde nationale, Proclamation du 28 mars 1871. Histoire du socialisme 1879, BenoĂźt Malon En prĂ©sence de 200 000 Parisiens, le comitĂ© central de la garde nationale s’efface devant la Commune, le jour de sa proclamation officielle. Le lyrisme s’affiche Aujourd’hui il nous a Ă©tĂ© donnĂ© d’assister au spectacle populaire le plus grandiose qui ait jamais frappĂ© nos yeux, qui ait jamais Ă©mu notre Ăąme. » Le mouvement s’étend Ă  quelques villes Lyon, Marseille, Narbonne, Toulouse, Saint-Étienne. La rĂ©volution sera la floraison de l’humanitĂ© comme l’amour est la floraison du cƓur. »2365 Louise MICHEL 1830-1905, La Commune, Histoire et souvenirs 1898 Un quart de siĂšcle aprĂšs, elle fait revivre ces souvenirs vibrants et tragiques. Face aux Communards ou FĂ©dĂ©rĂ©s, les Versaillais se prĂ©parent, troupes commandĂ©es par les gĂ©nĂ©raux Mac-Mahon et Vinoy. En plus des 63 500 hommes dont l’État dispose, il y a les 130 000 prisonniers libĂ©rĂ©s par Bismarck – hostile Ă  tout mouvement populaire Ă  tendance rĂ©volutionnaire. Le 30 mars, Paris est pour la seconde fois ville assiĂ©gĂ©e, bombardĂ©e, et Ă  prĂ©sent par des Français. Premiers affrontements, le 2 avril bataille de Courbevoie. Les FĂ©dĂ©rĂ©s ou Communards tentent une sortie de Paris pour marcher sur Versailles oĂč l’AssemblĂ©e nationale s’est repliĂ©e, mais sont arrĂȘtĂ©s par le canon du Mont ValĂ©rien, fort stratĂ©gique investi par les Versaillais depuis le 21 mars les rĂȘveurs de la Commune qualifient les obus qui les Ă©crasent de choses printaniĂšres » ! 17 tuĂ©s dont les 5 premiers fusillĂ©s de la Commune et 25 prisonniers chez les FĂ©dĂ©rĂ©s. Dans l’armĂ©e versaillaise, 5 morts et 21 blessĂ©s. Nous avons la mission d’accomplir la rĂ©volution moderne la plus large et la plus fĂ©conde de toutes celles qui ont illuminĂ© l’histoire. »2369 La Commune, DĂ©claration au peuple français, 19 avril 1871. EnquĂȘte parlementaire sur l’insurrection du 18 mars 1872, Commission d’enquĂȘte sur l’insurrection du 18 mars, comte NapolĂ©on Daru La Commune ne fait pas que se dĂ©fendre et attaquer. Elle gouverne Paris et prend des mesures importantes qui prĂ©figurent l’Ɠuvre de la TroisiĂšme RĂ©publique sĂ©paration des Églises et de l’État, instruction laĂŻque, gratuite et obligatoire en projet. Elle est socialiste quand elle communalise » par dĂ©cret du 16 avril les ateliers abandonnĂ©s par les fabricants en fuite, pour en donner la gestion Ă  des coopĂ©ratives formĂ©es par les Chambres syndicales ouvriĂšres. Ce qui fait Ă©crire Ă  Karl Marx, l’annĂ©e mĂȘme C’était la premiĂšre rĂ©volution dans laquelle la classe ouvriĂšre Ă©tait ouvertement reconnue comme la seule qui fĂ»t encore capable d’initiatives sociales » La Guerre civile en France. Paris sera soumis Ă  la puissance de l’État comme un hameau de cent habitants. »2373 Adolphe THIERS 1797-1877, DĂ©claration du 15 mai 1871. La Commune 1904, Paul et Victor Margueritte Ces mots plusieurs fois rĂ©pĂ©tĂ©s annoncent la Semaine sanglante du 22 au 28 mai. Le chef du gouvernement amasse toujours plus de troupes aux portes de Paris, espĂ©rant sans trop y croire que ses menaces feront cĂ©der les Communards. Puisqu’il semble que tout cƓur qui bat pour la libertĂ© n’ait droit qu’à un peu de plomb, j’en rĂ©clame ma part, moi ! Si vous n’ĂȘtes pas des lĂąches, tuez-moi ! »2375 Louise MICHEL 1830-1905. Histoire de ma vie 2000, Louise Michel, XaviĂšre Gauthier La Vierge rouge se retrouve sur les barricades, fusil sur l’épaule. Paris est reconquis, rue par rue, et incendiĂ©. La derniĂšre barricade des FĂ©dĂ©rĂ©s, rue Ramponeau, tombe le 28 mai 1871. À 15 heures, toute rĂ©sistance a cessĂ©. Le bon Dieu est trop Versaillais. »2378 Louise MICHEL 1830-1905, La Commune, Histoire et souvenirs 1898 Elle tĂ©moigne de l’inĂ©vitable victoire des Versaillais, vu l’inĂ©galitĂ© des forces et de l’organisation. Bilan de la Semaine sanglante, du 22 au 28 mai 1871 au moins 20 000 morts chez les insurgĂ©s, 35 000 selon Rochefort. De son cĂŽtĂ©, l’armĂ©e bien organisĂ©e des Versaillais a perdu moins de 900 hommes, depuis avril. Les journalistes, unanimes, condamnent la rĂ©pression. La Seine est devenue un fleuve de sang. Dans Le SiĂšcle, on Ă©crit C’est une folie furieuse. On ne distingue plus l’innocent du coupable. » Et dans Paris-Journal du 9 juin C’est au bois de Boulogne que seront exĂ©cutĂ©s Ă  l’avenir les gens condamnĂ©s par la cour martiale. Toutes les fois que le nombre des condamnĂ©s dĂ©passera dix hommes, on remplacera par une mitrailleuse le peloton d’exĂ©cution. » 3 500 insurgĂ©s sont fusillĂ©s sans jugement dans Paris, prĂšs de 2 000 dans la cour de prison de la Roquette, plusieurs centaines au cimetiĂšre du PĂšre-Lachaise c’est le mur des FĂ©dĂ©rĂ©s », de sinistre mĂ©moire. Il y aura 400 000 dĂ©nonciations Ă©crites – sur 2 millions de Parisiens, ce fort pourcentage de dĂ©lateurs montre assez la haine accumulĂ©e. On ne peut pas tuer l’idĂ©e Ă  coups de canon ni lui mettre les poucettes [menottes]. »2381 Louise MICHEL 1830-1905, La Commune, Histoire et souvenirs 1898 CondamnĂ©e, dĂ©portĂ©e en Nouvelle-CalĂ©donie, amnistiĂ©e en 1880, elle reviendra en France pour continuer le combat en militante. Le cadavre est Ă  terre, mais l’idĂ©e est debout », dit Hugo Ă  propos de la Commune. La force des idĂ©es est l’une des leçons de l’histoire, la Commune en est l’illustration, malgrĂ© la confusion des courants qui l’animĂšrent. Un chant y est nĂ©, porteur d’une idĂ©e qui fera le tour du monde et en changera le cours, c’est L’Internationale Debout ! Les damnĂ©s de la terre ! / Debout ! Les forçats de la faim ! 
 C’est la lutte finale ; / Groupons-nous et demain / L’Internationale / Sera le genre humain. » Paroles d’EugĂšne Pottier, mises en musique par Pierre Degeyter. [La Commune] fut dans son essence, elle fut dans son fond la premiĂšre grande bataille rangĂ©e du Travail contre le Capital. Et c’est mĂȘme parce qu’elle fut cela avant tout [
] qu’elle fut vaincue et que, vaincue, elle fut Ă©gorgĂ©e. »2384 Jean JAURÈS 1859-1914, Histoire socialiste, 1789-1900, volume XI, La Commune, Louis Dubreuilh 1908 JaurĂšs, qui dirige ce travail en 13 volumes juge Ă  la fois en historien et en socialiste. Homme politique, il sera toujours du cĂŽtĂ© du Travail et des travailleurs. N’excluant pas le recours Ă  la force insurrectionnelle malgrĂ© son pacifisme, il aurait sans doute Ă©tĂ© Communard. Le Paris ouvrier, avec sa Commune, sera cĂ©lĂ©brĂ© Ă  jamais comme le glorieux fourrier d’une sociĂ©tĂ© nouvelle. Ses martyrs seront enclos dans le grand cƓur de la classe ouvriĂšre. »2385 Karl MARX 1818-1883, La Guerre civile en France 1871 Hommage du militant rĂ©volutionnaire, mĂȘme si le thĂ©oricien socialiste Ă©mit de nombreuses rĂ©serves ! Le mouvement ouvrier français restera marquĂ© par les consĂ©quences de la Commune vide dans le rang de ses militants, haine des victimes contre les bourreaux, force du mythe qui s’attache Ă  jamais au nom de la Commune. ADOLPHE THIERS RĂ©publicain de la premiĂšre heure et longtemps condamnĂ© Ă  l’opposition malgrĂ© son goĂ»t du pouvoir, il rate de peu la prĂ©sidence sous la TroisiĂšme RĂ©publique et reste impopulaire dans l’histoire pour sa rĂ©pression de la Commune. Double injustice rĂ©parĂ©e par quelques historiens. Faisons donc la RĂ©publique, la RĂ©publique honnĂȘte, sage, conservatrice. »2060 Adolphe THIERS 1797-1877, Manifeste de M. Thiers. Portraits historiques 1883, H. Draussin Apparition d’un homme politique qui va faire carriĂšre jusque sous la TroisiĂšme RĂ©publique. Pour l’heure, Louis Adolphe Thiers est un jeune avocat qui a frĂ©quentĂ© les milieux libĂ©raux et collaborĂ© au Constitutionnel. En janvier 1830, il crĂ©e un autre journal d’opposition orlĂ©aniste, Le National. Il dĂ©fend une monarchie constitutionnelle de type anglais et s’oppose aux Doctrinaires, Guizot et Royer-Collard pour qui le trĂŽne n’est pas un fauteuil vide ». Ces dĂ©bats agitent l’opinion. La Charte revue et corrigĂ©e, approuvĂ©e le 7 aoĂ»t 1830 par une majoritĂ© de dĂ©putĂ©s 219 contre 33, mais plus de 200 absents, reconnaĂźt certes la libertĂ© de la presse, l’abolition de la censure, l’initiative des lois Ă  la Chambre, la suppression des justices d’exception, tandis que le catholicisme n’est plus religion d’État. Mais l’on se retrouve quand mĂȘme en monarchie. Le 9 aoĂ»t, le duc d’OrlĂ©ans prĂȘte serment sur la Charte et devient Louis-Philippe Ier, roi des Français et non plus roi de France. Thiers va cautionner cette monarchie constitutionnelle, comme le trĂšs rĂ©publicain La Fayette qui s’y est ralliĂ©. Ministre de Louis-Philippe Ă  plusieurs reprises, Thiers tentera de sauver le rĂ©gime en 1848. La RĂ©publique est le gouvernement qui nous divise le moins. »2201 Adolphe THIERS 1797-1877, AssemblĂ©e lĂ©gislative, 13 fĂ©vrier 1850. L’Empire libĂ©ral Louis-NapolĂ©on et le coup d’état 1897, Émile Ollivier Le parti de l’Ordre est au pouvoir et cette majoritĂ© satisfait ou rassure, sous cette DeuxiĂšme RĂ©publique. Mais Thiers se mĂ©fie bientĂŽt de Louis-NapolĂ©on devenu prĂ©sident de cette RĂ©publique, avant d’instaurer le Second Empire suite Ă  un coup d’État. Thiers se retrouve dans l’opposition rĂ©publicaine et se fait remarquer pour sa dĂ©fense des libertĂ©s, puis son hostilitĂ© Ă  la guerre franco-allemande. Pacifier, rĂ©organiser, relever le crĂ©dit, ranimer le travail, voilĂ  la seule politique possible et mĂȘme concevable en ce moment. »2355 Adolphe THIERS 1797-1877, prĂ©sentant son ministĂšre et son programme Ă  l’AssemblĂ©e, Bordeaux, 19 fĂ©vrier 1871. Questions ouvriĂšres et industrielles en France sous la TroisiĂšme RĂ©publique 1907, Pierre Émile Levasseur 1871 annĂ©e de tous les pouvoirs et tous les dangers pour cet homme de 74 ans, Ă©lu dĂ©putĂ© par 26 dĂ©partements Ă  la fois et devenu chef du pouvoir exĂ©cutif de la RĂ©publique », le 17 fĂ©vrier. Lourde tĂąche, dans une France vaincue et dĂ©chirĂ©e. En vieux routier de la politique, Thiers s’engage Ă  respecter la trĂȘve des partis et Ă  diffĂ©rer toute discussion sur la forme du rĂ©gime et la Constitution. Son programme prend le nom de Pacte de Bordeaux. Mais la guerre civile va de nouveau bouleverser le pays et dĂ©jouer tous les plans politiques. Il n’y a qu’une solution radicale qui puisse sauver le pays il faut Ă©vacuer Paris. Je n’abandonne pas la patrie, je la sauve ! »2361 Adolphe THIERS 1797-1877, aux ministres de son gouvernement, 18 mars 1871. Histoire de la France et des Français 1972, AndrĂ© Castelot, Alain Decaux Thiers a dĂ©cidĂ© d’en finir avec la Commune et la Terreur qui s’organise dans Paris, affolant une France majoritairement monarchiste et fondamentalement bourgeoise. Ordre est donnĂ© de dĂ©sarmer les quelque 200 000 gardes nationaux organisĂ©s en FĂ©dĂ©ration et de rĂ©cupĂ©rer les 227 canons qui ont servi Ă  la dĂ©fense de Paris contre les Prussiens, Ă  prĂ©sent regroupĂ©s Ă  Montmartre et Belleville, quartiers populaires. Les 4 000 soldats font leur devoir sans enthousiasme. La foule, les femmes surtout s’interposent. Deux gĂ©nĂ©raux, l’un chargĂ© de l’opĂ©ration, l’autre Ă  la retraite, mais reconnu, sont arrĂȘtĂ©s, traĂźnĂ©s au ChĂąteau rouge ancien bal de la rue Clignancourt, devenu quartier gĂ©nĂ©ral des FĂ©dĂ©rĂ©s, blessĂ©s, puis fusillĂ©s Lecomte et Thomas. Clemenceau, maire du XVIIIe arrondissement et tĂ©moin, est atterrĂ©. On ne connaĂźtra jamais les responsables de cette exĂ©cution sommaire leur nom est la foule » Georges Duby. C’est l’étincelle qui met le feu Ă  Paris, insurgĂ© en quelques heures. Thiers renonce Ă  rĂ©primer l’émeute – il dispose de 30 000 soldats face aux 150 000 hommes de la garde nationale et il n’est mĂȘme pas sĂ»r de leur fidĂ©litĂ©. Il abandonne Paris au pouvoir de la rue et regagne Versailles, ordonnant Ă  l’armĂ©e et aux corps constituĂ©s d’évacuer la place. C’est la premiĂšre journĂ©e de la Commune au sens d’insurrection la tragĂ©die va durer 72 jours. Elle se termine par la Semaine sanglante du 22 au 28 mai. La presse dĂ©nonce la sauvagerie de la rĂ©pression, mais Thiers gagne en popularitĂ© auprĂšs des Français pour ce rĂ©tablissement de l’ordre devenu indispensable. L’heure de gloire semble enfin arrivĂ©e pour le vieux RĂ©publicain. Chef, c’est un qualificatif de cuisinier ! »2418 Adolphe THIERS 1797-1877. Histoire de la France et des Français 1972, AndrĂ© Castelot, Alain Decaux Le petit homme, surnommĂ© Foutriquet pour sa houppe de cheveux et son mĂštre cinquante-cinq, troque son titre de chef du pouvoir exĂ©cutif pour celui, plus prestigieux, de prĂ©sident de la RĂ©publique autoproclamĂ©, le 31 aoĂ»t 1871, tandis que l’AssemblĂ©e se proclame Constituante c’est la loi Rivet dĂ©putĂ© de centre gauche, ami de Thiers. Rappelons que la tĂąche institutionnelle avait sagement Ă©tĂ© remise Ă  plus tard, en fĂ©vrier 1871. Profitant de son prestige, le libĂ©rateur du territoire » s’impose, aussi conservateur que rĂ©publicain, soutenu par Gambetta lui-mĂȘme, rĂ©publicain d’extrĂȘme gauche Ă  la tĂȘte de l’Union rĂ©publicaine. La RĂ©publique existe, elle est le gouvernement lĂ©gal du pays, vouloir autre chose serait une nouvelle rĂ©volution et la plus redoutable de toutes. »2422 Adolphe THIERS 1797-1877, Discours de rentrĂ©e parlementaire, 13 novembre 1872. Discours parlementaires de M. Thiers 1872-1877 posthume, 1883 Il veut dĂ©fendre sa » RĂ©publique qui n’est toujours qu’un rĂ©gime provisoire. Il rappelle que c’est le rĂ©gime qui nous divise le moins » autre idĂ©e opportuniste » et met en garde les monarchistes, majoritaires de l’AssemblĂ©e. La RĂ©publique sera conservatrice ou elle ne sera pas. » Il prĂȘche toujours pour sa paroisse, en l’occurrence sa personne. Et d’insister Tout gouvernement doit ĂȘtre conservateur et nulle sociĂ©tĂ© ne pourrait vivre sans un gouvernement qui ne le serait point. » Il vise alors les rĂ©publicains avancĂ©s de l’AssemblĂ©e. C’est la tactique classique du un coup Ă  droite, un coup Ă  gauche ». Fort de son autoritĂ©, Thiers veut rassurer le pays et pour faire la RĂ©publique, jouer l’alliance des rĂ©publicains modĂ©rĂ©s et des orlĂ©anistes, contre les extrĂȘmes lĂ©gitimistes ultras inconditionnels du drapeau blanc et nostalgiques de la Commune rĂ©volutionnaire. Le conflit va Ă©clater quelques mois plus tard. Il faut tout prendre au sĂ©rieux, mais rien au tragique. »2427 Adolphe THIERS 1797-1877, Discours Ă  la Chambre des dĂ©putĂ©s, 24 mai 1873. Annales de l’AssemblĂ©e nationale, volume XVIII 1873, AssemblĂ©e nationale ContestĂ© pour son parti pris rĂ©publicain par les monarchistes majoritaires, Thiers a perdu son droit de parole Ă  l’AssemblĂ©e prĂ©sident de la RĂ©publique, il ne peut plus s’exprimer que par un message lu, ne donnant lieu Ă  aucune discussion loi de Broglie, du 13 mars. Il se conforme Ă  ce cĂ©rĂ©monial chinois ». La veille, de Broglie l’a interpellĂ© sur la nĂ©cessitĂ© de dĂ©fendre l’ ordre moral », des dĂ©putĂ©s royalistes lui demandant de faire prĂ©valoir une politique rĂ©solument conservatrice ». Le 24 mai au matin, avant la sĂ©ance Ă  la Chambre, il rĂ©affirme sa position rĂ©publicaine La monarchie est impossible il n’y a qu’un trĂŽne, et on ne peut l’occuper Ă  trois ! » Outre le comte de Paris et le comte de Chambord, il y a encore le prince impĂ©rial, fils de NapolĂ©on III. L’aprĂšs-midi, en son absence, par 360 voix contre 334, l’AssemblĂ©e vote un blĂąme contre Thiers. Il offre sa dĂ©mission. Il n’y est pas obligĂ©, mais il est sĂ»r qu’on le rappellera et sa position en sera renforcĂ©e. Le soir, sa lettre est lue Ă  l’AssemblĂ©e qui procĂšde aussitĂŽt Ă  l’élection du nouveau prĂ©sident. La gauche s’abstient
 et le marĂ©chal Mac-Mahon, candidat des royalistes, est Ă©lu. Thiers a jouĂ©, et perdu. Saluons son humour devenu proverbe Il faut tout prendre au sĂ©rieux, mais rien au tragique. » La RĂ©publique, c’est la nĂ©cessitĂ©. »2455 Adolphe THIERS 1797-1877. Discours parlementaires de M. Thiers 1872-1877 posthume, 1883 Dernier message du vieux rĂ©publicain. Il meurt le 3 septembre 1877. Sa famille refuse les obsĂšques officielles. Mais 384 villes sont reprĂ©sentĂ©es et une foule estimĂ©e Ă  un million assiste Ă  ses funĂ©railles parisiennes. L’émotion nationale atteste Ă  la fois l’immense prestige du petit homme et son incontestable rĂ©ussite son ralliement Ă  la RĂ©publique a su rallier le pays Ă  ce rĂ©gime et rĂ©concilier les Français avec les rĂ©publicains. Le presse tĂ©moigne de sa popularitĂ©. Ce vieillard, dont l’histoire Ă©tait celle du pays depuis prĂšs de soixante ans, apparaissait dĂ©jĂ  comme un personnage lĂ©gendaire et, cependant, avec le passĂ©, il reprĂ©sentait pour nous, pour la France rĂ©publicaine et libĂ©rale, un avenir long et utile
 Il avait encore des services Ă  rendre, des conseils Ă  donner, des hommes Ă  Ă©clairer ; sa grande expĂ©rience, sa clairvoyance inaltĂ©rable, sa passion du bien public donnaient Ă  ses avis une autoritĂ© tout Ă  fait unique ». Journal Le Temps, 5 septembre 1877, rĂ©sumant la carriĂšre de Thiers L’impopularitĂ© viendra plus tard, par ignorance de l’histoire certes complexe qui a prĂ©cĂ©dĂ© l’avĂšnement de la TroisiĂšme RĂ©publique et par le culte de la Commune qui ne va cesser de grandir. En 1990, l’historien François Roth rĂ©sume bien Il faut dĂ©barrasser la mĂ©moire de Thiers des lĂ©gendes qui l’obscurcissent. La plupart de ses contemporains l’ont portĂ© aux nues et n’ont pas tari d’éloges sur l’illustre nĂ©gociateur », sur l’éminente sagesse de l’illustre homme d’État ». Les historiens du dĂ©but du [XXe] siĂšcle ont baissĂ© un peu le ton tout en l’approuvant. Puis un courant d’opinion amorcĂ© par les ouvrages d’Henri Guillemin l’a rejetĂ©. Pour les insurgĂ©s de 1968 et les cĂ©lĂ©brants intellectuels du centenaire de la Commune, le cas de Thiers n’est mĂȘme plus plaidable [
] Il faut toujours revenir au contexte de fĂ©vrier 1871. Avec ce qui restait d’armĂ©e, la reprise de la guerre Ă©tait une totale illusion. [
] Thiers a Ă©tĂ© suivi, la mort dans l’ñme, par l’immense majoritĂ© de ses compatriotes. » La Guerre de 70, Fayard, 1990. Je n’aimais pas ce roi des prud’hommes. N’importe ! comparĂ© aux autres, c’est un gĂ©ant. »2456 Gustave FLAUBERT 1821-1880, Ă  la mort de Thiers, Correspondance 1893 
 et puis il avait une vertu rare le patriotisme. Personne n’a rĂ©sumĂ© comme lui la France, de lĂ  l’immense effet de sa mort. » Flaubert, un an plus tĂŽt, s’exclamait pourtant Rugissons contre M. Thiers ! Peut-on voir un plus triomphant imbĂ©cile, un croĂ»tard plus abject, un plus Ă©troniforme bourgeois ! Non, rien ne peut donner l’idĂ©e du vomissement que m’inspire ce vieux melon diplomatique, arrondissant sa bĂȘtise sur le fumier de la bourgeoisie ! Il me semble Ă©ternel comme la mĂ©diocritĂ© ! » Cet hommage posthume et du bout de la plume prendra encore plus de valeur par la suite le personnel politique de la TroisiĂšme RĂ©publique fut – sauf exceptions – d’une grande mĂ©diocritĂ©. CLEMENT ADER Inventeur tout terrain, la TroisiĂšme RĂ©publique ne l’a pas soutenu au mĂȘme titre que d’autres noms. Il reste quand mĂȘme dans la mĂ©moire collective comme le premier aviateur de l’histoire. Ils m’ont Ă©tranglĂ© avec la cravate. »2537 ClĂ©ment ADER 1841-1925. Lettre ouverte Ă  mon grand-pĂšre qui avait le tort d’avoir raison 1995, Marcel Jullian C’est le pionnier de l’aviation avec le premier vol au monde d’un mĂštre de haut et cinquante de long sur Éole I, petit monomoteur, en octobre 1890. Une nouvelle dĂ©monstration au camp de Satory en 1897 Ă©choue en raison d’un vent violent et le ministre de la Guerre ne donne pas suite Ă  sa commande. L’ingĂ©nieur et inventeur par ailleurs touche-Ă -tout renonce en 1903, dĂ©couragĂ© par l’incomprĂ©hension des politiques. Il a ce mot bien plus tard, quand on veut le consoler avec la cravate » en le nommant commandeur de la LĂ©gion d’honneur. Louis BlĂ©riot vengera Ader en traversant la Manche en avion juillet 1909 et Roland Garros, la MĂ©diterranĂ©e septembre 1913. Le vol des oiseaux et des insectes m’a toujours prĂ©occupé  J’avais essayĂ© tous les genres d’ailes d’oiseaux, de chauve-souris et d’insectes, disposĂ©es en ailes battantes, ou ailes fixes avec hĂ©lice
 je dĂ©couvris l’importante courbe universelle du vol ou de sustentation. » ClĂ©ment ADER 1841-1925, L’AĂ©roplane Éole, 1893 Il consacra une partie de sa vie Ă  la rĂ©alisation d’un rĂȘve d’enfant faire voler un plus lourd que l’air autopropulsĂ© ». Ses travaux et recherches pour y parvenir coĂ»taient cher. Il trouva d’abord un parrain Ă  la fois gĂ©nĂ©reux et avisĂ©, l’homme d’affaires Isaac Pereire, crĂ©ateur de la banque moderne avec son frĂšre Isaac-Jacob sous le Second Empire. Pendant la guerre de 1870, employĂ© comme scientifique, ClĂ©ment Ader tente sans succĂšs de rĂ©aliser un cerf-volant capable d’emporter un homme. En 1874, il construit un planeur de neuf mĂštres d’envergure, pesant 24 kg et capable de recevoir un moteur. Certaines photographies de son ami Nadar en tĂ©moignent. Des Ă©tudes menĂ©es au MusĂ©e de l’air et de l’espace du Bourget tendraient Ă  montrer que cette machine Ă©tait capable de s’élever dans les airs. Par la suite, ayant convaincu le ministre de la Guerre de financer ses travaux, Ader aidĂ© de Ferdinand Morel, ingĂ©nieur qui dessina les plans de l’avion Chauve-souris mit au point des prototypes aux voilures inspirĂ©es d’observations naturalistes, imitant l’aile de la chauve-souris. Ader pensait qu’une fois le vol maĂźtrisĂ©, une aile rigide comme celle des oiseaux serait plus efficace et plus solide. Mais il ne fallait pas tenter de reproduire le battement des ailes d’oiseau, le concept de voilure fixe Ă©tant plus appropriĂ©. Entre 1890 et 1897, il rĂ©alisa trois appareils l’Éole, financĂ© par lui-mĂȘme, le ZĂ©phyr Ader Avion II et l’Aquilon Ader Avion III subventionnĂ©s par l’État. GÉNÉRAL BOULANGER Le Brav’ gĂ©nĂ©ral jouit d’une incroyable popularitĂ© qui met en danger la RĂ©publique, avant de sombrer dans le ridicule – aidĂ© par Clemenceau. Il laisse quand mĂȘme son nom au boulangisme », prĂ©curseur du populisme de plus en plus rĂ©pandu. La popularitĂ© du gĂ©nĂ©ral Boulanger est venue trop tĂŽt Ă  quelqu’un qui aimait trop le bruit. »2481 Georges CLEMENCEAU 1841-1929. Le Boulangisme 1946, Adrien Dansette Boulanger est imposĂ© au gouvernement le 7 janvier 1886 par les radicaux, Clemenceau en tĂȘte, avec qui les rĂ©publicains opportunistes doivent compter. Le nouveau ministre de la Guerre devient vite le brav’gĂ©nĂ©ral Boulanger » pour l’armĂ©e, sachant se rendre populaire par diverses rĂ©formes qui amĂ©liorent l’ordinaire du conscrit. Sa popularitĂ© va gagner les rangs des innombrables mĂ©contents du rĂ©gime. Le 14 juillet 1886 sera la premiĂšre apothĂ©ose de sa fulgurante ascension. Il reviendra quand le tambour battra,Quand l’étranger m’naç’ra notre frontiĂšreIl reviendra et chacun le suivraPour cortĂšge il aura la France entiĂšre. »2485 Refrain populaire en l’honneur du gĂ©nĂ©ral Revanche 1887, chanson. Le GĂ©nĂ©ral Boulanger jugĂ© par ses partisans et ses adversaires 1888, Georges Grison Le 8 juillet 1887, la foule se masse Ă  la gare de Lyon pour empĂȘcher le dĂ©part de son idole. La popularitĂ© de Boulanger devenait gĂȘnante pour les rĂ©publicains opportunistes qui ont par ailleurs jaugĂ© le personnage, irresponsable et bien lĂ©ger. En mai, il a perdu son portefeuille sous le nouveau ministĂšre Rouvier. Le voilĂ  expĂ©diĂ© Ă  Clermont-Ferrand pour commander le 13e corps d’armĂ©e. Mais le voilĂ  aussi Ă©ligible. Dissolution, RĂ©vision, Constituante. »2492 GĂ©nĂ©ral BOULANGER 1837-1891, Mot d’ordre de sa campagne Ă©lectorale, printemps 1888. Histoire politique de l’Europe contemporaine 1897, Charles Seignobos Le scandale des dĂ©corations Ă  l’ÉlysĂ©e a transformĂ© la vague de sentimentalitĂ© populaire en mouvement politique le boulangisme, devenu syndicat des mĂ©contents », hostile aux rĂ©publicains opportunistes au pouvoir, menace le rĂ©gime parlementaire. Il rassemble des radicaux qui veulent depuis toujours la rĂ©vision de la Constitution Rochefort, Naquet, des patriotes de droite qui ne rĂȘvent que revanche DĂ©roulĂšde, mais aussi des royalistes et des bonapartistes. Boulanger se pose en champion d’une RĂ©publique nouvelle et crĂ©e son Parti rĂ©publicain national. Clemenceau se mĂ©fie, voyant poindre un nouveau Bonaparte, et Charles Floquet, prĂ©sident du Conseil, dans son discours Ă  la Chambre du 19 avril 1888, qualifie le gĂ©nĂ©ral Boulanger de manteau trouĂ© de la dictature », avant de le blesser dans un duel Ă  l’épĂ©e, le 13 juillet. Pourquoi voulez-vous que j’aille conquĂ©rir illĂ©galement le pouvoir quand je suis sĂ»r d’y ĂȘtre portĂ© dans six mois par l’unanimitĂ© de la France ? »2496 GĂ©nĂ©ral BOULANGER 1837-1891, rĂ©ponse aux manifestants, 27 janvier 1889. Histoire de la TroisiĂšme RĂ©publique, volume II 1963, Jacques Chastenet RĂ©ponse aux manifestants qui lui crient À l’ÉlysĂ©e ! » et marchent vers le palais oĂč le prĂ©sident Carnot fait dĂ©jĂ  ses malles ! Boulanger choisit la lĂ©galitĂ© ce 27 janvier 1889, il choisit aussi d’écouter les conseils de sa maĂźtresse passionnĂ©ment aimĂ©e, Marguerite de Bonnemains– il ignore qu’elle travaille pour la police. Cela laisse le temps au gouvernement de rĂ©agir le ministre de l’IntĂ©rieur, Ernest Constans, accuse Boulanger de complot contre l’État. Craignant d’ĂȘtre arrĂȘtĂ©, il fuit en Belgique. Son prestige s’effondre. Il est mort comme il a vĂ©cu en sous-lieutenant. »2499 Georges CLEMENCEAU 1841-1929, apprenant le suicide du gĂ©nĂ©ral Boulanger sur la tombe de sa maĂźtresse Ă  Ixelles Belgique, le 30 septembre 1891. Histoire de la France 1947, AndrĂ© Maurois L’épitaphe est cinglante, mais la fin du Brave GĂ©nĂ©ral » qui fit trembler la RĂ©publique est un fait divers pitoyable. Le 14 aoĂ»t, le SĂ©nat, rĂ©uni en Haute Cour de justice, l’a condamnĂ© par contumace Ă  la dĂ©portation. Sa maĂźtresse, Mme de Bonnemains, meurt du mal du siĂšcle la phtisie, le 16 juillet 1891. Sur sa tombe, toujours fou d’amour, Boulanger fait graver ces mots Marguerite
 Ă  bientĂŽt ». Le 30 septembre, il revient se tirer une balle dans la tĂȘte, pour ĂȘtre enterrĂ© dans la mĂȘme tombe oĂč l’on gravera Ai-je bien pu vivre deux mois et demi sans toi ? » Parlez-nous de lui, grand-mĂšre,Grand-mĂšre, parlez-nous de lui ! »2500 MAC-NAB 1856-1889, Les Souvenirs du populo, chanson. Chansons du chat noir 1890, Camille Baron, Maurice Mac-Nab Parodie de la cĂ©lĂšbre chanson de BĂ©ranger, comme si Bonaparte et Boulanger Ă©taient Ă©galement sensibles au cƓur du peuple Devant la photographie / D’un militaire Ă  cheval / En habit de gĂ©nĂ©ral / Songeait une femme attendrie. / Ses quatre petits-enfants / Disaient Quel est donc cet homme ? » / Mes fils, ce fut dans le temps / Un brave gĂ©nĂ©ral comme / On n’en voit plus aujourd’hui / Son image m’est bien chĂšre ! » » Le phĂ©nomĂšne Boulanger aura durĂ© trois ans. Mais le nationalisme revanchard va lui survivre dans les milieux de droite. Il porte un nom le boulangisme. Il a surtout un hĂ©ritier, le populisme. En France, nous aurons Pierre Poujade et le poujadisme sous la QuatriĂšme RĂ©publique, Le Pen et le Front national trĂšs prĂ©sent sous la CinquiĂšme. Citons aussi Silvio Berlusconi et Matteo Salvini Italie, Donald Trump États-Unis et Jair Bolsonaro BrĂ©sil. Le populisme est toujours le signe d’une dĂ©mocratie malade oĂč les hommes politiques s’adressent directement aux classes populaires, sans jouer le jeu des institutions rĂ©publicaines. Certains historiens s’intĂ©ressant Ă  ce phĂ©nomĂšne ont trouvĂ© un prĂ©cĂ©dent en la personne de Louis-NapolĂ©on Bonaparte. Mais l’on doit pouvoir remonter plus avant, aussi vrai que l’Histoire se rĂ©pĂšte fatalement, pour le pire et le meilleur. CHARLES PÉGUY ChrĂ©tien mystique, politicien atypique, poĂšte Ă©corchĂ© vif, penseur engagĂ©, volontaire pour la Grande Guerre, il meurt aux premiers jours. Son nom reste, littĂ©ralement inclassable Ă  l’image de l’homme. L’ordre, et l’ordre seul, fait en dĂ©finitive la libertĂ©. Le dĂ©sordre fait la servitude. »2540 Charles PÉGUY 1873-1914, Cahiers de la Quinzaine, 5 novembre 1905 RejetĂ© de tous les groupes constituĂ©s, parce que patriote et dreyfusard, socialiste et chrĂ©tien, suspect Ă  l’Église comme au parti socialiste, isolĂ© par son intransigeance et ignorĂ© jusqu’à sa mort du grand public, c’est l’un des rares intellectuels de l’époque Ă©chappant aux Ă©tiquettes. Voyant d’abord pour seul remĂšde au mal universel l’établissement de la RĂ©publique socialiste universelle », il crĂ©e ses Cahiers de la Quinzaine pour y traiter tous les problĂšmes du temps, y publier ses Ɠuvres et celles d’amis Romain Rolland, Julien Benda, AndrĂ© SuarĂšs. La mystique rĂ©publicaine, c’est quand on mourait pour la RĂ©publique, la politique rĂ©publicaine, c’est Ă  prĂ©sent qu’on en vit. »2556 Charles PÉGUY 1873-1914, Notre jeunesse 1910 Et l’essentiel est que [
] la mystique ne soit point dĂ©vorĂ©e par la politique Ă  laquelle elle a donnĂ© naissance ». C’est dire si PĂ©guy, l’humaniste qui se voudra toujours engagĂ© jusqu’à sa mort aux premiers jours de la prochaine guerre, doit souffrir de la politique politicienne nĂ©e sous la TroisiĂšme RĂ©publique. De plus en plus isolĂ©, il tĂ©moigne Ă  la fois contre le matĂ©rialisme du monde moderne, la tyrannie des intellectuels de tout parti, les manƓuvres des politiques, la morale figĂ©e des bien-pensants. Heureux ceux qui sont morts dans une juste guerre !Heureux les Ă©pis mĂ»rs et les blĂ©s moissonnĂ©s ! »2588 Charles PÉGUY 1873-1914, Ève 1914 Deux derniers alexandrins d’un poĂšme qui en compte quelque 8 000. Le poĂšte appelle de tous ses vƓux et de tous ses vers la gĂ©nĂ©ration de la revanche ». Lieutenant, il tombe Ă  la tĂȘte d’une compagnie d’infanterie, frappĂ© d’une balle au front, Ă  Villeroy, le 5 septembre, veille de la bataille de la Marne. Un site lui est dĂ©diĂ©, pour faire vivre sa mĂ©moire. En exergue, une citation qui le dĂ©finit bien Il y a quelque chose de pire qu’une mauvaise pensĂ©e. C’est d’avoir une pensĂ©e toute faire. » À mĂ©diter. JEAN MOULIN Chef de la RĂ©sistance ralliĂ© Ă  de Gaulle, volontaire pour les missions difficiles, martyre panthĂ©onisĂ© avec tous les honneurs dus Ă  sa mĂ©moire, c’est un Nom qui symbolise l’hĂ©roĂŻsme sous la Seconde guerre. Je ne savais pas que c’était si simple de faire son devoir quand on est en danger. »2748 Jean MOULIN 1899-1943, Lettre Ă  sa mĂšre et Ă  sa sƓur, 15 juin 1940. Vies et morts de Jean Moulin 1998, Pierre PĂ©an Sous-prĂ©fet Ă  27 ans, chargĂ© en 1936 d’acheminer vers l’Espagne rĂ©publicaine le matĂ©riel de guerre soviĂ©tique, il est prĂ©fet d’Eure-et-Loir et refusera, le 17 juin, de signer une dĂ©claration accusant de crimes de guerre les troupes coloniales engagĂ©es dans le secteur de Chartres. RĂ©voquĂ© comme franc-maçon par le gouvernement de Vichy en juillet, il rejoindra de Gaulle Ă  Londres en automne. La mort ? DĂšs le dĂ©but de la guerre, comme des milliers de Français, je l’ai acceptĂ©e. Depuis, je l’ai vue de prĂšs bien des fois, elle ne me fait pas peur. »2785 Jean MOULIN 1899-1943. Vies et morts de Jean Moulin 1998, Pierre PĂ©an PrĂ©fet ayant refusĂ© la politique de Vichy, il rejoint Londres Ă  l’automne 1940. ParachutĂ© en France dans les Alpilles le 1er janvier 1942 comme reprĂ©sentant du gĂ©nĂ©ral de Gaulle », il a pour mission d’unifier les trois grands rĂ©seaux de rĂ©sistants de la zone sud Combat, LibĂ©ration, Franc-Tireur. RĂŽle difficile, vue l’extrĂȘme diversitĂ© des sensibilitĂ©s, tendances et courants ; action Ă  haut risque qu’il paiera bientĂŽt de sa vie. Pierre Brossolette qui agit dans la zone nord, lui aussi arrĂȘtĂ©, se suicidera pour ne pas livrer de secrets sous la torture. BafouĂ©, sauvagement frappĂ©, la tĂȘte en sang, les organes Ă©clatĂ©s, il atteint les limites de la souffrance humaine, sans jamais trahir un seul secret, lui qui les savait tous. »2796 Laure MOULIN 1892-1974, sƓur et collaboratrice de Jean Moulin, tĂ©moignage. AntimĂ©moires Le Miroir des limbes, volume I 1976, AndrĂ© Malraux ChargĂ© d’unifier les rĂ©seaux de la zone sud, Jean Moulin a obtenu le ralliement des communistes, particuliĂšrement prĂ©cieux par leur discipline et leur expĂ©rience de la clandestinitĂ©. Le 27 mai 1943, il crĂ©e Ă  Paris le Conseil national de la RĂ©sistance CNR, mais il est livrĂ© aux Allemands le 21 juin Ă  Caluire RhĂŽne, emprisonnĂ© au fort de Montluc Ă  Lyon. Il meurt des suites de tortures, dans le train qui l’emmĂšne en Allemagne. Battus, brĂ»lĂ©s, aveuglĂ©s, rompus, la plupart des rĂ©sistants n’ont pas parlĂ© ; ils ont brisĂ© le cercle du Mal et rĂ©affirmĂ© l’humain, pour eux, pour nous, pour leurs tortionnaires mĂȘmes. »2718 Jean-Paul SARTRE 1905-1980, Situations II 1948 Prisonnier, libĂ©rĂ© grĂące Ă  un subterfuge, Sartre l’éternel engagĂ© participe Ă  la constitution d’un rĂ©seau de rĂ©sistance. ActivitĂ© clandestine Ă  haut risque en France, 30 000 rĂ©sistants fusillĂ©s, plus de 110 000 dĂ©portĂ©s, dont la plupart morts dans les camps, ou Ă  leur retour. Jean Moulin en fut Ă  la fois le chef prĂ©sident du Conseil national de la RĂ©sistance, le hĂ©ros, le martyr et le symbole. Pauvre roi suppliciĂ© des ombres, regarde ton peuple d’ombres se lever dans la nuit de juin constellĂ©e de tortures. »2797 AndrĂ© MALRAUX 1901-1976, Discours au PanthĂ©on, lors du transfert des cendres de Jean Moulin, 19 dĂ©cembre 1964. AndrĂ© Malraux et la politique L’ĂȘtre et l’Histoire 1996, Dominique Villemot Le corps fut renvoyĂ© Ă  Paris en juillet 1943, incinĂ©rĂ© au PĂšre-Lachaise. Ses cendres supposĂ©es telles ont Ă©tĂ© transfĂ©rĂ©es au PanthĂ©on. Cette panthĂ©onisation », reconnaissance suprĂȘme de la patrie Ă  ses hĂ©ros, est l’acte final des cĂ©lĂ©brations du 20e anniversaire de la LibĂ©ration. ROBERT BRASILLACH C’est vĂ©ritablement un cas ». Peut-on lui rendre honneur ? Oui, au titre de son indiscutable talent, reconnu par ses pairs et mĂȘme par de Gaulle ! Mais le gĂ©nĂ©ral refuse sa grĂące au collaborateur et au dĂ©lateur responsable de nombreux morts durant la guerre. En finira-t-on avec les relents de pourriture parfumĂ©e qu’exhale encore la vieille putain agonisante, la garce vĂ©rolĂ©e, fleurant le patchouli et la perte blanche, la RĂ©publique toujours debout sur son trottoir. Elle est toujours lĂ , la mal blanchie, elle est toujours lĂ , la craquelĂ©e, la lĂ©zardĂ©e, sur le pas de sa porte, entourĂ©e de ses michĂ©s et de ses petits jeunots, aussi acharnĂ©s que les vieux. Elle les a tant servis, elle leur a tant rapportĂ© de billets dans ses jarretelles ; comment auraient-ils le cƓur de l’abandonner, malgrĂ© les blennorragies et les chancres ? Ils en sont pourris jusqu’à l’os. »2781 Robert BRASILLACH 1909-1945, Je suis partout, 7 fĂ©vrier 1942 Écrivain de talent et d’autant plus responsable, il s’est engagĂ© politiquement dans l’entre-deux-guerres avec l’Action française le mouvement et le journal, mais c’est comme rĂ©dacteur en chef de Je suis partout qu’il va se faire remarquer. Il prĂŽne un fascisme Ă  la française ». Sa haine du Front populaire et de la RĂ©publique va de pair avec celle des juifs, notamment ceux au pouvoir, comme LĂ©on Blum et Georges Mandel nĂ© Rothschild, ex ministre et dĂ©putĂ©, dont il demande rĂ©guliĂšrement la mise Ă  mort et qui sera assassinĂ© par la Milice française, en juillet 1944. Il est un autre droit que nous revendiquons, c’est d’indiquer ceux qui trahissent. »2794 Robert BRASILLACH 1909-1945. La Force de l’ñge 1960, Simone de Beauvoir La dĂ©lation est la forme la plus infĂąme, parce que la plus lĂąche de la collaboration. À cĂŽtĂ© des trafiquants trop contents de faire des affaires sur le marchĂ© noir, d’autres ont des raisons politiques. Faiblesse devant le vainqueur admirĂ©, calcul pour ĂȘtre du bon » cĂŽtĂ© au jour de la victoire escomptĂ©e, mais aussi et plus rarement, conviction idĂ©ologique mĂȘlant souvent anticommunisme, antisĂ©mitisme, anglophobie. Brasillach est de ce camp. PassĂ© de L’Action française Ă  Je suis partout, il participe Ă  la chasse aux rĂ©sistants, de plus en plus nombreux et organisĂ©s, qui se radicalise en janvier 1943 avec la Milice, police supplĂ©tive de volontaires chargĂ©s de les traquer. Le Service du travail obligatoire STO instituĂ© en fĂ©vrier va augmenter considĂ©rablement le nombre de ceux qui trahissent » pour ne pas aller travailler en Allemagne. DĂ©noncĂ©s frĂ©nĂ©tiquement par Brasillach et ses amis, la rĂ©sistance devient une activitĂ© clandestine Ă  haut risque. Dans les lettres, comme en tout, le talent est un titre de responsabilitĂ©. »2821 Charles de GAULLE 1890-1970, refusant la grĂące de Robert Brasillach. MĂ©moires de Guerre, tome III, Le Salut, 1944-1946 1959, Charles de Gaulle Sur 2 071 recours prĂ©sentĂ©s, de Gaulle en acceptera 1 303. CondamnĂ© Ă  mort pour intelligence avec les Allemands, Brasillach est fusillĂ© le 6 fĂ©vrier 1945. Ses convictions hitlĂ©riennes ne font aucun doute et son journal Je suis partout en tĂ©moigne abondamment. Le procĂšs est bĂąclĂ©, de nombreux confrĂšres tentent de le sauver. Mais le PC voulait la tĂȘte de l’homme responsable de la mort de nombreux camarades et de Gaulle ne lui pardonnait pas celle de Georges Mandel, rĂ©sistant exĂ©cutĂ© par la Milice aprĂšs les appels au meurtre signĂ©s, entre autres, par Brasillach. Et ceux que l’on mĂšne au poteauDans le petit matin glacĂ©,Au front la pĂąleur des cachots,Au cƓur le dernier chant d’OrphĂ©e,Tu leur tends la main sans un mot,O mon frĂšre au col dĂ©grafĂ©. »2822 Robert BRASILLACH 1909-1945, PoĂšmes de Fresnes, Chant pour AndrĂ© ChĂ©nier RĂ©fĂ©rence Ă  ChĂ©nier, poĂšte exĂ©cutĂ© sous la RĂ©volution Ă  la fin de la Terreur, presque au mĂȘme Ăąge. Jean Luchaire journaliste, directeur des Nouveaux Temps et Jean HĂ©rold-Paquis de Radio-Paris subiront le mĂȘme sort, parmi quelque 3 000 condamnĂ©s. L’histoire est Ă©crite par les vainqueurs. »2826 Robert BRASILLACH 1909-1945, Les FrĂšres ennemis dialogue Ă©crit Ă  Fresnes fin 1944, posthume 
 Écrite par les vivants plus que par les vainqueurs et Brasillach ne sera pas fusillĂ© pour cause de dĂ©faite, mais de trahison. L’histoire de la Seconde Guerre mondiale, cette page d’histoire de France encore si sensible et mĂȘme brĂ»lante, fut d’ailleurs réécrite tant de fois que les vaincus ont eu, lĂ©gitimement, le droit de tĂ©moigner aux cĂŽtĂ©s des vainqueurs. PIERRE MENDÈS FRANCE Premier ministre sous la QuatriĂšme RĂ©publique, personnalitĂ© atypique du monde politique, il ne rĂ©siste Ă  l’opposition que 7 mois et 7 jours, mais reste une rĂ©fĂ©rence indiscutable pour les socialistes français en mal de repĂšres. Gouverner, c’est choisir. »2885 Pierre MENDÈS FRANCE 1907-1982, Discours Ă  l’Assemble nationale, 3 juin 1953. Gouverner, c’est choisir 1958, Pierre MendĂšs France La cause fondamentale des maux qui accablent le pays, c’est la multiplicitĂ© et le poids des tĂąches qu’il entend assumer Ă  la fois reconstruction, modernisation et Ă©quipement, dĂ©veloppement des pays d’outre-mer, amĂ©lioration du niveau de vie et rĂ©formes sociales, exportations, guerre en Indochine, grande et puissante armĂ©e en Europe, etc. Or, l’évĂ©nement a confirmĂ© ce que la rĂ©flexion permettait de prĂ©voir on ne peut pas tout faire Ă  la fois. Gouverner, c’est choisir, si difficiles que soient les choix. » Cette formule empruntĂ©e involontairement ? au duc Gaston de LĂ©vis Maximes politiques, 1808 accompagne dĂ©sormais l’homme politique bientĂŽt au pouvoir. Quelques jours avant, dans le premier numĂ©ro de L’Express 16 mai 1953, MendĂšs France Ă©crit À prĂ©tendre tout faire, nous n’avons rĂ©ussi qu’à dĂ©tĂ©riorer notre monnaie, sans satisfaire aucun de nos objectifs [
] Ce n’est pas sur des confĂ©rences diplomatiques, mais sur la vigueur Ă©conomique que l’on fait une grande nation. » Quelques mois plus tard, devant la dĂ©route française dans la guerre d’Indochine, il ajoutera Nous sommes en 1788 », cependant que Paul Reynaud voit en la France l’homme malade de l’Europe ». La dĂ©mocratie, c’est d’abord un Ă©tat d’esprit. »2890 Pierre MENDÈS FRANCE 1907-1982, La RĂ©publique moderne 1962 Le gouvernement Laniel est renversĂ© sur la question de l’Indochine. MendĂšs France le remplace, annonçant qu’il obtiendra un cessez-le-feu avant le 20 juillet. Sa dĂ©claration d’investiture Ă  l’AssemblĂ©e nationale 17 juin 1954 est plutĂŽt musclĂ©e Je ferai appel [
] Ă  des hommes capables de servir, Ă  des hommes de caractĂšre, de volontĂ© et de foi. Je le ferai sans aucune prĂ©occupation de dosage [
] Il n’y aura pas de ces nĂ©gociations interminables que nous avons connues ; je n’admettrai ni exigence ni vetos. Le choix des ministres, en vertu de la Constitution, appartient au prĂ©sident du Conseil investi, et Ă  lui seul. Je ne suis pas disposĂ© Ă  transiger sur les droits que vous m’auriez donnĂ©s par votre investiture. » Bref, MendĂšs France refuse d’emblĂ©e de devenir un homme du systĂšme. Dans son cabinet, il prend des gaullistes le gĂ©nĂ©ral Koenig Ă  la DĂ©fense, des radicaux François Mitterrand Ă  l’IntĂ©rieur. Edgar Faure reste aux Finances et MendĂšs prend le portefeuille des Affaires Ă©trangĂšres. En ce jour anniversaire qui est aussi celui oĂč j’assume de si lourdes responsabilitĂ©s, je revis les hautes leçons de patriotisme et de dĂ©vouement au bien public que votre confiance m’a permis de recevoir de vous. »2891 Pierre MENDÈS FRANCE 1907-1982, TĂ©lĂ©gramme au gĂ©nĂ©ral de Gaulle, 18 juin 1954. MendĂšs France au pouvoir 1965, Pierre Rouanet Son premier jour au pouvoir coĂŻncide avec celui de l’Appel, il y a quatorze. MendĂšs France avoue alors avoir trois grands hommes comme modĂšle PoincarĂ©, Blum et de Gaulle. Le troisiĂšme homme est sceptique sur les chances du nouveau chef du gouvernement Vous verrez, ils ne vous laisseront pas aller jusqu’au bout », lui dira-t-il le 13 octobre. Sept mois et dix-sept jours le titre donnĂ© par MendĂšs France au recueil de ses discours dit trĂšs exactement la durĂ©e de son ministĂšre, renversĂ© le 5 fĂ©vrier 1955. Il cherche plutĂŽt Ă  trancher qu’à s’accommoder, ce qui lui vaut, surtout auprĂšs des jeunes, un prestige certain. Quand on l’aura vu Ă  l’Ɠuvre, on s’apercevra qu’il est dans sa maniĂšre de prendre les problĂšmes l’un aprĂšs l’autre, en quelque sorte Ă  la gorge, sans s’y attarder. Son attitude est celle d’un liquidateur. »2892 AndrĂ© SIEGFRIED 1875-1959, PrĂ©face Ă  l’AnnĂ©e politique 1954 MendĂšs France prend l’affaire indochinoise Ă  bras-le-corps il s’engage Ă  en finir avant le 20 juillet, sinon il dĂ©missionnera. Les accords de GenĂšve sont signĂ©s dans la nuit du 20 au 21 juillet 1954. Le Vietnam est partagĂ© en deux zones, le Nord Ă©tant abandonnĂ© au communisme et Ă  l’influence chinoise et bientĂŽt soviĂ©tique, l’influence occidentale et bientĂŽt amĂ©ricaine prĂ©valant dans le Sud. Six ans et demi de guerre, 3 000 milliards de francs, 92 000 morts et 114 000 blessĂ©s », tel est le bilan de cette guerre, dressĂ© par Jacques Fauvet La QuatriĂšme RĂ©publique. Le Figaro parle d’un deuil » pour la France, mais l’opinion soulagĂ©e sait d’abord grĂ© Ă  MendĂšs d’avoir sorti le pays de ce guĂȘpier oĂč les USA vont s’enliser. Plus tard, il sera pourtant traitĂ© de bradeur ». Les hommes passent, les nĂ©cessitĂ©s nationales demeurent. »2896 Pierre MENDÈS FRANCE 1907-1982, AssemblĂ©e Nationale, nuit du 4 au 5 fĂ©vrier 1955. Pierre MendĂšs France 1981, Jean Lacouture L’AssemblĂ©e vient de lui refuser la confiance 319 voix contre 273 par peur d’une politique d’ aventure » en Afrique du Nord. On l’accuse, dans son discours de Carthage, d’avoir encouragĂ© la rĂ©bellion des Tunisiens et des fellagas d’AlgĂ©rie, alors qu’il est partisan dĂ©clarĂ© de l’AlgĂ©rie française dont il a renforcĂ© la dĂ©fense. Contrairement aux usages et sous les protestations, il remonte Ă  la tribune pour justifier son action. MendĂšs France est restĂ© populaire dans le pays, mais de nombreux parlementaires dĂ©plorent ses positions cassantes, aux antipodes des compromis et compromissions de la QuatriĂšme. Le syndicat » des anciens prĂ©sidents du Conseil et anciens ministres lui reproche de ne pas jouer le jeu politicien et de semer le trouble dans l’hĂ©micycle et ses coulisses. De Gaulle l’avait prĂ©dit Ils ne vous laisseront pas faire ! » MendĂšs France, pour la derniĂšre fois Ă  la tribune, dĂ©fie les dĂ©putĂ©s Ce qui a Ă©tĂ© fait pendant ces sept ou huit mois, ce qui a Ă©tĂ© mis en marche dans ce pays ne s’arrĂȘtera pas
 » Il faudrait ĂȘtre bien inattentif pour croire que l’action de Pierre MendĂšs France fut limitĂ©e aux quelque sept mois et dix-sept jours passĂ©s de juin 1954 Ă  fĂ©vrier 1955 Ă  la tĂȘte du gouvernement de la RĂ©publique. Un Ă©tĂ©, un automne, quelques jours. L’Histoire ne fait pas ces comptes-lĂ . LĂ©on Blum pour un an, Gambetta et JaurĂšs, pour si peu, pour jamais, pour toujours. »2897 François MITTERRAND 1916-1996, Cour d’honneur de l’AssemblĂ©e nationale, Discours du 27 octobre 1982. Le Pouvoir et la rigueur Pierre MendĂšs France, François Mitterrand 1994, Raymond Krakovitch Tel sera l’hommage solennel de Mitterrand, devenu prĂ©sident de la RĂ©publique, Ă  la mort de Pierre MendĂšs France. JACQUES CHABAN-DELMAS Brillant Premier ministre qui lance l’idĂ©e d’une nouvelle sociĂ©tĂ© », il Ă©choue Ă  faire vraiment couple avec Pompidou, prĂ©sident plus pragmatique que social. Sportif aguerri, il se prĂ©cipite trop vite dans la course Ă  sa succession. Il se rattrapera un peu comme maire de Bordeaux pendant 48 ans avec cumul des mandats. Dans ce rĂ©gime, tout ce qui est rĂ©ussi l’est grĂące au prĂ©sident de la RĂ©publique. Tout ce qui ne va pas est imputĂ© au Premier ministre
 mais je ne l’ai compris qu’au bout d’un certain temps. »2937 Jacques CHABAN-DELMAS 1915-2000. Vie politique sous la CinquiĂšme RĂ©publique 1981, Jacques Chapsal C’est une loi qui se dĂ©gage Ă  mesure que passent les gouvernements les fusibles » sont faits pour sauter. Chaban-Delmas l’a Ă©prouvĂ© en Ă©tant le second » de Pompidou – prĂ©sident de la RĂ©publique aprĂšs de Gaulle – sortant vaincu de ce duo qui tourna au duel et injustement Ă  son dĂ©savantage. Pourtant, la cote de popularitĂ© d’un prĂ©sident peut chuter au-dessous de celle de son Premier ministre durablement, dans le cas de Sarkozy et au terme d’un rĂ©fĂ©rendum manquĂ© de Gaulle ou d’une Ă©lection perdue Giscard d’Estaing, il lui arrive de cĂ©der sa place Ă  la tĂȘte de l’État. Nous ne parvenons pas Ă  accomplir des rĂ©formes autrement qu’en faisant semblant de faire des rĂ©volutions. »2953 Jacques CHABAN-DELMAS 1915-2000, AssemblĂ©e nationale, 16 septembre 1969. MĂ©moires pour demain 1997, Jacques Chaban-Delmas Le Premier ministre songe naturellement aux Ă©vĂ©nements de Mai 68, constatant de façon plus gĂ©nĂ©rale que la sociĂ©tĂ© française n’est pas encore parvenue Ă  Ă©voluer autrement que par crises majeures ». C’est un mal français, maintes fois diagnostiquĂ©. Contre les conservatismes » et les blocages », il propose sa nouvelle sociĂ©tĂ© ». La guerre des RĂ©publiques est terminĂ©e. »3113 Jacques CHABAN-DELMAS 1915-2000, prĂ©sentant son gouvernement le 23 juin 1969. La Guerre de succession 1969, Roger-GĂ©rard Schwartzenberg L’UDR soutient ce baron » du gaullisme, rĂ©sistant pendant la guerre et en mĂȘme temps un des piliers de la QuatriĂšme RĂ©publique. On lui passe mĂȘme quelques gestes d’ouverture en direction d’anciens adversaires du GĂ©nĂ©ral. Mais la guerre n’est pas finie entre les partis ! Et les tentatives de sĂ©duction du trĂšs sĂ©duisant Premier ministre vont Ă©chouer. Les centristes d’opposition continueront de dĂ©noncer la dictature de l’ État UDR », tandis que la gauche socialiste et communiste fourbit les armes de l’union qui fera un jour sa force. Il y a peu de moments dans l’existence d’un peuple oĂč il puisse autrement qu’en rĂȘve se dire Quelle est la sociĂ©tĂ© dans laquelle je veux vivre ? J’ai le sentiment que nous abordons un de ces moments. Nous pouvons donc entreprendre de construire une nouvelle sociĂ©tĂ©. »3116 Jacques CHABAN-DELMAS 1915-2000, Discours Ă  l’AssemblĂ©e nationale, 16 septembre 1969 Aucun discours parlementaire de Premier ministre n’eut plus de retentissement, sous la CinquiĂšme RĂ©publique. La dĂ©nonciation du conservatisme » et des blocages » de la sociĂ©tĂ© française annonce un programme ambitieux de rĂ©formes – maĂźtre mot des quatre prochains prĂ©sidents, mais malheureusement pas de Pompidou, aux prioritĂ©s plus concrĂštes que sociĂ©tales ! Chaban-Delmas, dans L’Ardeur 1975, donne de sa nouvelle sociĂ©tĂ© » deux dĂ©finitions L’une politique, c’est une sociĂ©tĂ© qui tend vers plus de justice et de libertĂ© [
] L’autre sociologique, c’est une sociĂ©tĂ© oĂč chacun considĂšre chacun comme un partenaire ». Comment ne pas souscrire Ă  un tel projet ? Tandis que vous parliez, je vous regardais et je ne doutais pas de votre sincĂ©ritĂ©. Et puis, je regardais votre majoritĂ© et je doutais de votre rĂ©ussite. »3117 François MITTERRAND 1916-1996, AssemblĂ©e nationale, 16 septembre 1969. La PrĂ©sidence de Georges Pompidou essai sur le rĂ©gime prĂ©sidentialiste français 1979, Françoise Decaumont L’opposition ne fait pas mauvais accueil au programme du Premier ministre, sur le principe, mais elle doute de sa rĂ©alisation On ne bĂątit pas une nouvelle sociĂ©tĂ© sur des vƓux pieux. » Les difficultĂ©s viendront surtout du scepticisme du prĂ©sident de la RĂ©publique, aux convictions Ă©conomiques plus que sociologiques. On ne tire pas sur une ambulance. »3149 Françoise GIROUD 1916-2003, L’Express, 24 avril 1974 Le trait d’une charitĂ© sans pitiĂ© vise Chaban-Delmas dont la cote ne cesse de baisser dans les sondages, dĂ©but mai 1974. Jeudi 4 avril, avant mĂȘme la fin du discours d’hommage d’Edgar Faure, prĂ©sident de l’AssemblĂ©e nationale, au prĂ©sident dĂ©funt, Chaban-Delmas avait annoncĂ© par un communiquĂ© Ayant Ă©tĂ© trois ans Premier ministre sous la haute autoritĂ© de Georges Pompidou et dans la ligne tracĂ©e par le gĂ©nĂ©ral de Gaulle, j’ai dĂ©cidĂ© d’ĂȘtre candidat Ă  la prĂ©sidence de la RĂ©publique. Je compte sur l’appui des formations politiques de la majoritĂ© prĂ©sidentielle. » Candidature lancĂ©e trop tĂŽt ? Pas assez solide face Ă  Mitterrand Ă  gauche ? ConcurrencĂ©e par d’autres candidats Ă  droite ? Et Françoise Giroud de commenter Alors que MM. Giscard d’Estaing et Mitterrand provoquent des mouvements intenses d’admiration ou d’hostilitĂ©, parfois d’admiration et d’hostilitĂ© mĂȘlĂ©es, on a envie de demander, sans acrimonie, Ă  M. Chaban-Delmas Et vous, qu’est-ce que vous faites au juste dans cette affaire ? » Il encombre. Comment le battant a-t-il virĂ© Ă  l’ancien combattant ? » Il redevient dĂ©putĂ©, prĂ©sident de l’AssemblĂ©e nationale, toujours sportif et hyperactif, et il retrouve sa mairie de Bordeaux – surnommĂ©e la belle endormie ». ÂgĂ© de 80 ans et presque toujours aussi jeune d’allure, il soutient la candidature d’Alain JuppĂ© et se retire de la vie politique qu’il aura tant aimĂ©e, avec ce constant dĂ©sir de plaire qui irrita Pompidou. ALAIN JUPPÉ Premier ministre de Chirac qui le dĂ©signe comme le meilleur d’entre nous », homme de droite toujours droit dans ses bottes, il paie pour ceux de son camp en assumant diverses malversations. AprĂšs une carriĂšre politique presque aussi longue que Chaban, il lui succĂšde Ă  la mairie de Bordeaux pour dix ans et un marathon des travaux qui rĂ©veille la belle endormie ». Je suis droit dans mes bottes et je crois en la France. »3336 Alain JUPPÉ nĂ© en 1945, Premier ministre, TF1, 6 juillet 1995 Un mois aprĂšs son entrĂ©e en fonction, le plus fidĂšle ami de Chirac doit rĂ©pondre sur le loyer de son appartement parisien, trop bas pour ĂȘtre honnĂȘte, et la baisse de loyer demandĂ©e pour l’appartement de son fils Laurent. Affaire dĂ©risoire, mais symbolique. JuppĂ© devient vite impopulaire sa cote d’avenir » passe de 63 % en juin Ă  37 % en novembre baromĂštre TNS Sofres pour Le Figaro Magazine. Sa dĂ©fense paraĂźt rigide, illustrĂ©e par l’expression qui le poursuivra empruntĂ©e Ă  la cavalerie militaire Je suis droit dans mes bottes. » Autrement dit, je ne plie pas, j’ai ma conscience pour moi. En dĂ©saccord avec son ministre de l’Économie et des Finances, Alain Madelin, il doit faire face Ă  sa dĂ©mission, le 26 aoĂ»t 1995, et le remplace par Jean Arthuis. Mais il reste Premier ministre, droit dans ses bottes. En 1996, AndrĂ© Santini, dĂ©putĂ© de droite et grand faiseur de petites phrases, reçoit le prix d’excellence dĂ©cernĂ© par le trĂšs sĂ©rieux Club de l’humour politique, pour avoir dĂ©clarĂ© Alain JuppĂ© voulait un gouvernement ramassĂ©, il n’est pas loin de l’avoir. » Un Premier ministre, on le lĂšche, on le lĂąche, on le lynche ! »3383 Alain JUPPÉ nĂ© en 1945. La MalĂ©diction Matignon 2006, Bruno Dive, Françoise Fressoz Il a vĂ©cu un court Ă©tat de grĂące, Premier ministre 1995-1997 et maire de Bordeaux. Reconnu plusieurs fois par Chirac comme le meilleur d’entre les hommes de droite », il se rend vite impopulaire par le projet de rĂ©forme des retraites, le gel des salaires des fonctionnaires, la dĂ©route des Juppettes huit femmes dĂ©barquĂ©es du gouvernement aprĂšs quelques mois d’exercice et cette raideur de l’homme qui se dit lui-mĂȘme droit dans ses bottes. » Mais le pire est Ă  venir. En 1998, il est mis en examen pour abus de confiance, recel d’abus de biens sociaux et prise illĂ©gale d’intĂ©rĂȘt » – pour des faits commis en tant que secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du RPR et maire adjoint de Paris aux finances, de 1983 Ă  1995. Le 30 janvier 2004, le tribunal correctionnel de Nanterre le condamne lourdement dix-huit mois de prison avec sursis dans l’affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris et dix ans d’inĂ©ligibilitĂ©. L’appel interjetĂ© suspend l’application de la peine, jusqu’à l’arrĂȘt de la cour d’appel. Le 1er dĂ©cembre 2004, condamnation rĂ©duite Ă  quatorze mois de prison avec sursis et un an d’inĂ©ligibilitĂ©. JuppĂ© vit une traversĂ©e du dĂ©sert qui passe par le Canada
 Nombre de commentateurs bien informĂ©s estiment qu’il paie pour Chirac, reconnu comme responsable moralement. Il finira en beautĂ©, maire de Bordeaux, succĂ©dant Ă  Chaban et lui rendant Ă©lĂ©gamment hommage en baptisant l’un des grands travaux que lui doit la ville le fameux pont Jacques Chaban-Delmas qui relie les deux rives de la Garonne. LIONEL JOSPIN Premier ministre socialiste de cohabitation avec Chirac prĂ©sident de droite, il se rĂ©vĂšle beau joueur dans l’échec majeur de la gauche aux prĂ©sidentielles de 2002. Son retrait dĂ©finitif de la vie politique devient paradoxalement son premier titre de gloire. La nation est non seulement la rĂ©alitĂ© vivante Ă  laquelle nous sommes tous attachĂ©s, mais surtout le lieu oĂč bat le cƓur de la dĂ©mocratie, l’ensemble oĂč se nouent les solidaritĂ©s les plus profondes. La France, ce n’est pas seulement le bonheur des paysages, une langue enrichie des Ɠuvres de l’esprit ; c’est d’abord une histoire. »3343 Lionel JOSPIN nĂ© en 1937, Premier ministre, DĂ©claration de politique gĂ©nĂ©rale, 19 juin 1997 La cohabitation va durer cinq ans – un record sous la CinquiĂšme RĂ©publique. Le pouvoir du chef de l’État s’en trouve limitĂ©, mais sur la scĂšne internationale, avec les deux tĂȘtes de l’exĂ©cutif prĂ©sentes aux grands rendez-vous, la France parle d’une seule voix, la sienne. Pour commencer Ă  Ă©crire la suite de l’histoire de la France, Jospin forme un gouvernement d’union, centrĂ© sur quelques proches Martine Aubry, Claude AllĂšgre, Dominique Strauss-Kahn. Principale promesse de campagne les 35 heures payĂ©es 39 pour favoriser le partage du travail. C’est la mesure la plus populaire, la plus contestĂ©e aussi. Martine Aubry, ministre de l’Emploi et de la SolidaritĂ©, reste Ă  jamais la Dame des 35 heures », mĂȘme si Strauss-Kahn fut le premier Ă  prĂ©coniser la rĂ©duction du temps de travail RTT. Ancien professeur, Jospin affirme que l’école est le berceau de la RĂ©publique » et son ami AllĂšgre s’attelle Ă  la rĂ©forme, souhaitant dĂ©graisser le mammouth ». Mot maladroit qui entraĂźnera sa dĂ©mission. Pas de parcours politique sans Ă©chec. Celui de Jospin aux prochaines prĂ©sidentielles sera particuliĂšrement cruel – et sans doute injuste. J’assume pleinement la responsabilitĂ© de cet Ă©chec et j’en tire les conclusions, en me retirant de la vie politique. »3373 Lionel JOSPIN nĂ© en 1937, DĂ©claration du 21 avril 2002, au soir du premier tour des prĂ©sidentielles La gauche est hors-jeu et littĂ©ralement KO, la prĂ©sidentielle va se jouer Ă  droite toute. Lionel Jospin se prĂ©sente Ă  la tĂ©lĂ©vision et devant ses troupes, visage dĂ©fait, voix blanche Le rĂ©sultat du premier tour de l’élection prĂ©sidentielle vient de tomber comme un coup de tonnerre. Voir l’extrĂȘme droite reprĂ©senter 20 % des voix dans notre pays et son principal candidat affronter celui de la droite au second tour est un signe trĂšs inquiĂ©tant pour la France et pour notre dĂ©mocratie. Ce rĂ©sultat, aprĂšs cinq annĂ©es de travail gouvernemental entiĂšrement vouĂ© au service de notre pays, est profondĂ©ment dĂ©cevant pour moi et ceux qui m’ont accompagnĂ© dans cette action. Je reste fier du travail accompli. Au-delĂ  de la dĂ©magogie de la droite et de la dispersion de la gauche qui ont rendu possible cette situation, j’assume pleinement la responsabilitĂ© de cet Ă©chec et j’en tire les consĂ©quences en me retirant de la vie politique aprĂšs la fin de l’élection prĂ©sidentielle. » Ce 21 avril est l’une des dates chocs des annĂ©es 1990-2020 - avec les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, le Non au rĂ©fĂ©rendum sur l’Europe 29 mai 2005, l’attentat hyper-mĂ©diatique contre Charlie Hebdo 7 janvier 2015. Ma mission Ă  moi Ă©tait de conduire la gauche Ă  la victoire prĂ©sidentielle. Et lĂ , on pourrait dire que l’équipage de la gauche a abandonnĂ© son capitaine. »3375 Lionel JOSPIN nĂ© en 1937, Ă  propos du 21 avril 2002. Lionel raconte Jospin 2010, Lionel Jospin Le bilan du parti socialiste Ă©tait honorable, mais son programme dĂ©sespĂ©rĂ©ment vide aucune proposition propre Ă  faire rĂȘver les classes populaires dĂ©boussolĂ©es ou les jeunes avides d’idĂ©al. La campagne, mal conduite, devint une foire d’empoigne entre les 16 candidats, huit Ă  gauche, huit Ă  droite, chacun s’efforçant d’engranger un maximum de voix en prĂ©vision des Ă©lections lĂ©gislatives de juin. Le 21 avril fut parfois analysĂ© comme une nouvelle poussĂ©e d’extrĂȘme-droite, surtout ressenti comme tel par la jeunesse qui manifestait en masse, vent debout. C’est davantage une dĂ©mobilisation de la droite traditionnelle et plus encore de la gauche socialiste. Le PS va proïŹter de ce choc citoyen, des remords du corps Ă©lectoral et d’un rĂ©ïŹ‚exe de vote utile pour s’afïŹrmer comme la seule force autour de laquelle la gauche peut s’organiser. En attendant, Chirac est réélu avec l’alliance de toute la classe politique hormis les extrĂȘmes droite et gauche et un score sans prĂ©cĂ©dent 82,21 % des voix.

oKl3.
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